SOCIETE- EUDES ET ANALYSES- VIOLENCES
CONTRE LES FEMMES/CONFINEMENT COVID 19-ETUDE FUNAP
La période de confinement sanitaire n’a pas été sans
conséquences sur les femmes. Les violences à leur égard se sont exacerbées, en
prenant plusieurs formes : agressions physiques, sexuelles,
psychologiques, socioéconomiques…
C’est ce qui ressort d’une enquête rapide
en ligne (2020) réalisée pour le Fonds des Nations unies pour la population (Funap) par l’avocate et consultante Nadia Aït Zaï. Intitulée «Prise en charge
des femmes et des filles victimes de violence basées sur le genre durant
l’épidémie de Covid-19», l’étude parle d’une «pandémie fantôme». «La violence à l’égard des femmes constitue l’une des
violations des droits humains les plus répandues.
A l’ère de la pandémie,
cette violence a connu une recrudescence manifeste due à ‘‘une pandémie
fantôme’’, alarmante qui serait imputable en partie à l’isolement social, aux
conséquences économiques de la crise sanitaire et à la réduction du revenu des
femmes et de la famille», note d’emblée l’auteur de cette enquête.
Selon la même source, les mesures
d’urgence exceptionnelles et le confinement mis en place pour contrer la
pandémie de Covid-19 «n’ont fait qu’exacerber un contexte de violence conjugale
existant, en raison de l’amplification de certains facteurs».
Analysant les chiffres de la Direction
générale de la Sûreté nationale (DGSN), l’enquête souligne la gravité du
phénomène de la violence à l’égard des femmes durant les dix premiers mois de
l’année 2020, avec 5835 cas enregistrés (plus de 9000 cas, selon les chiffres
des associations). Les données de la DGSN, ajoute la même source, montrent une
prédominance des violences physiques (71,17%).
L’autre fait inquiétant est la
recrudescence des homicides pendant le confinement. Durant les dix premiers
mois de l’année, au moins 32 femmes victimes de violences sont décédées. Il y a
eu 6 homicides volontaires de janvier à février 2020, 19 de mars à octobre,
soit 25 femmes tuées durant cette période.
Les coups et blessures ayant entraîné la
mort sont de l’ordre de 7 cas, ce qui porte le nombre total de femmes victimes
à 32. Concernant les auteurs de ces violences, l’étude fait état d’un
classement «assez atypique». «Les personnes
étrangères sont presque aussi nombreuses que les membres de la famille à
agresser les femmes.» «Dans la famille, les époux
prédominent dans la liste des agresseurs établie à partir des chiffres de la
police», mais ce qui est le plus frappant, c’est
qu’ils sont suivis de la catégorie «autres
membres de la famille», ce qui «nous fait penser aux oncles, beaux-frères, etc.» précise l’enquête.
Devant cette situation, l’avocate affirme
que «l’Etat est dans l’obligation de créer des mécanismes de
protection, tels que l’ordonnance d’éloignement, des centres d’accueil et un
mécanisme de signalement des violences».
Les chiffres de la DGSN ne cernent
toutefois pas l’ampleur du phénomène. Les données récoltées par des
associations, reprises par la même étude, relèvent la gravité de la situation.
Elles font état de près de 10 000 cas
de violences contre les femmes, avec près de 1000 cas d’atteintes à caractère
sexuel (827 cas, contre seulement 138 enregistrés par la police), 2548
violences socioéconomiques et 3263 brutalités psychologiques (1416 cas
enregistrés par la police).
«Ces chiffres nous démontrent que les femmes parlent plus
aux associations, mais elles ont de la peine à aller déposer plainte à cause
des contraintes et des obstacles auxquels elles sont confrontées ; divorce
éventuel, manque de logement, manque de travail, manque de revenus, enfants à
élever sans le père», indique la même source, précisant
que «ces motifs ont été avancés par les femmes
qui se sont confiées aux associations».
Concernant les facteurs à l’origine des
violences à l’égard des femmes, l’enquête mentionne quatre causes
essentielles : la perte de revenus, le désaccord persistant, l’exiguïté du
logement et la difficulté de cherche de l’assistance. «Le confinement a exacerbé les violences à l’égard des
femmes à cause de la cohabitation continue avec leurs agresseurs dans des
appartements souvent exigus»,
note encore l’enquête.
Cette étude relève aussi, à côté des
violences classiques répertoriées et enregistrées, l’apparition des violences
socioéconomiques (perte de revenus, licenciement, baisse des salaires). De
plus, elle souligne aussi que les données sur la violence envers les femmes
handicapées ne sont pas parlantes, du fait de la difficulté pour ces dernières
à s’exprimer ou à joindre les associations spécialisées.
Durant cette longue période de
confinement, ajoute la même enquête, «beaucoup de femmes sont restées sans traitements de
trithérapie pour le VIH-sida, car il est servi uniquement dans les hôpitaux et
le déplacement était impossible pour cette catégorie de malades».