JUSTICE- PERSONNALITES- SAID BOUTEFLIKA,GENERAUX
TARTAG ET TOUFIK- PEINES ENCOURUES
(c) Arianna Poletti/Jeune
Afrique, 6 mai 2019-05-08
Le frère cadet de l'ex-président Bouteflika, ainsi que les
généraux Toufik et Tartag, ont été placés sous mandat
de dépôt ce week-end par le tribunal militaire de Blida pour « atteinte à
l’autorité de l’armée » et « complot contre l’autorité de
l’État ». Ils seront jugés devant cette juridiction, en vertu de l’article
25 du Code de justice militaire.
Les images historiques
retransmises par la télévision nationale des arrestations de Saïd Bouteflika, frère et conseiller du chef de l’État déchu,
et des généraux Mohamed Mediène (dit Toufik) et Athmane Tartag (dit Bachir), occupent les Unes de la presse algérienne ce lundi 6 mai, un
mois après la démission du président Abdelaziz Bouteflika.
Ces trois piliers du régime ont
été placés sous mandat de dépôt par le tribunal militaire de Blida, après avoir
été interpellés pour « atteinte à l’autorité de l’armée » et « complot contre
l’autorité de l’État ». Mais que risquent Saïd Bouteflika et les deux anciens patrons
du renseignement ? D’après la chaîne étatique ENTV, les trois piliers de la
présidence Bouteflika seront jugés en vertu des articles 77 et 78 du Code
pénal, mais aussi 284 du Code de justice militaire.
De 5 ans de prison à la peine de
mort
Les deux généraux Toufik et Tartag ont été exclus de l’armée et Saïd Bouteflika est un
civil. Dès lors, un tribunal militaire est-il compétent pour les juger ? Oui,
si l’on se réfère à l’article 25 du Code de justice militaire. Amendé en 2018,
celui-ci stipule que, en temps de paix, « les tribunaux militaires permanents
connaissent des infractions spéciales d’ordre militaire. Les auteurs, coauteurs
et complices de ces infractions seront traduits, qu’ils soient militaires ou
non, devant les tribunaux militaires. »
« Tout individu coupable de
complot ayant pour but de porter atteinte à l’autorité du commandant d’une
formation militaire, d’un bâtiment ou d’un aéronef militaire, ou à la
discipline ou la sécurité de la formation, du bâtiment ou de l’aéronef, est
puni de la réclusion criminelle de cinq à dix ans », précise l’article 284 du
Code de justice militaire. Le complot existe « dès que la résolution d’agir est
concertée et arrêtée entre deux ou plusieurs individus ». En cas de «
territoire en état de siège ou d’urgence », « le coupable est puni de mort ».
Par ailleurs, Saïd Bouteflika et
les deux généraux seront également jugés sur la base des articles 77 et 78 du
Code pénal, qui stipulent que « l’attentat, dont le but a été de détruire ou de
changer le régime, soit d’inciter les citoyens ou habitants à s’armer contre
l’autorité de l’État ou s’armer les uns contre les autres, soit à porter
atteinte à l’intégrité du territoire national, est puni de la peine de mort.
[…] L’exécution ou la tentative constitue seule l’attentat » (art. 77).
L’article suivant ajoute : « Le
complot ayant pour but les crimes mentionnés par l’article 77, s’il a été suivi
d’un acte commis ou commencé pour en préparer l’exécution, est puni de la
réclusion de 10 à 20 ans », divisée par deux s’il « n’a pas été suivi d’un
acte commis ou commencé pour en préparer l’exécution ».
Plusieurs sommations au général
Toufik
Fin mars dernier, les réseaux du général Mohamed Mediène,
alias Toufik, avec l’assentiment du frère du président, avaient eu l’intention
de détrôner le chef de l’état-major Ahmed Gaïd Salah, en relançant un vieux plan : proposer à Liamine
Zéroual, en retrait depuis sa démission de la présidence en 1998, de présider
l’instance de transition. Mais ce dernier a refusé. Selon nos informations, un décret de limogeage du chef
d’état-major était même déjà prêt le 30 mars.
Quant aux accusations de «
conspiration contre l’armée », Ahmed Gaïd Salah a à
plusieurs reprises accusé le général Toufik « d’inciter à entraver les
solutions de sortie de crise ».« J’ai déjà évoqué,
lors de mon intervention du 30 mars 2019, les réunions suspectes qui se
tiennent dans l’ombre pour conspirer autour des revendications du peuple et
afin d’entraver les solutions de l’Armée nationale populaire et les
propositions de sortie de crise. […] Je lance à cette personne un dernier
avertissement, et dans le cas où elle persiste dans ses agissements, des
mesures légales fermes seront prises à son encontre », avait-t-il déclaré lors de son allocution du 16 avril dans la wilaya de
Ouargla, sans nommer explicitement Mohamed Mediène.
Un peu plus de deux semaines plus
tard, ces menaces ont donc été mises à exécution.