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Essai Nordine Grim - "L'an I du Hirak...."

Date de création: 31-05-2020 20:16
Dernière mise à jour: 31-05-2020 20:16
Lu: 739 fois


 

VIE POLITIQUE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI NORDINE GRIM- « L’AN I DU HIRAK…. »

L’An I du Hirak.Autopsie d’une révolution inédite. Essai de Nordine Grim. Casbah Editions, Alger 2020, 800 dinars, 137 pages.

Pour la première fois, le Hirak est présenté sous toutes ses coutures : politique, économique, culturelle, sociétale……..Bref, l’analyse, de manière concise, peut-être incomplète, mais tout de même précise (car directe et sans détours) du phénomène , du tsunami « hirak », brutalement survenu un 22 février 2019…..alors qu’on ne l’espérait pas ou plus.

Pour emprunter au préfacier, l’auteur écrit certes mais il crie aussi.  En onze chapitres, on voit avec lui les colères, les frustrations et  les incompréhensions des manifestants du Vendredi et du Mardi.

Ses sept premiers chapitres sont une narration de ce qui s’est passé suite à  l’entêtement d’un « chef d’Etat grabataire » (appuyé par la haute hiérarchie militaire et quelques oligarques) à vouloir rempiler pour encore cinq années (un cinquième mandat !)…….alors qu’une « révolution »  avait commencé à s’installer pacifiquement , tout particulièrement chez les jeunes, dans les stades et à travers la chanson.

Face au « Système », une foule de plus en plus grosse…..mais sans leaders. Voilà qui rend le dialogue difficile sinon quasi-impossible….mais qui facilite l’émergence, au sein même du système…ou en marge, de forces nouvelles qui, Bouteflika et ses « affairistes » out !,  vont exercer le pouvoir….à leur manière et selon leur façon de voir l’avenir du pays. Pour l’auteur, comme d’ailleurs pour beaucoup d’autres analystes, c’est , bien sûr, la haute hiérarchie de l’Armée. Comme toujours ! Avant-hier, la Sm, hier le Drs, aujourd’hui, Ahmed Gaid Salah (avant son décès) , le chef d’état-major, vice-ministre de la Défense. A mon avis, une idée fixe qui , avec l’absence de leaders et la présence têtue de partis politiques « infertiles », a nuit à toutes les approches de solutions. La rue et les réseaux sociaux, maîtres du terrain….un terrain pris en étau entre la détermination du peuple (appelant à la mise en application  des articles 7 et 8 de la Constitution ) et la volonté d’officiels ne souhaitant pas laisser le pays sans gouvernance et, peut-être dériver dangereusement. Donc, « un Président à tout prix »!

Entre-temps, la chasse   aux affairistes et aux oligarques a commencé. Les arrestations se multiplient n’épargnant presque personne parmi les plus « introduits » au sein du clan « Boutef’ et Said », ce qui ne manque pas de perturber encore plus la vie économique du pays (déjà en mauvais état), conjuguée durant plus de vingt ans par les « corrupteurs , les corrompus et les rentiers ».

Deux remarques : A propos du journalisme –citoyen ! Sans vouloir polémiquer, il me semble qu’il y a maldonne quelque part. Les animateurs des réseaux sociaux ne sont pas des journalistes (à l’exception de quelques uns qui activent dans des entreprises répondant à certaines règles organisationnelles….comme les travailleurs de Radio M, déjà journalistes à Maghreb Emergent….ou comme Khaled Drareni….ou Mahrez Rabia)….mais seulement des citoyens qui sont et /ou veulent être des « influenceurs ». On devrait parler beaucoup plus de citoyens –médias (« informateurs »… « lanceurs d’alertes »…)  que de journalistes citoyens. Ces derniers n’existent pas car on est journaliste –respectant les règles élémentaires de l’éthique et de la déontologie professionnelle ainsi que maîtrisant les techniques rédactionnelles de base - ou pas !

A propos des décès durant le hirak (p126 ). A ma connaissance trois seulement, trois de trop …mais dont les causes sont bel et bien connues  .

 

 

 

 

L’Auteur : Né à Azzefoun. Ancien cadre supérieur au sein de l’administration centrale et d’institutions ainsi que de sociétés nationales, spécialiste des questions de management et de réformes  des entreprises et des institutions publiques, auteur de plusieurs ouvrages sur l’économie algérienne (dont « L’économie algérienne otage de la politique »……. « Entrepreneurs, Pouvoir et Société en Algérie »). Plusieurs contributions dans la presse (dont El Watan). Plume brillante !

 

Sommaire :  L’outrage du cinquième mandat/ L’Algérie retient son souffle/ Bouteflika contraint de démissionner/ L’Algérie en situation de vacuité constitutionnelle/L’après Bouteflika commence avec l’arrestation des oligarques/ Le Hirak n’a pas perturbé l’activité économique/Gaid Salah s’impose comme autorité suprême/ Le journalisme citoyen au secours du hirak/ Un président à tout prix !/Les acquis de la révolution du 22 février/Un combat long et fastidieux

 

Extraits «  Les images montrant de hauts responsables de l’Etat et des partis politiques croupions en train d’offrir un portrait encadré de Bouteflika à un autre cadre de  la même personne , de verser des larmes et déclamer des poèmes à la gloire d’un portrait de chef d’Etat absent, ont circulé à travers le monde donnant à ceux qui nous méprisaient déjà, la certitude désormais établie d’un peuple soumis » (p 20-21), « Le Hirak n’avait commencé que depuis trois mois, alors que l’économie algérienne présentait déjà des signes d ’essoufflement dont les origines remontent à beaucoup plus longtemps » (p 75), « S’il y avait effectivement beaucoup de corrompus parmi les hommes d’affaires, il faut reconnaître que les corrupteurs tapis dans les plus hautes sphères du pouvoir étaient les plus nocifs » (p 78), « Sans les réseaux sociaux, le soulèvement populaire du 22 février 2019 ne se serait sans doute jamais produit. Sans eux, il n’aurait probablement pas pris autant d’ampleur et ne se serait certainement pas inscrit, comme c’est le cas, dans la durée » (p 105)

Avis : Des réflexions « à chaud » d’un homme connaissant bien le terrain bien plus qu’une étude rébarbative. Sorte d’enquête journalistique bien documentée….mais assez engagée (cela ne veut pas dire non « objective ») . Seize pages de très belles photos couleurs (23) du mouvement populaire qui en disent long( Z.Zebar, A. Chayani) !Ajoutez-y celle, superbe,  illustrant la couverture (Z.Zebar)

 

Citations : « La présidence à vie est effectivement une dérive politique comme seuls les régimes dictatoriaux assis sur de confortables rentes et hyper protégés par les forces de répression, savent produire et imposer à leurs peuples » (p 31), « La corruption ne  se conçoit en effet qu’en présence d’un corrupteur et d’un corrompu, tous deux devant objectivement tomber sous le régime du code pénal. Mais force est de constater que les corrupteurs sont trop souvent épargnés par ces campagnes anti-corruption périodiques » (p 68)