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Recueil textes Rachid Mimouni- " Chroniques de Tanger...."

Date de création: 03-06-2020 17:51
Dernière mise à jour: 03-06-2020 17:51
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SOCIETE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- RECUEIL TEXTES RACHID MIMOUNI- « CHRONIQUES DE TANGER…. »

 

Chroniques de Tanger. Janvier 1994-Janvier 1995. Recueil de textes journalistiques de Rachid Mimouni . Editions Sedia , Alger 2016 (Stock, 1995) , 213 pages, 700 dinars.

Le monde et la vie du monde en une cinquantaine de chroniques, certes destinées à la radio (chronique hebdomadaire à Medi 1), mais dignes de figurer dans la liste d’une des meilleurs productions d’un de nos meilleurs écrivains  .

La chronique est, il faut le rappeler, une forme d’écriture qui a donné au journalisme le lustre qui lui manquait. Cest le genre journalistique le plus élaboré, le plus complet , mais aussi le plus difficile à atteindre. Car elle mobilise et réconcilie plusieurs talents en un seul. Fraîcheur du reportage, rigueur de l’éditorial, précision de l’agence, allégresse du roman, sagesse du philosophe, prudence (ou rage ) du politique, certitude (ou doute) du militant, sourire (ou grimace) de la satire ...

Ceci pour la presse écrite. Pour la radio, il faut ajouter la voix qui accroche et le ton qui rapproche .

Chaque semaine donc, Rachid Mimouni, se trouvant , contre son gré « exilé » en famille, pas très loin du pays, au Maroc qui l’avait « hébergé » (il faut signaler au passage que, en ce temps-là, rares étaient les « pays frères et amis » qui acceptaient de (bien , durablement  et dans la sécurité ) accueillir les intellectuels et journalistes démocrates algériens fuyant –car sans protection chez eux-  les menaces terroristes) , « sculptait le verbe », parfois, sinon  souvent à la va-vite ; un événement d’actualité brûlante chassant l’autre.

Il arrivait, confie le Rédacteur en chef de l’époque, vers midi chaque jeudi, prenait son courrier, allumait une cigarette et posait l’immuable question : « Alors, quoi de neuf ? ». Il fallait, en quelques mots, « faire le tour de la planète ».Un « point de vue exclusif » !

Une cinquantaine de chroniques sur le monde .....et sur l’Algérie. Sur des faits en apparence d’une extrême banalité (comme la liberté des pigeons et les frontières ou les animaux dits de compagnie) , mais aussi sur le terrorisme (il a été visionnaire puisqu’il avait presque prédit ce qui se passe de nos jours) , sur le Fis et le Gia, sur Abassi Madani, Ali Belhadj et le Pouvoir, sur l’Islamisme et ses dangers,  sur le Maghreb , sur l’Etat général de   l’Algérie, sur l’Education et les Savoirs, sur le Tourisme, sur la Démocratie,  sur le Travail ,  sur les Intégrismes castrateurs....Toujours avec un engagement certain....mais aussi avec beaucoup de tristese et de nostalgie. Il est mort un jeudi du mois de février 1995....loin de son pays....Les derniers mots de sa dernière chronique : « Les faucilles, svastiqa et croissant ont surgi pour nous rappeler , parfois de la pire manière, que l’ordre de notre monde est détestable » . C’est peut-être, tout cela, chez cet homme si sensible et si pudique,  qui a précipité sa mort !

 

L’Auteur : Grand écrivain  de la littérature algérienne contemporaine, né en novembre 1945 à Boudouaou et décédé en février 1995 à Paris des suites d’un hépatite aiguë . Diplômé (Alger, Montréal)  en sciences commerciales, enseignant à l’Inped de Boumerdès où il résidait,  et à l’Esc d’Alger. Menacé par les terroristes islamistes, il s’était exilé , en 1993, au Maroc (Tanger) avec sa famille. Auteur d’une dizaine d’ouvrages , tous à succès (dont « L’honneur de la tribu », « Tombeza », « Le fleuve détourné », « De la barbarie en général et de l’intégrisme en particulier », « La Malédiction »...) . Obsédé par l’état  (de délabrement) de  la société, algérienne (et du monde), il s’est attaché à la décrire avec minutie. Lauréat de plusieurs prix.  

Avis : Une plume talentueuse et lucide,  une voix sûre, indignée et ironique , un ton serein, un style « va-et-vient » katébien . Formidable !

Extrait : « Les frontières sont stupides....En matière de séparation, de limites, de frontières, je préfère la ligne bleue de l’horizon. Elle  a non seulement l’avantage d’être imaginaire, mais aussi celui de reculer au fur et à mesure qu’on s’en approche » (p 51),

Citations: « Si la persistance des petits métiers est un signe de sous-développement , elle dénote aussi un art de vivre » (p 15) , «  A tant vouloir ressembler aux autres, nous risquons d’y parvenir. Mais nous aurons beaucoup perdu notre âme » (p 20),  « A raconter ce qu’on a connu, on vit plusieurs fois. En ce sens, les conteurs, les aèdes, les griots sont les gens les plus comblés du monde parce qu’ils ont mille histoires , et donc mille vies » (p 23), «  Les nombreux avatars de la démocratie nous obligent à veiller sur elle avec une sourcilleuse vigilance. Car, lorsque le meilleur est dit, il n’est pas toujours fait ;lorsque le pire est promis, il est souvent accompli » ( p 130) , « Il y a  la confusion, souvent faite dans les pays du tiers monde, entre pouvoir et Etat. C’est lorsqu’on parvient à établir une nette distinction entre ces deux concepts que commence l’Etat de droit » (p 189)