SOCIETE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN
BACHIR MEFTI- « L’ARCHIPEL DES MOUCHES »
L’archipel des mouches. Roman de Bachir Mefti
(traduit de l’arabe par Warda Hammouche) . Editions Barzakh (et Editions
de l’Aube, France) , Alger 2003
(Edition originale en arabe , Alger 2000), 490 dinars,
153 pages
Une Algérie perpétuellement en guerre (s). La guerre de libération nationale
et sa violence n’ont pas encore été totalement « discutées » que voilà la « décennie rouge »
.Une violence continuelle ajoutant à des traumatismes d’autres
traumatismes....dans une atmosphères mélangeant le bien absolu et le mal absolu, obligeant les individus à
être dans un « entre-deux » fait beaucoup plus
d’ « assassinat moral » permanent que de jouissances et de sérénité.Les plaisirs sont brefs et fuyants,
insaisissables. Ainsi, notre héros (sic !) , S.
se met à mourir à petit feu. Lui « le jovial, le dynamique, l’éternel
révolté est devenu, peu à peu, une loque desséchée, calcinée, sclérosée,
incapable de réagir ». Rien ne suscite en lui de l’enthousiasme. Ni
l’enseignement, ni l’alcool, ni l’écriture. L’amour, peut-être. Hélas, il
« tombe » amoureux fou d’une plus rebelle que lui ; Nadia. Elle
l’aime, mais elle le fuit continuellement. Elle aussi, fuit un univers familial
(des « gens d’en haut ! » sans foi, sans morale ni loi) que l’on devine oppressant et
oppresseur....et répressif.Nadia, pas touche !
De la mal-vie, un mal-amour.....de la mauvaise bière. Et, un
environnement intenable avec des gens qui, « en temps de guerre se sont
conduits en héros..... » et qui par la suite, doivent « renouer avec
cette époque ».....pour que les autres
(les « mouches ») se souviennent de leur bravoure. Ajoutez-y
une « guerre des mots » qui fait rage, des conflits qui
éclatent un peu partout avec leurs cadavres et le retour « violent »
à la religion . Avec ,
au bout de tout cela, la fuite à l’étranger,
la folie, le suicide....
L’Auteur : Journaliste et écrivain arabophone, des études de langue et
de littérature arabe à l’Université d’Alger, vivant et travaillant à Alger. Né
en 1969. Auteur de plusieurs romans dont Achbahou almadina al Maktoula (Fantômes
de la ville assassine), Doumiat Ennar (Poupée de feu), Les arbres de l’apocalyse......
Extraits : « Oran m’a paru effrayante et féroce (......).
Cependant, je l’ai trouvée belle. Sa
beauté semblait porter en elle un appel au plaisir ,
une incitation à mordre la vie à pleines dents et à se fondre dans une
atmosphère propice aux extrêmes et aux rêves les plus fous » (p 70)
, « Mon père croit qu’il aime le pays tout entier parce qu’il
détient le pouvoir » (p 100), « « Les gens ne pensent pas à la
mort. Ils la remisent dans un coin de leur conscience et la laissent enfler et
grossir comme une métastase » (p 133)
Avis : Déconseillé aux déprimés,
aux pessimistes, aux candidats à l’immolation....et aux solitaires, la lecture
ne pouvant que rajouter de l’essence (l’huile coûtant trop cher !) à leur feu
intérieur.
Citations : « L’écriture
me fait don de sa joie, me plonge dans les paradoxes et me protège des chocs
violents. L’écriture me place au cœur d’une aventure éprouvante ;la
perte y est certaine, et l’amour un don mystérieux » (p 13), « La
folie ouvre la voie à une autre vie alors que l’inconscience, elle, est un feu
qui se nourrit de tentations » (p 40), « La vie seule a le pouvoir
d’engendrer un événement destructeur sans qu’on puisse l’arrêter. La mort,
quant à elle, frappe sans prévenir et force le respect » (p 43), « Et si tout le drame était là,
précisément, dans une génération qui a grandi dans l’obscurité et qui meurt
dans le chaos ? » (p 85), « Le mensonge a toujours été notre
subterfuge pour affronter le pouvoir des institutions et la terreur des pères
dont le vocabulaire se limitait à gronder et à réprimer....Le mensonge résume
l’histoire de ce monde. Il est à
l’origine de la vie, il conduira à la perte » ( p
110)