SOCIETE – BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH-
ROMAN SARAH HAIDAR –« LA MORSURE DU COQUELICOT »
La morsure du coquelicot. Roman de Sarah
Haidar (Préface de Yannis Youlountas).
Apic Editions, Alger 2016. 135 pages, 500 dinars.
J’ai toujours mal accepté les préfaces à des romans ,
tout particulièrement lors d’une première édition. A la rigueur, lors d’une
nouvelle édition....pour une œuvre qui a fait ses preuves, devenue un classique
du genre. C’est en terminant l’ouvrage de Sarah Haidar
que j’ai alors compris.....qu’elle méritait amplement que l’écrivain, cinéaste
et militant libertaire grec , lui consacre une
présentation qui nous met dans le bain. Pour mieux comprendre. Non, pour mieux
nous préparer au plongeon dans le monde parallèle, mais réel puisqu’il a ses
militants et ses adeptes , de ceux qui ne croient qu’en l’homme dégagé
de toutes les servitudes (surtout celles imposées par d’autres hommes) et en la liberté totale.
Le roman est, en fait , un recueil de confessions de plusieurs personnages,
tous révoltés, rebelles, libres,
emprisonnés, parfois torturés, souvent soumis à d’infâmes chantages, mais
toujours éternels manifestants, , ne voulant
« ni Dieu , ni maître » et n’acceptant aucun «
ordre » qui ne peut être qu’oppressif
Des personnages perdus dans un pays en guerre perpétuelle
. Un pays qui , après « tant de siècles pudibonds et tristes,
découvrit la seule essence possible de l’extase : la
violence ! », dans un « territoire érogène » : Louisa dont
« les aisselles donnaient les parfums manquant à la révolte » , Mohand , « descendu du fleuve à demi-castré et à
moitié aveugle.. », le Commissaire , « aux prises avec une
insurrection dont il comprenait la poésie » , Dassine
, « pieuse et silencieuse jusqu’à l’ultime centimètre creusé par le
pal », Mahmoud, « le récalcitrant aux racines qui finit par s’en
étrangler »...L’auteure les raconte, raconte leurs désirs, leurs révoltes
leurs souffrances, mais aussi leurs espoirs,
à sa manière et dans son style bien plus libre que ses personnages. On
s’y perd un peu ! Beaucoup même pour celui qui n’a pas lu ou compris
« Virgules en trombe » . En fait, un
véritable orgasme littéraire
L’Auteure : Née en
1987 à Alger, Sarah Haidar est écrivaine et
journaliste. Son premier roman, Zanadeka
(Apostats), a reçu le Prix Apulée (2005) décerné par la Bibliothèque
Nationale d'Algérie. Virgules en trombe est son premier livre écrit en
français ( Apic , 2013). Il
a obtenu, en 2013, le Prix de l’Escale
littéraire d’Alger
Extraits: « Il y
a des miracles qui ne doivent rien à Dieu ni au diable d’ailleurs. Ce sont des
pathologies de la logique du mal, une espèce de cellules cancéreuses qui se
développent dans le corps, visiblement fort de la cruauté » (p 45),
« Le miracle est une providence punitive. Il ne survient pas pour aider
les damnés mais pour rétablir une petite harmonie dans l’univers, remettre
quelques atomes à leur place afin d’empêcher une implosion, corriger les
erreurs que nous sommes » (p 46)
Avis : Le préfacier nous dit qu’à
Alger, il a rencontré « la liberté incarnée », une femme qui
« regarde sans poser, qui regarde sans retenue, qui écrit sans
crainte ». Il faut lire pour saisir la portée du jugement. .
Citations :
« Beaucoup ne le savent pas, mais on a toujours besoin d’un sans-abri pour
nous montrer le chemin de la maison » (p 50) , « Un assassin
sans conviction est mille fois méprisable qu’un sniper honnête » (p 55),
« Que c’est triste de mourir dans un monde si rempli de chants
nationalistes et si vide de musiques ! » (p 56), « Ne mourront
que ceux qui craignaient la vie » (p 126).