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Essai Mohamed Kacimi - "Dissidences.Chronique du Hirak"

Date de création: 17-09-2020 18:26
Dernière mise à jour: 17-09-2020 18:26
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VIE POLITIQUE – BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI MOHAMED KACIMI- « DISSIDENCES.CHRONIQUES DU HIRAK »

Dissidences. Chroniques du HirakEssai de Mohamed Kacimi, Editions Frantz Fanon, Alger 2019, 208 pages, 700 dinars

A travers ses chroniques, l’auteur qui s’est volontairement voulu plus observateur et journaliste qu’écrivain du mouvement socio-politique qu’est le Hirak, n’y est pas allé de « main morte ».

Il ne s’est pas ,aussi, contenté de présenter la révolution populaire in situ .

Il a remonté le temps en revenant sur les causes profondes et lointaines de la révolte : Ben Bella, Boumediene (on apprend qu’il aurait fait ses études au Caire avec une bourse du Gouvernement français et que  Werner Herzog, avant de réaliser  son film « Aguire ou la colère des Dieux » avec Klaus Kinsky, avait d’abord pensé à Boumediene et lui avait écrit à ce sujet) , le socialisme arabo-islanique, le Fln (le parti unique), les résidences surveillées de personnalités politiques éminentes (Abbas, Ait Ahmed, Benkhedda..) , la répression,   les liquidations physiques des opposants politiques (Krim, Khider, Medeghri,Chabou….) , la politique cultu(r)elle de Taleb Ibrahimi, celle éducative de Kharroubi…..sans oublier Chadli  et 1980 en Kabylie , Octobre 88 et ses centaines de morts, le Fis, les massacres du Gia durant la décennie noire, la religion et ses excès …..et, bien sûr , Bouteflika… « qui va fonder une vraie kleptocratie » ….

Il  décrit le « tsunami »  du Hirak populaire à travers , entre autres, son «  printemps fou à Alger » , un 1er mars 2019. Il y était. Il nous emmène de Hydra à la Place du 1er mai en passant par la « colonne Voirol », le Chemin de Gascogne, un barrage de Cns, les hauteurs de l’hôpital Mustapha, la rue Hassiba Benbouali, le square Sofia, la place des Martyrs, puis le tunnel des Facultés et le retour vers la Place Audin, le Boulevard Mohamed V…….et la foule, des vieux mais surtout des jeunes , filles et garçons qui dansent, chantent….drapeaux agités….Louisa Hanoune qui est chassée du cortège…. Avec, bien sûr, toujours , en mains,  un sachet avec de l’eau et une bouteille de vinaigre . Quatre heures de marche. « Pas de casse » et des jeunes équipées de sacs poubelle nettoyant les rues jonchées de bouteilles d’eau vides et de papier….Une révolte populaire demandant la « libération de l’Algérie et son avenir ». Une journée de fou…qui fait dire à l’auteur qu’il « est en train d’aimer de nouveau cette ville (Alger)   qu’il « a tant connue et tant haïe ». Lui qui avait fini par ne plus croire en son pays, qui avait pris tant de chemins de traverse pour l’oublier….et qui , de retour , en février 2019, au pays (rentré pour veiller sa mère mourante) a assisté (et participé) au « redémarrage »  d’un pays « tombé en panne en 62 ».

 L’Auteur : en 1955 à Zaouia El Hamel. Vit à Paris. Plusieurs romans, essais  et pièces de théâtre. Très impliqué dans le théâtre , animant dans une association internationale des ateliers d’écriture.....

Sommaire : Avant-propos / Vingt cinq chroniques dont un entretien(2006, Libération) ,  des articles de presse (Libération : 2003, 2004, 2006, Le Nouvel Obs : 2014, Mediapart :)2019)…..

Extraits : « …Bouteflika, sorti tel un lapin du chapeau de l’armée, une fois encore. Pervers narcissique, mégalomaniaque en diable, vociférateur, dictateur, de la même trempe que Bongo ou Mobutu, l’homme était convaincu qu’il avait fait l’Algérie et non l’inverse » (p 18), «  Ce qu’attendent les Algériens, en ces moments de gestation convulsive, ce n’est pas un imam, ni un mufti, mais un maçon, un entrepreneur, un visionnaire qui pourrait leur montrer comment construire une démocratie dont ils rêvent depuis près de soixante ans » (p 133)

Avis : Style plus journalistique qu’académique,  pamphlétaire et rageur (on le comprend, comme on comprend tous les « enfants de l’indépendance  qui avaient cru que le monde allait « leur appartenir » )…..mais qui vise juste et fort. Se lit d’un seul  trait. Le « roman » du Hirak !

Citations : « Derrière chaque voile, il y a trois mille ans de haine envers la femme qui nous regardent » (p 36),  « L’intégrisme est le stade suprême de l’analphabétisme » (p 39), « Une culture ne se juge pas sur les Andalousies qu’elle a connues, mais sur les Andalousies qu’elle peut engendrer » (p 47), « Telle peut être la devise de l’islam wahhabite : on peut vivre dans la merde , mais faut se prosterner sur du marbre, au moins «  (p70), « Les islamistes n’ont pas réussi à prendre par les armes le pouvoir, mais le régime , pour faire la paix avec eux, leur a donné en pâture toute la société  » (p 81), « L’humour est l’arme qui permet à l’Algérien de ne pas prendre au sérieux sa détresse » (p 117), « On ne construit pas l’avenir sur l’oubli et on n’édifiera pas une République sur la clémence. Juger Bouteflika, c’est nous épargner la honte devant nos enfants » (p 138), « Spoliés de leur terre, les Algériens ont fait de la religion leur patrie, et, depuis la décennie noire, toutes les couches sociales rivalisent de piété et de la connaissance de la Charia » (p 175), « La démocratie n’est pas un mot d’ordre, elle résulte de l’effort de chaque citoyen pour accepter les idées, les croyances de l’autre, même si elles ne sont pas les siennes » (p 178), « Le Hirak est certes un mouvement de contestation, mais il doit être également et avant tout un temps de réflexion et d’introspection » (p 178