COMMERCE- FORMATION CONTINUE-COMMER E/MARKETING ,
DÉFINITION
Après plus de deux
décennies de foisonnement du "marketing digital", il faut se rendre à
l'évidence : plus personne ne comprend ce que recouvre le marketing.
Pour la plupart,
le marketing désigne un bric-à-brac d’outils digitaux, fluctuant en fonction
des modes : le web (1.0, 2.0, 3.0, etc.), les réseaux sociaux, la publicité,
les données client, les persona, les emails, les CRM, l’automatisation, l’IA
aujourd’hui… Un mantra flotte au-dessus de cet océan de confusion, le
“lead”. Tel est le graal du grand fatras digital. Le marketing se résoudrait à
cela : fournir des leads. Forts de cette promesse, tous les docteurs Mabuse du
business vendent leur potion ultime — qui a les meilleurs, qui en a le plus,
qui a les moins cher, qui a la formule magique pour les générer sans peine,
bla-bla-bla.
Le plus affligeant
est de voir des dirigeants, formés dans les meilleures écoles d’ingénieur,
croire aveuglément dans des techniques qu’ils ne comprennent pas, et prendre pour
argent comptant des chiffres de performance calculés au petit bonheur. La
vérité est qu’il n’y a pas de solution miracle parce qu’on agite les amulettes
du digital et de l’IA. Les règles de fond de la statistique, du commerce et de
l’informatique ne cessent pas de s’appliquer quand il s’agit de marketing
!
Le résultat de ces
croyances est hélas presque toujours le même : . les outils se succèdent et s’éparpillent, / les coût
s’empilent, /et les leads ne sont finalement pas bons — mais selon quels
critères ?
Nécessaire retour
aux fondamentaux : les 4P : Certes, depuis un quart de
siècle, la vague du digital a révolutionné les outils du marketing. Mais elle
n’a pas changé le marketing en tant que tel. Ses fondamentaux demeurent. Il est
temps d’y revenir. Le “mix marketing” se résumait en 4P : le
Produit, le Prix, la Place (distribution) et la Promotion (communication). Ils
restent les piliers incontournables du marketing.
Le Produit et le
Prix : Il s’agit de définir quel service est vendu à quel
prix à qui, quelle proposition de valeur est adressée à quelle cible. L’enjeu
est de trouver l’ajustement entre le produit et son marché, le customer-market-fit comme cela se
jargonne aujourd’hui.
Tout discours
commercial part de cette adéquation. La clarification de l’offre et de ses
clients est la base commune de la vente et de la communication. La marque
synthétise cette offre dans sa singularité, pour faciliter sa communication et
sa mémorisation. La grande majorité des entreprises dont les ventes
stagnent souffrent d’un problème d’adéquation entre le produit et le client.
Aucun outil digital, aucun budget d’acquisition ne suppléeront jamais un
positionnement défaillant. (Une précision s’impose quand on s’intéresse
aux cibles de l’entreprise. Le slogan du moment est de convoquer des persona,
qui sont des clichés pour imaginer à qui on s’adresse. Rien n’est plus
fantaisiste, rien n’a moins de valeur. Beaucoup de temps est perdu à ces
fumigations. Techniquement, les persona sont des agrégats statistiques
permettant de caractériser une segmentation. La création de persona nécessite
de s’appuyer sur un gros volume de données client, à la fois démographiques et
commerciales, pour identifier des segments de valeur et des comportements
correspondants. Le traitement statistique et sociologique de ces données est un
exercice lourd et complexe, donc coûteux. En pratique, seules les très grandes
entreprises peuvent procéder à la création de persona pour faciliter leurs
actions marketing et commerciales. Pour les autres, il faut se rabattre sur des
segmentations plus simples, principalement démographiques.) Le premier rôle du
marketing est donc de travailler l’offre. C’est le sens du “marketing
stratégique”, expression qui semble être tombée en désuétude, alors qu’elle
désigne un enjeu crucial. Or aujourd’hui le marketing est supposé se concentrer
sur l’opérationnel (le “Rev Ops”). Les
opérations marketing s’inscrivent dans ce cadre stratégique qui les déterminent
: Qui sont les acheteurs ciblés ? / Quelle est la tâche qu’ils
doivent réaliser (leur job-to-be-done) ?/ Quelle est l’offre qui y répond (sa proposition de
valeur, ses caractéristiques, sa tarification) ?/Comment cette offre est-elle
synthétisée dans la communication commerciale et dans la marque ? Il est du
ressort du marketeur, sinon de déterminer les réponses à ces questions, du
moins d’y apporter sa contribution.
La Place
(distribution) : Comment un produit est-il commercialisé ? Où
s’arrête le travail du marketing opérationnel et où commence celui des
commerciaux ? La ligne de partage n’a rien d’évident et nécessite un ajustement
précis, qui pourra évoluer dans le temps. Les configurations
possibles sont infinies. Elles vont de l’absence de commerciaux (vente à
distance, sans support humain), à l’absence de marketing (modèle 100% porté par
des vendeurs, sans support de communication). Le “lead” est le
point d’articulation entre marketing et vente.
Le juste réglage
de ce qu’est un lead — ce que le marketing doit apporter aux commerciaux pour
qu’ils puissent travailler efficacement — est un enjeu clé du marketing
opérationnel, mais aussi de l’organisation de la force de vente. Le lead pourra
aller du minimalisme (le drive-to-store) au maximalisme (bon de commande pré-rempli en ligne). L’important est qu’il s’articule avec
les différents types de commerciaux qu’il devra alimenter : du call center ou
du vendeur en magasin, à l’ingénieur d’affaires et au chargé de compte. L’importance
de cet ajustement de la distribution, entre marketing et commercial, est très
méconnu. Souvent, l’organisation commerciale est figée par le mode de
rémunération des vendeurs, et le marketing est sommé de les alimenter en
“leads”, sans plus de précision. Cette approche empêche de maintenir une
“orientation client” dans la durée. Au contraire, il est essentiel de revenir
toujours au parcours d’achat des différentes cibles, et d’organiser le
continuum marketing-commercial pour s’y adapter. Là encore, le marketing
opérationnel soulève un sujet stratégique, d’organisation interne. En général
les débats interminables sur “la qualité des leads” relèvent de cette question.
La Promotion
(communication) : La communication est l’aspect le plus visible
du marketing : elle concentre donc l’attention des décideurs et de la
gouvernance. Dans la pratique, la communication est surtout la résultante des
politiques de l’entreprise, et souvent elle est le révélateur de leurs incohérences.Qu’elle soit
commerciale ou institutionnelle, qu’il s’agisse de campagnes ou de la
documentation de référence, le principe de la communication est d’exprimer le
produit, de construire la marque, et de susciter attention, intérêt et
engagement auprès des cibles. Tout ceci découle directement des orientations du
marketing stratégique.
Parce qu’elle est
émotionnelle, la communication va rendre visible les choix profonds de
l’entreprise : ses valeurs, ses croyances, son organisation. S’il y a un
désalignement, notamment entre la production et le commercial ou entre la
direction et les équipes, il apparaîtra là. Il n’est que trop fréquent
que les marketeurs en soient jugés responsables. Il ne fait jamais bon être
celui qui cristallise un problème. Un des enjeux clés du marketing est ainsi de
penser la cohérence de l’entreprise, de trouver ses axes d’alignement et de les
développer. Là encore, le marketing touche à la stratégie générale.
Le système
marketing :Si le but du marketing est bien de mener des
campagnes pour générer des leads, son enjeu va bien au-delà. La marque, la
définition des cibles et de l’offre, la tarification, l’organisation
commerciale, et même le SI dans la mesure où ses outils digitaux doivent s’y
intégrer, conditionnent l’efficacité des actions marketing. Ce sont les
éléments déterminants du “système marketing”, dont le marketeur doit assurer la
cohérence et la fonctionnalité. Le terme
traditionnel de “mix marketing” disait qu’il fallait combiner tous ces aspects,
mais il ne manifestait pas leur caractère systémique. Or c’est bien d’un
système qu’il est question, dont chaque composante interagit avec toutes les
autres, et qu’il faut régler pour qu’il soit opérationnel. La combinaison du
“value proposition canva” et du “business model canva” est une bonne illustration de ce que recouvre la
notion de système marketing. Toute l’entreprise est concernée, toute l’entreprise
est potentiellement impactée par sa mise au point. Le digital et son
foisonnement d’outils ont occulté la dimension stratégique du marketing, et ses
promoteurs ont laissé croire que leurs solutions nouvelles dispenseraient du
fastidieux travail de conception et de mise en oeuvre
des politiques marketing. Le contraire est vrai : les outils digitaux ne font
sens que dans le cadre d’un système marketing bien réglé. Et parce que les
marchés évoluent sans cesse, le système marketing d’une entreprise doit en permanence
se ré-interroger, et régulièrement se ré-inventer.