SOCIETE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN
RABIA DJELTI- « LE FOU DE MARILYN »
Le
fou de Marilyn. Roman de Rabia
Djelti (traduit de l’arabe par Amina Mekahli).Editions Dalimen, Alger
2019, 168 pages, ??????dinars
Zoubir La Crevette n’est pas beau,
mais alors pas du tout avec sa grosse tête posée sur un corps bien frêle et des
mains aussi larges que des feuilles de cactus , ….Il est fils unique ,
petit-fils d’un illustre moudjahid (chahid) ayant son propre appartement (il loge
pourtant chez papa-maman) enseignant , une vieille voiture, un Qi élevé, des
copains de lycée (qui, bien sûr se rencontrent fréquemment dans l’appartement
…pour réviser et discuter ) et, surtout un grand et fidèle ami Abbas Che Guevara…. « un homme libre ». Zoubir est
affublé par ses copains d’un surnom. Heureusement pour lui, il a une « crevette » (pas besoin
de vous faire un dessin !) qui ressemble bien plus à un mérou de bonne
taille qu’à une petite sardine. L’arme fatale qui laisse coi ses copains, qui , désormais, le regarde d’un autre œil. Hélas, il n’a
pas d’amie car trop timide et enfoncé dans son complexe .
Le temps passe, les
copains s’éparpillent…..sauf Abbas qui, à chacun de ses retours de mission (il
est dans la marine, dit-il) retrouve son ami et loge dans l’appartement
.
Le temps passe…..Zoubir a une aventure avec une «
collègue » qui aime le gros poisson…un aventure qui ne dura pas. Elle le
quitte brusquement sans l’avertir.
Le temps passe et Zoubir ,
réfugié dans le logement de ses parents
décédés, s’enferme dans le monde des posters de belles actrices dont
Marilyn Monröe, sa préférée.
Le temps passe et,
en plus de son physique qu’il pense très ingrat, la calvitie avance. Il veut
(et va) se marier. Tout est bien qui finit bien pusiqu’il
a tout ce qu’il faut : deux logements, un travail, une petite voiture et
un ami fidèle….
Pas si sûr !
On ira de surprise en surprise….en lisant le roman qui raconte la vie (et la
mort) d’un solitaire vivant pourtant dans une grande ville, bien vivante…..mais
peut-être « trop plate » pour bien apercevoir les bonheurs « d’à
côté » et qui, soudain, « découvre », lors de la cérémonie de
mariage de son ami, à Alger, une autre vie. Alors, il dansera ….. pour Malika
et Abbas, les mariés et copains de lycée, et aussi pour tous ses amis de
classe, pour Sakina la rousse, qui fut sa maîtresse
aimante, pour Nebia sa future épouse.. …sa plus belle danse….. celle toujours endiablée, qu’il effectuait , seul, dans son logement, avec…….Marylin.
L’Auteure : Née en août 1954 à Bouaânani . Etudes primaires
au Maroc, secondaires à Oran, universitaires à Oran (littérature arabe) . Magister et Doctorat d’Etat en littérature
,à Damas. Enseignante universitaire (Université d’Alger) . Poétesse, romancière et traductrice , auteure de plusieurs œuvres (recueils de
poèmes, romans) .....et
Prix de la Création littéraire arabe pour l’ensemble de son œuvre (Abu Dhabi,
2002).Elle est l’épouse d’Amin Zaoui, l’écrivain et
chroniqueur
Extraits : « Si tu
savais combien nombreux sont les corps en décomposition, une multitude de
cadavres se promènent dans les villes en respirant, sur cette terre, l’air
confiné des tombes à ciel ouvert. Des corps assis, des corps debout sur leurs
jambes, des corps qui marchent et leur odeur insupportable qui monte jusqu’au
ciel n’est autre que l’odeur de la mort. Ces innombrables cadavres qui
respirent encore ! » (pp 32-33), « Si mes parents m’ont mis au
monde, c’est pour qu’ils puissent vivre à travers moi après leur mort. Que leur
mémoire soit autant entretenue que les endroits où ils ont vécu et les objets
qu’ils ont laissés après eux » (p 120), « Alger est très différente
d’Oran. Chez nous, la ville semble construite sur une planète d’apparence
plate……..A Alger, le paysage semble différent, elle semble construite sur une
planète bosselée, crantée, on dirait une pièce montée. A Alger, tout est
penché, escarpé, circulaire, bosselé, … » (p 147)
Avis : Un roman d’amour ?
Plutôt un roman de vie banale d’un solitaire à la recherche éperdue d’un bonheur…..raté
….car trop proche.
Citations : « Quand
une femme décide de quelque chose, il est difficile de la lui refuser et, quand
c’est une mère qui est déterminée à
faire le bonheur de son enfant, rien ne lui est impossible » (p 19) , « Nous ne sommes pas
seulement à l’image de ce que nous disons, mais nous sommes également à l’image
de ce que nous taisons ! » (p 37), « Nous avons tous un point
fort qui nous aide à continuer de vivre. Personne, sinon, ne pourrait survivre
sans cela….L’être humain raisonnable est celui qui se penche sur lui-même pour
connaître son point fort mais aussi son point faible » (p 65), « Les
gens ne lisent plus. Le monde ne lit plus. Le temps de la littérature et des
romans est définitivement révolu, il ne reviendra plus. Il est remplacé par le
temps de l’argent et des affaires, celui des comptes en banque et des réseaux
fructueux. C’est le temps des guerres et de la vente d’armes. C’est le temps de
l’art de la trahison, de l’hypocrisie et de l’opportunisme galopant » (p
100), «La première fois est l’œil de la découverte et de l’étonnement…… La
vieillesse n’est pas une question d’âge mais une question de rareté jusqu’à
l’extinction de ces « Premières fois » (p 114)