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Roman Yasmina Khadra - "La dernière nuit du Rais"

Date de création: 28-06-2020 17:14
Dernière mise à jour: 28-06-2020 17:14
Lu: 729 fois


VIE POLITIQUE- BIBLIOTHÈQUE D’ALMANACH- ROMAN YASMINA KHADRA- « LA DERNIÈRE NUIT DU RAÏS »

La dernière nuit du Rais. Roman de Yasmina Khadra.Casbah  Editions, Alger 2015 , 207 pages, 850 dinars

Il méprisait Saddam Hussein pris, caché dans un puits. Il s’est fait prendre, lui, , Mouammar Kadhafi, du clan des Ghous, maîtres du Fezzan, terré au fond d’une canalisation agricole, lors de sa fuite. Hussein a fini pendu. Lui s’est fait lapidé par son peuple.

Vie et mort d’un dictateur sanguinaire et mégalomane….qui, enfermé durant de longues années dans  l’exercice d’un pouvoir sans limites, une  dictature,  a formé un peuple qui , élevé dans une atmosphère  de haine,  de vengeance et de sang, lui a rendu la (grosse ) monnaie de sa pièce.

Mais l’auteur ne raconte pas que ça ! Il va plus loin et, à travers le personnage du Guide, du Raïs, à travers sa « résistance » pathétique et sa fuite éperdue , il décortique les ressorts du « Pouvoir » : Au départ, de « bonnes » intentions ; en cours de route de multiples déviations ; à la fin, la dictature mégalo-maniaque avec ses abus et ses crimes . De la démocratie populaire et/ou populiste et presque bon enfant à la dictature sanguinaire, le pas est vite franchi. On ne s’en aperçoit même pas. On ne veut pas « lâcher prise ». On croît tout savoir, tout pouvoir, sans devoir. La rancune, la vengeance… dopées qui plus,   sont des plats qui se mangent tout chauds. L’officier qui l’avait traité de « bâtard » ( car, paraît-il, fils d’un soldat italien en fuite recueilli par la tribu durant la 2è guerre mondiale )  et freiné sa promotion.  Celui qui lui avait refusé la main de sa fille, le laissant seul , comme un c…, avec une boîte de gâteau sur le pas de la porte. Ils   le paieront tous(parents et alliés y compris)  cher, très cher…avec , comme dessert la fille, devenue bonne mère de famille . N’empêche……. Mais, plus dure est la chute. Les exemples dans le monde et surtout dans « notre » monde en développement, ne manquent pas

Le Rais finira donc seul, tout seul, seul au monde : « Abandonné par ses anges gardiens et par les marabouts » qui lui « prédisaient mille victoires pour quelques zéros de plus sur leur chèque »

L’Auteur : Yasmina Khadra, vous connaissez ? Oui, donc, on vous fera l’économie d’une présentation. Et, pour ceux qui ne l’aiment pas, on signalera seulement que la plupart de ses romans sont traduits dans près de cinquante pays, qu’il a obtenu plusieurs prix en Algérie et à l’étranger et que certaines de ses œuvres ( L’Attentat, Ce que le jour doit à la nuit….) ont été portés à l’écran.Qui dit mieux…en Algérie ?Voilà un « compliment  » qui va grandement flatter son ego et qui ne va pas plaire à certains.

Avis : Un livre plus que réussi !Tous les détails, ou presque tous,mais aussi de l’histoire et de la psycho-sociologie,  sur la fin peu glorieuse, d’un dictateur arabo-islamo-« marxiste » -internationaliste-« révolutionnaire » …qui se prenait pour , sinon un prophète, du moins un Guide invincible .Du « syncréti (n)isme politique » comme on en a peu vu. Et , qui a préparé le lit à l’interventionnisme (ceux-là mêmes  qu’il a humilié ou qu’il a cru avoir « acheté »), à l’anarchie, à l’extrêmisme et  au banditisme. A quand des romans sur Sadam Hussein… sur Ben Ali et Bachar El Assad ( ?) ….sur….. ? Une longue liste. Une liste ouverte !

Citations : « Un Guide n’ a pas d’humour. Ses allusions sont des consignes, ses anecdotes des mises en garde » (p 31), « Il n’y a aucune différence entre celui qui se livre et celui qui refuse de se battre.(…).Le premier a le courage de sa lâcheté, le second en est totalement dépourvu » (p 48), «  Le pouvoir étant hallucinogène, on n’est jamais à l’abri des rêveries meurtrières.De la garnison au palais présidentiel, il n’y a qu’un pas, et l’ambition démesurée prime le risque »(p 74), « Dieu n’est avec personne. N’a –t-il pas laissé mourir son propre fils sur la croix «  (p 139), «  Ce qui n’a pas de fin use et ennuie » (p 147), «  Etrange comme les hommes espèrent accéder dans la mort à ce qu’ils n’ont pas acquis pendant leur vie » ( 154), « Le pouvoir est une méprise : on croit savoir et l’on s’aperçoit qu’on a tout faux . Au lieu de revoir sa copie, on s’entête à voir les choses telles qu’on voudrait qu’elles soient. On gère l’inconcevable du mieux que l’on peut et on s’accroche à ses lubies, persuadé que si on lâchait prise, ce serait la descente aux enfers « (p 193)