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Ouvrage Abderrahmane Farès- "La cruelle vérité"

Date de création: 02-06-2020 18:16
Dernière mise à jour: 02-06-2020 18:16
Lu: 786 fois


HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH – OUVRAGE ABDERRAHMANE FARES- « LA CRUELLE VERITE….. »

La cruelle vérité. Mémoires politiques 1945-1965. Ouvrage de Abderrahmane Farès. Casbah Editions, Alger 2006 (Librairie Plon, Paris, 1982) , 251 pages, 750 dinars

Un livre « oublié » , des mémoires enfouies., volontairement ou involontairement occultées.  C’est un peu l’histoire d’un homme à l’ itinéraire exemplaire, humain et militant , un homme inoubliable  et qu’il faut revisiter.  Pour bien comprendre des périodes extrêmement importantes de l’histoire du pays.

Tout d’abord, c’est l’histoire d’un jeune homme qui a , malgré toutes les difficultés inhérentes à un système de quasi-apartheid, réussi, par ses connaissances et son savoir-faire, à se hisser à un haut niveau de culture (être notaire n’était pas donné à tout le monde) et à des postes de responsabilité politique élevés ...tout en gardant indemne sa probité et surtout , son désir de participer , à sa manière, à la promotion, puis à l’émancipation et enfin à la libération de son pays et de son peuple.

Ensuite , c’est l’histoire d’un homme accompli, équilibré,  qui a su « manager » la (courte) transition délicate et difficile (avec les menaces des ultras pieds noirs et de l’Oas, avec les luttes intestines au sein du Fln-Aln, avec (déjà) les menaces marocaines aux frontières sud-ouest , avec le manque de moyens financiers et humains, la plupart des Européens  ayant « fui »...) , avec l’aide de bonnes volontés (Gpra, Aln, Européens libéraux...).

Enfin , c’est l’histoire de la grande désillusion, non  dans les capacités du peuple et du pays, mais surtout dans les manœuvres politiciennes  et l’absence de projet économique et politique en phase avec les espoirs démocratiques (dont il avait tracé les grandes lignes le 27 septembre 1962, à la première réunion de l’Assemblée nationale  constituante qui venait de désigner (par acclamations) Ben Bella Chef du gouvernement et juste avant la transmision des pouvoirs de l’Exécutif provisoire et la proclamation de la République : pp 144-145)

Fin de l’histoire : le retrait  pur et simple de la vie politique....et l’écriture des « mémoires politiques ». A –t-il été lu ? Certainement. A –t-il été compris ? Pour l’instant , on ne le sait pas.

 

L’Auteur : Natif  d’Akbou/Bejaia (janvier 1911) , l’auteur est orphelin à l’âge de six ans. Ecole primaire, cours complémentaire, études de droit (à Alger).  Licencié au Mca (en 1932) car bon footballeur  ayant même aidé à y incorporer deux Européens (la loi franco-coloniale y obligeait). Huissier à Sétif, greffier notaire (au « titre II ») à Sebdou,  il est le premier Algérien musulman non naturalisé (le qualificatif de l’époque, avec celui d’ « indigène ») à réussir le concours de notaire...en Algérie. Premier poste ...à Collo (son fils Nabile y est né...et il y  avait découvert une rivière à truites ) , « l’étude la plus déshéritée d’Algérie » ...toujours avec beaucoup d’ Européens accueillants mais encore bien  plus de racistes. Ensuite Berrouaghia (avec des rencontres avec Ferhat Abbas et Cheikh Bachir El Ibrahimi) ..et à Boghari (Ksar El Boukhari) ......Puis, enfin , l’ envol politique.....avec des réussites inattendues aux élections les plus dures (il fut Président du Conseil général d’Alger et, aussi, député (en 1946) puis président de l’ « Assemblée algérienne  ») ....la lutte politique en Algérie même (et  des rencontres avec Yacef Saâdi et Ali la Pointe,  Abane Ramdane, Larbi M’hidi,..) ...la lutte politique en France et la clandestinité....la rencontre avec de Gaulle....  de multiples contacts avec les représentants de la résistance algérienne en Europe (Bouadaoud, Haroun, Bouaziz, Adlani...) .....l’arrestation et l’emprisonnement (novembre 1961- mars 1962) ....enfin la présidence de l’Exécutif provisoire......Une autre arrestation (7 juillet 64) , cette fois-ci sur ordre de Ben Bella et emprisonné durant toute une année (libération le 7 juin ....1965)  .....Retrait de la vie politique...et décès le 13 mai 1991

Extraits :  « Les textes antérieurs (à la loi électorale en discussion) ont toujours tendu à distinguer , d’une part les citoyens et, d’autre part, les sujets.....A ceux-là (les Français d’origine , mais encore les Européens de toutes origines auquels la nationalité française était automatiquement accordée) étaient reconnus tous les droits. Quant aux sujets , qui constituaient la masse des populations autochtones, ils étaient pratiquement privés de tous les droits politiques, économiques et sociaux ...Ce système (...) était celui du colonialisme » (Extrait de la déclaration à la tribune de l’Assemblée nationale constituante française, le 5 avril 1946,  p 34), « A 12 heures (le 3 juillet 1962, à Rocher-noir ) eut lieu la simple, mais émouvante cérémonie au cours de laquelle fut hissé le drapeau algérien confectionné dans la nuit par ma femme. Le 3 juillet est la date historique de l’indépendance, et non le 5juillet comme il fut décidé par la suite «  (p134)

Avis : Un livre simplement et clairement écrit ....à (re-) lire absolument.

Citations : « Qu’est-ce que la souveraineté (celle du collège électoral colonial) ? C’est le pouvoir , dans une société politique, de commander et de contraindre » (p 39) , « L’Algérie était gouvernée non par Paris, mais par le lobby des intérêts européens d’Algérie, extrêmement puissant et aux moyens financiers immenses, dont les membres étaient presque tous inscrits au Parti radical....Presque tous les ministres de l’Intérieur , tuteurs de l’Algérie, étaient radicaux »   (p 43) , « Le fleuve de l’histoire suit le chemin qu’il veut et l’espoir étant une herbe précieuse qu’on n’arrache pas au cœur des hommes, la route qui mènera à la solution politique définitive dans mon pays sera l’indépendance » ( Extrait d’une conversation avec Edgar Faure, alors président du conseil, 1955, p 58), « On ne cosntruit pas un pays avec des mots, des slogans, des bobards ou des critiques stériles.On ne bâtit pas le socialisme par le verbe.   On ne bâtit pas non plus sa maison en commençant par la toiture, mais par les fondations. Or, la construction d’un pays  et de l’avenir d’un peuple ne reposent que sur son économie. L’indépendance économique est la seule garantie véritable de l’indépendance politique » (p 144),  «  La politique mène à tout, surtout lorsqu’elle a le visage d’une dictature » (p 155)