SOCIETE-
BIBLIOTHÈQUE D’ALMANACH- RÉCIT FERROUDJA OUSMER- « DERRIÈRE LES LARMES DE
MA GRAND MÈRE »
Derrière les larmes de ma
grand-mère. Récit
de Ferroudja Ousmer
(préface de Daho Djerbal). Koukou
Editions, Cheraga Banlieue, 2021, 124 pages, 600 dinars
Une autobiographie ? Pas totalement
puisque s’y mêlent la mémoire et
l’histoire, individuelle et collective à la fois.
C’est une histoire racontée à travers
celle de Lolodj….qui vouait une admiration sans bornes à sa grand-mère Yaha.
Yaha est aux Ath-Yenni
ce qu’est mémé aux français.Un bout de femme pas plus haute que trois
pommes ; si petite, si blanche….au regard chargé d’une ombre de mélancolie
ne la quittant jamais….En fait, elle portait bien des douleurs et
des déchirures, les fantômes du passé, un pénible vécu, une indépendance conquise
par le sang, la hantant sans cesse.
C’est aussi une histoire racontée à
travers les vies des membres de la famille (dont l’un d’entre-elle fut un
héros, le commissaire Ousmer, qui avait
« retourné » et exploité , au bénéfice du
Fln/Aln, durant le guerre de libération nationale,
l’opération colonialiste des services psychologiques français , dite
« Oiseau bleu » qui avait permis l’équipement en armes et munitions
la zone 3 alors commandée par Krim Belkacem.)
C’est, enfin ,
le récit de vie de l’écrivaine, au départ jeune fille luttant à sa manière
(dont les études réussies en économie) pour se construire une vie émancipée
Tout cela non sans nous faire découvrir
Tizi Ouzou et la société kabyle d’hier et d’après -guerre.
Au passage, elle nous a fait rencontrer
(et c’est là , à mon avis, un point important car nos
écrivains doivent faire le maximum pour nous faire découvrir et/ou re-découvrir les richesses culturelles du pays) un peintre
méconnu du XXè siècle , natif de Ath Yenni , Azouaou Mammeri, reconnu
par ses pairs européens et à l’itinéraire « qui donne
le tournis » (pp 82-83).Plusieurs hommes en un seul !
L’Auteure :Née en 1955 à Ath Yenni.Enseignante
d’économie au lycée Amirouche durant 25 ans avant de rejoindre un Institut
privé comme enseignante et consultante.Membre
de Racont’Arts et du Comité d’organisation du Salon
du livre de Boudjima.Animatrice d’ateliers d’écriture
pour adultes et pour enfants
Table des matières : Préface/ Introduction/ 14 chapitres
Extraits : « Maudite société patriarcale !Respectueuse des aînés aux vues parfois étroites,
incapables de s’asseoir sur leur virilité, même dans les moments les plus
cruciaux !(…) Maudite, cette tradition scélérate qui maintient la femme
sous le joug de son père, de son frère ou de son homme ! » (p39), « Ces aïeux avaient le sens du verbe, ils en
usaient et en abusaient pour distiller à leur progéniture une horrible
culpabilité qui freinerait un éventuel envol.Ils
savaient s’y prendre pour vous assurer de ces paroles vitriolées qui vous
brisent les ailes, vous réduisent à néant :pouvoir des mots qui maintient
la progéniture mineure à vie » (p43),
« A Tizi Ouzou, comme dans un petit
village, tout se savait.D’ailleurs,
les gens de la haute ville appelaient le centre-ville « l’billadj » (p 73)
Avis : « Une vraie leçon de choses sur la Kabylie
des Ath Yenni » (Daho Djerbal)
Citations : « L’histoire d’Algérie,
finalement, est émaillée d’histoires singulières. N’est-ce pas les petites
histoires mises bout à bout qui font la grande
Histoire » ( p
21), » Mettre un nom sur un martyr, c’est le sortir de sa sépulture pour
l’installer dans la mémoire collective » (p22), « Tout doit rester en
dedans ; souffrir en silence, rester digne.C’est
ça une vraie femme kabyle ! Ne pas se lâcher même dans ces circonstances
atroces, le self-control est de mise » (p57