SOCIETE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN SLIMANE
LAOUARI- « AU PAYS DE BOUDOU »
Au pays de Boudou. Roman de Slimane Laouari. Editions Frantz Fanon, Boumerdès 2024, 161 pages,
1 000 dinars
Un livre terminé très
exactement le 24 novembre 2021 ...à 17 h 43. Mais on ne sait quand il a été
commencé. On devine seulement à travers la lecture -qui n’est pas facile tant
le style est original (dans la tradition katébienne ?)
qui nous change pas mal de celui du chroniqueur de presse qui va tout droit au
but- que l’auteur, qui est à son premier roman, a utilisé tous les souffles de
l’écriture.....tant celui d’un réalisme parfois cru que celui de l’élan poétique.Un véritable roman « éclaté » avec des
personnages tout à fait ordinaires bien qu’originaux, des personnages pour
lesquels la vie n’a plus de sens ou n’a de sens que quand elle est
fiction : Au centre Mouhous et Nassira...et tous
les autres : Kader Mauvais Sang,Rachid l’acteur,
Salah le flic, Koukou le nain que sept doigts,
Soussou, Koukou, Messaoud Z.....et des lieux de
rencontres comme Le Néflier, le Puits , Le Précipice, un bistrot que les
habitués appellent « le trou ». ....
C’est donc l’histoire de
Boudou, bouc émissaire pour les uns, héros légendaire pour les autres, poète
indomptable pour les plus dupes.......qui devient le confident privilégié de
toute le monde. Cela dans un pays fatigué à force d’avoir trop rêvé
vainement ; un pays où les gens tournent le dos à toutes les questions et
cherchent désespérement tantôt à tout oublier, tantôt
à se faire oublier.On est
revenu de tellement loin que l’on ne veut plus tenter la moindre aventure en
dehors ....de la littérature
L’Auteur :Né le 22 avril 1960 à Mechtras (Kabylie).Études de droit (Alger /Ben Aknoun), puis carrière de journaliste. Actuellement
chroniqueur au sein du quotidien « Le Soir d’Algérie ». Premier
roman.
Extraits : « Rien n’échappe à
la vigilance des soulards, rien ne se fait à l'abri de leur regard embué,
personne ne peut tromper leurs guets discrets. Dans chaque retour de lucidité , il y a une histoire vraie et dans toute
divagation un évènement à méditer » (pp 36- 37), « Les vieux, il ne
leur reste que des histoires et quand ils n’en ont qu’une seule, ils deviennent
plus pénibles que leur âge » (p39), « Quand Zaky
est entré en prison, tout le monde
savait pourquoi, sauf lui.
Alors, à chaque fois qu’on lui posait la question, il racontait une version
différente de la même histoire.Personne
n’a cru la dernière, il n’y a aucune raison pour qu’on croie la nouvelle.Mais il en inventait pour lui-même.....histoire de
ne pas mourir d’ennui » (p 55), « Est-ce qu’il y a un avenir quand on
est mort ? Est-ce qu’il y a un avenir quand on attend de sortir de
prison ? » (p 57)
Avis : Un livre qui fait
travailler les méninges. Et, magnifique
couverture avec une illustration de Arezki Metref.
Citations : « Entre jumelles, il
y a une aînée et une cadette parce que le vagin n’est pas assez large pour
évacuer deux bébés en même temps » (pp 58-59), « Dans les
écoles-casernes, on apprend, on ne cherche pas à comprendre » (p
62), « Ils sont ainsi , les romanciers, même
quand ils n’ont encore rien écrit. Ils veulent changer le monde en changeant la
réalité » (pp 82-83), « Les femmes ne
reviennent jamais avec une femme ; dans les histoires d’ici, c’est
toujours un homme qui revient avec une femme » (p 97), ; « C’est
la fin de l’Histoire, pas des histoires » (p111)