SOCIETE-
BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN DAHBIA ABROUS- « L’AMANDIER DE DAR EL
LOUZ »
L’amandier de Dar El Louz......Roman
de Dahbia Abrous. Edition à
compte d’auteur (Imprimerie Ed-Diwan), Alger 2010,
281 pages, ?????dinars
Dans ce premier
roman, édité à titre posthume (et à compte d’auteur, comme il est dit
traditionnellement) bien plus pour rendre hommage à la mère, à la femme et à
l’épouse partie trop tôt, l’auteure décrit une période de sa vie et de,
celle de son enfance et de sa prime jeunesse......une période décrite avec les
yeux et la sensiblité de l’époque, ce qui nous plonge
dans une ambiance que beaucoup d’entre les lecteurs auront vécue.
On a donc une petite fille, née dans une famille pas du tout gâtée par la vie, durant la
période coloniale, ayant fui la Kabylie en septembre 1955 . Le décor
de ce roman est planté dès la première page : “Surplombant Alger la blanche, et
enfoui dans les reliefs rugueux de Z’ghara, un
quartier populaire dominant la mer Méditerranée, Dar El Louz
était une maison mauresque où il faisait bon vivre.” (page
13). Le père émigré en France , elle est très gâtée
par ses grands-parents paternels .Au fil des pages, on la découvre à travers
son regard de petite enfant, insouciante, n’en faisant qu’à sa tête, ne
pensant qu’à s’amuser et à mettre en rogne sa mère . Ensuite, adolescente, et
scolarisée tardivement, elle découvre le monde
qui l’entoure . Un autre regard, plus curieux, qui prend le temps de se poser
des questions et de chercher des réponses . Puis,
enfin, jeune femme, responsable , elle est avide
de réussir.....découvrant les réalités coloniales mais aussi une société en
changement.....avec difficultés. Comme beaucoup de jeunes algérien (-ne)s !
Il y a , aussi, de la
souffrance. Tout particulièrement celles des départs précipités de lieux lesquels , bien que ne réunissant pas les conditions
minimales de vie saine et sereine, restent à jamais chargés de souvenirs,
d'amitiés et d’amours , ne quittant pas votre âme d’enfant. Tout
particulièrement celles de la séparation définitive (dont le décès accidentel
du jeune frère) ou provisoire avec des êtres très proches. Aussi, celle causée
par la déception en voyant un être admiré devenu irrespectueux, publiquement, des règles minimales dans une société
alors à cheval sur les traditions.
Heureusement, il y a , toujours le lien très fort
, au-delà des difficultés matérielles, unissant la famille et, dans
un pays devenu indépendant, avec une amélioration des conditions de
vie.......Il a de nouvelles amitiés et surtout la réussite scolaire.Certes, la famille, comme beaucoup d’autres
venues de quartiers populaires ou de la campagne, habite désormais dans un
appartement (au « Champ de manœuvres ») .....mais l’amandier de Dar
El Louz est toujours là, inscrit définitivement
dans l’âme et l’esprit de Dalia.
L’Auteure : Née Magha . De formation universitaire (Journalisme)
,journaliste , cadre au ministère de l’Information et de la
Culture puis dans une entreprise publique économique, épouse du journaliste
Abrous Outoudert, décédée
prématurément le 28 novembre 2009. Note : Ne pas confondre avec la
sociologue et anthropologue Dahbia Abrous
Extraits : « Ah !
Les roumis ! Ils sont organisés et travailleurs.Chez,
l’heure c’est l’heure.S’ils étaient croyants, ils
iraient au paradis avant nous » (p73), « La meilleure amulette pour ton cas, c’est la parole.Il est des moments où la parole peut ouvrir un chemin
dans la mer » (p 102), « Ce n’est pas rien les pentes de la Casbah.C’est ce que les turcs ont trouvé de mieux à nous
laisser. A savoir ce qui nous restera dans ce pays une fois que les français
partiront » (p 145), « Dalia adora ces instants de rêve et souhaita
qu’ils fussent éternels.Car jamais elle ne se
lasserait de ces terrasses entrelacées où les maisons se rejoignent , se
rencontrent et communiquent et où se libèrent les secrets, se délient les
langues et s’ouvrent les cœurs face à l’immensité bleutée d’une mer
envoûtante » (p 153), « Elle fut très surprise au début (à l’école)
au début de constater que les mêms lettres qui
servaient à l’écriture du Coran, pouvaient servir à écrire autre chose. Cela
lui parut magique » (p 211), « Elle arriva
à la conclusion que la pauvreté entravait la liberté et pouvait même porter
atteinte à la dignité (p261)
Avis :
Toute une vie d’enfant racontée avec une simplicité et une franchise
qui émeuvent . Un texte spontané, sans fioriture . Un
texte chargé d’amour pour la famille, les amis, les voisins, les lieux habités
et /ou quittés...Un ouvrage qui mérite amplement d’être réédité..
Citations : « La fortune a-t-elle une odeur ? » (p 206),
« Les valeurs morales sont les mêmes pour tous les hommes.Nous
les retrouvons dans toutes les religions et toutes les civilisations.Quiconque
ne les respecte pas ne pourra jamais dire « je ne savais pas »
(p 248), « C’est vrai qu’apprendre le Coran est une très bonne chose et un
devoir pour le musulman, mais en faire un moyen de gagner des galons sociaux
est un péché.Le Coran est unique, mais il est aussi
ce qu’en font les hommes « (p249), « Pourquoi l’objet de nos désirs
prend-il tant d’importance à nos yeux tant qu’il nous paraît hors d’atteinte et
perd-il de sa grandeur à l’instant même où il atterit
entre nos mains ? » (p 267), « La
lecture était d’abord un formidable passe-temps et un pont unique vers le
rêve » (p 273)