CULTURE
BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- GOUMEZIANE SMAIL- « L’ISLAM N’EST PAS
COUPABLE »
L’Islam n’est pas coupable. Essai de Smail Goumeziane .Edif 2000 , Alger 2016 (Non Lieu
–AAPM, Paris 2016) , 270 pages, 950 dinars)
Problématique posée par l’auteur :
« L’Islam est-il coupable des atrocités commises en son nom par des
terroristes autoproclamés musulmans, et plus communément appelés « djihadistes » depuis qu’ils rejoignent ou prêtent allégenace à Daech, l’autre nom
de « l’Etat islamique » récemment surgi en Irak et en
Syrie ? ». Evidemment non......le titre de l’ouvrage étant assez
clair. Donc ,d ’avance, on sait que l’auteur va
tout faire pour aller dans le sens de sa thèse. Un engagement tout à son
honneur de musulman mais dont il aurait pu faire l’économie pour plus de
« crédibilité » et, surtout, pour mieux démonter les thèses , bien
souvent fantaisistes , des nouveaux
« spécialistes » qui foisonnent......pratiquant, à partir des
plateaux de télévision , des studios de radio, de tribunes de presse , de
livres et de « blogs » , un véritable « terrorisme
intellectuel » qui a fini par jeter l’opprobre et l’anathème sur tout ou
partie de la « communauté musulmane », en particulier celle vivant
dans les « banlieues vertes » d’Occident . Trop de « vérités » toutes faites
sont assenées sans logique ni démonstration augmentant la « peur des
foules » déjà assez traumatisées par les attentats aveugles, meurtriers et
criminels - à travers le monde -
de groupes ou d’individus isolés se réclamant hier d’ « Al Qaida », de l’ « Ais », du
« Gia » et d’ « Aqmi », aujourd’hui
de « Daech »....Des attentats qui
ont entraîné des réactions étatiques encore plus meurtrières, ainsi que de la
xénophobie et du racisme citoyen .
La conclusion était ......attendue : « Non, l’islam
n’est pas coupable des crimes que certains « spécialistes » lui
imputent »....et « l’islamisme n’est pas une maladie de l’islam ».
Faut-il le croire ? En tant que musulman, oui. En tant qu’être doué
de raison raisonnante (je me crois !), peut-être une maladie de certains
musulmans qui n’ont rien compris (ou, alors, qui croient avoir tout compris) de
l’islam. Chez nous, aussi, trop de faux « savants » et autres « docteurs »
de la foi
Malheureusement donc, il nous livre trop de
coupables. Ainsi, « oui , les
régimes autoritaires (....) sont coupables des violences, exactions et
atteintes commises contre les populations ; oui, les terroristes de Daesch et d’Al Qaida , leurs
commanditaires et leurs complices actifs et passifs sont coupables des
atrocités commises (....), oui, tous ceux qui trouvent un intérêt (....) à la
poursuite de la tragédie sont coupables, dans le monde musulman, comme dans le
reste du monde ».... sans oublier les incontournables colonialisme,
néo-colonialisme, impérialisme, mondialisation.....
Et, il fallait s’y attendre, il ne nous
fournit guère que deux solutions : la bataille de l’éducation et la
bataille politico-économique....... sans oublier les instruments privilégiés du
chemin démocratique que sont la liberté et la justice. Où les trouver ?
Dans la Déclaration Universelle Droits de l’Homme, et les pactes
subséquents....et dans les textes
fondateurs de l’islam . Une vision trop universaliste
sur le dialogue des religions et le pluralisme
(R. Hammoudi) . De
l’utopie ? De l’angélisme ? Trop de raison dans un monde sans
conscience. Chez les uns comme chez les autres.
L’Auteur : Universitaire
et spécialiste de la Méditerranée, ancien ministre (au sein du gouvernement Hamrouche) , il a déjà publié plusieurs essais
dont « Le Mal algérien » en 1994 (chez Fayard) , « Le Pouvoir
des rentiers » en 2003 (chez Paris-Méditerranée) , « Algérie,
l’Histoire en héritage » en 2012.....
Extraits : « L’Islam
est au cœur d’enjeux politiques et sécuritaires planétaires dans lesquels il
finit, le plus souvent, par devenir le principal accusé, pour ne pas dire le
seul, de tous les crimes commis » (p 7),
« Dès les premiers califes, certains principes de l’islam ont été
battus en brèche. La violence ne laisse que peu de place à la paix. Là où
Mohammed avait résisté et finalement vaincu par la non-violence, les guerres de
conquête, les guerres civiles et les assassinats marquent les quatre premiers
califats, comme autant de jalons tragiques dans l’histoire tumultueuse et
mouvementée du « monde musulman » (p 77), « Le terrorisme
apparaît davantage comme le sous-produit
de sociétés musulmanes en état de crise politico-économique et comme celui
d’une planète mondialisée elle-même en crise » (p 226),
Avis : En
fin de compte, une sorte de gros
« Que sais-je ? » amélioré, très utile pour connaître
l’histoire de l’islam et son évolution
....une histoire assez mouvementée, alors que tout était si clair et (presque)
si calme au départ.
Citations : « De
façon générale (....), le mal et la violence semblent bien des constituants
génériques de l’humanité en général et non d’une nation, d’une ethnie, d’une
religion ou d’un groupe particulier » (p 199), « La violence extrême,
en ces temps particulièrement sombres, est ainsi l’arme politique ultime de
tous ceux qui savent le pouvoir politico-économique inaccessible si ce n’est
par la force et la confiscation des libertés individuelles et collectives
« (p 203) , « Plus que jamais, en ce XXIè
siècle, l’humanité est plurielle. Pour les musulmans, reconnaître ce monde
pluriel, c’est, au-delà des autres croyances, admettre, comme le fait le Coran,
que des gens puissent ne pas croire en Dieu et nier son existence, ou disposer
d’une religion sans Dieu, comme les bouddhistes chinois, ou encore croire en un
Dieu « non abrahamique » comme les hindouistes » (p 232),
« Les « communautarismes » peuvent apparaître dangereux, car ils
essaient de rendre homogènes des indiviidus qui ne le
sont pas, dont les intérêts peuvent être convergents ou divergents,
momentanément ou durablement » (p 242)