SOCIETE-
PERSONNALITES- FEMMES ARABES ICONIQUES (7) (II/II)
© Nadda Osman/Middle East Eye, 29 mai 2022
Anbara Salam Khalidi : Écrivaine, traductrice et féministe, Anbara Salam Khalidi
est la fondatrice de l’une des premières sociétés féminines du Moyen-Orient, et
son influence s’étendra bien au-delà des frontières du Liban, où elle voit le jour en août 1897. Issue
d’une famille d’érudits et d’hommes politiques musulmans, Anbara
Salam est dotée d’une grande culture et se passionne pour la
littérature dès son plus jeune âge. Elle est promptement initiée à la
pensée féministe par un enseignant de son école et commence, dès son
adolescence, à écrire pour des journaux sur l’importance de l’éducation des
femmes. Pendant la Première Guerre mondiale, Anbara
Salam et un groupe de femmes partageant les mêmes idées enseignent
dans des écoles et des refuges. Elle voyage ensuite en Grande-Bretagne, où elle
se familiarise avec le combat des suffragettes et d’autres mouvements féministes. Dans
ses mémoires, publiés en arabe en 1978, elle dit s’être rebellée contre le
voile très tôt dans sa vie et avoir également refusé toute proposition de
mariage jusqu’à l’âge de 30 ans, après quoi elle épouse Ahmad Samih Khalidi, membre d’une
éminente famille de Jérusalem. En Palestine, elle consacre son temps à promouvoir les causes des
organisations de la société civile et aider à l’organisation de leurs
activités, ainsi qu’à résister à la colonisation sioniste galopante. Cependant, comme plus de 700
000 Palestiniens, les Khalidi sont contraints de fuir
la Palestine en 1948 lors de la Nakba et la
création d’Israël. Anbara Salam Khalidi décédera à Beyrouth en 1986.
Shajarat al-Dur : Souveraine d’Égypte dont le nom signifie « arbre de
perles », Shajarat al-Dur est l’épouse du premier sultan
de la dynastie mamelouke bahrite et la première femme
à siéger sur un trône égyptien depuis Cléopâtre. Née au début
du XIIIe siècle dans l’actuelle Turquie, Shajarat al-Dur est
l’exemple rare d’une femme ayant atteint le sommet du pouvoir dans le monde
islamique prémoderne. Esclave, Shajarat al-Dur
réalise une ascension rapide au sein du palais jusqu’à devenir la principale
concubine et, plus tard, l’épouse du sultan ayyoubide as-Salih. Lorsque
celui-ci décède, Shajarat al-Dur garde sa mort
secrète et prend le contrôle partiel des forces musulmanes égyptiennes, les
aidant à vaincre les armées des croisés lors de la bataille de Mansourah en
1250. Cette victoire contrecarre les plans des croisés, qui voulaient
utiliser l’Égypte comme une base arrière pour attaquer et
reconquérir Jérusalem. À la mort de Salih, il est attendu de son épouse
qu’elle se retire et cède le pouvoir à un autre homme. Or Shajarat
al-Dur conserve le pouvoir, d’abord en devenant sultane, puis en épousant l’un
des officiers de son époux, un mamelouk turc dénommé Aybak.
Ce faisant, Aybak devient sultan et la domination
ayyoubide en Égypte prend fin, substituée par celle des mamelouks. Alors
qu’Aybak assume les responsabilités militaires, Shajarat al-Dur dirige le sultanat, mais leur relation
tourne au vinaigre lorsque le sultan prend une seconde épouse. Shajarat al-Dur fait assassiner Aybak
et tente de faire passer le meurtre pour une mort soudaine et inattendue. Néanmoins,
les officiers du sultan mamelouk soupçonnent un acte criminel et, soumis à la
torture, les complices de Shajarat al-Dur avouent le
complot. Elle sera emprisonnée puis assassinée à son tour.
Rabia al-Adawiyya : L’une des figures les plus importantes du
développement du soufisme, Rabia al-Adawiyya, parfois
appelée Rabia Basri, est née dans une famille pauvre
de Bassorah, en Irak, en 701. Elle est vendue comme esclave par sa
famille, qui connaît de grandes difficultés financières. Les archives sur sa
vie indiquent qu’après avoir terminé ses tâches ménagères, elle a coutume de
passer toute la nuit à prier. D’après la légende, un jour, son maître
aurait vu une lumière brillante au-dessus de sa tête, illuminant la zone
alentour – certains récits la décrivent comme étant semblable à un halo. La
vision convainc l’homme de la libérer au motif qu’il serait mal de garder une
femme aussi pieuse à son service. Une fois libre, Rabia al-Adawyya adopte un style de vie ascétique, rejetant les
biens matériels et le mariage, et consacrant sa vie à l’adoration de Dieu. Ses
opinions religieuses sont résumées dans sa poésie, elle soutient
notamment que la croyance en Dieu devrait être fondée sur l’amour plutôt que
sur la peur du châtiment ou le désir de récompense. Décédée à l’âge
approximatif de 85 ans, Rabia al-Adawyya inspirera la
pensée soufie pour les siècles à venir.
Fairouz : La voix de Fairouz est omniprésente au
Moyen-Orient et au-delà. Ses chansons évoquent la nostalgie, la sérénité et le
désir. Née Nuhad al-Haddad à Beyrouth en 1934,
Fairouz, est découverte à l’adolescence par un
musicien du nom de Mohammed Fleifel. Elle acquiert
plus tard le surnom de Fairouz, mot arabe signifiant
turquoise, après sa première apparition à Radio Liban à la fin des années 40.
La personnalité hors du commun de Fairouz et son
étendue musicale ont contribué à forger l’archétype de la diva arabe, que de nombreux artistes tentent encore d’émuler de nos jours. Fairouz gagne vite en popularité, notamment grâce aux
paroles de ses chansons louant les vertus de la nation arabe, de l’amour, et la
cause palestinienne. L’une de ses chansons les plus connues est Sanarjaou Yawman (« nous
reviendrons un jour »), dédiée aux Palestiniens contraints à l’exil après la création d’Israël en 1948. L’artiste,
aujourd’hui âgée de 86 ans, est considérée comme une institution au Liban et à
travers le monde arabe.