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Roman Amin Zaoui- "L'enfant de l'oeuf"

Date de création: 28-01-2019 11:31
Dernière mise à jour: 28-01-2019 11:31
Lu: 1093 fois


SOCIETE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN AMIN ZAOUI- « L’ENFANT DE L’ŒUF »

L’enfant de l’œuf. Roman de Amin Zaoui. Editions Barzakh, Alger 2017 . 700 dinars, 232 pages

Un roman écrit à deux voix. Celle de Moul (diminutif de Mouloud) , l’humain, ou tout du moins ce qui en reste ; celle de Harys (qui auarait préféré être appelé Quitmir) , le caniche de compagnie (ou d’infortune). Deux « orphelins »  de la société .

Moul vit seul, son épouse Farida l’ayant quitté, sa belle-mère Sultana dont il était l’amant décédée sans avertir,  sa fille unique étant partie vivre sa vie ailleurs, un homme à l’aise matériellement mais déjà plus  jeune ,certes  pas  encore vieux ,la cinquantaine encore assez verte , malgré la sédentarité, la cigarette et le whisky à gogo ,et  au vu de ses exploits amoureux avec la réfugiée syrienne du dessous (sensuelle et bouleversée par la guerre , donc fragile) ou  la vétérinaire ....célibataire, soignant son chien.

Moul vit seul donc, se contentant de lire (la presse et les livres) , d’observer les autres (de son appartement dominant les rues grouillantes de monde d’Alger), de chanter Cheikha Remiti ou Jacques Brel .....et de parler à son chien.......un animal presque humain

Un homme et son chien. Le premier incapable de s’attacher à un autre être humain et le second vivant au rythme des besoins et des sentiments de son maître .....et ayant , lui aussi, des penchants de jouisseur.....aimant les chiennes de la véto’ , le chocolat noir.....et urinant avec plaisir sur les Unes des journaux (surtout celles arborant des portraits de politiciens)  lui servant de litière.

Un duo ? Un trio ? Un quatuor ? En tout cas, un groupe bancal, cacophonique, parsemé de passions et de déprimes, de joies tranquilles et de tristesses dans un univers plein d’hypocrisie, d’intolérance, de voisins voyeurs, de mensonges et de haines souvent sans raison.

Un univers qui ne tarde pas à s’écrouler lentement mais sûrement. Lara , la syrienne chrétienne (qui était obligée de cacher sa croix en Algérie) , part au Canada ; Farida, l’épouse , toujours amoureuse, meurt au loin d’un cancer des deux  seins et Tanila la fille unique décède dans un accident....Quand à la vétérinaire, elle en a marre de ses animaux et cherche un homme de compagnie. Harys , ne tarde pas à mourir......et Moul, désormais réellement bien seul, se retrouve..........Où ?????  Devinette ...à 700 dinars !

L’Auteur : en 1956, enseignant de littérature puis directeur du Palais des Arts et de la Culture d’Oran et de 2003 à 2008, directeur général de la Bibliothèque nationale d’Algérie . Ecrivain bilingue, auteur de plusieurs ouvrages (dix romans, un essai, un  beau livre...)  dont certains traduits dans une dizaine de langues.

Extraits : « Dès qu’il commence à pleuvoir, j’imagine Dieu dans ses cieux en train de pisser sur nous ou de pleurer à cause des bêtises humaines commises sur cette terre :les guerres, les haines, les infidélités » (p 34), « Les hommes sont des arriérés mentaux, il leur faut beaucoup d’années pour atteindre la sagesse. Et, quand la sagesse humaine se présente , elle arrive souvent accompagnée d’hypocrisie religieuse » (p 36) , « Les hommes fournissent beaucoup d’efforts afin de dissimuler les soupirs dus à leurs souffrances. Ces mêmes hommes font du bruit en mangeant, la bouche ouverte » (p 80),

 Avis :Assez originale comme écriture.....au style difficile à saisir au départ mais prenante par la suite. Toute l’histoire de la solitude. Triste mais émouvant.Et, un auteur toujours sévère  (une critique faite de « piques » que je trouve « objective » car franche et lucide) à l’endroit de sa société

Citations : «  Nous sommes dans un pays où l’islam est religion d’Etat et le vendredi un jour sacré. Le jour du couscous pour les grand-mères, de la grande prière pour les croyants et les politiciens hypocrites » (p 11), « Le plaisir de chier n’a dégal que celui de l’orgasme » (p 40), «  Je déteste les guerres et je vénère la mort des braves. Il n’y a pas de bonne guerre , toutes les guerres sont sales même si celles qui sont justes, même celles dites saintes » (p 156), « Ce sont les inconnus qui construisent l’Histoire pour les grands ou pour ceux qui deviennent grands « (p 157), « La morale n’est pas dans les institutions, elle est dans la culture, dans le niveau de la civilisation » (p 194), « C’est facile de trouver un trou de souris pour y vivre, mais pour tomber sur un vrai cœur chaleureux, il faut faire sept fois le tour du monde  » (p 216), « La vieillesse commence par la perte du miel du rêve » (p 224)