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Roman Salah Chekirou- "Arnaques à l'Algérienne"

Date de création: 26-03-2019 15:51
Dernière mise à jour: 26-03-2019 15:51
Lu: 1034 fois


FINANCES- BIBLIOTHÈQUE D’ALMANACH- ROMAN SALAH CHEKIROU- « ARNAQUES A L’ALGÉRIENNE »

Arnaques à l’Algérienne . Roman de Salah Chekirou. Editions Dar El Kobia, Alger 2018, 1 000 dinars, 274 pages

 

La   réalité : Au départ, l’intention était, peut-être , bonne .....en temps d’instabilité sécuritaire tous les « coups » étant permis.

Fin 1995, le pouvoir en place était assez préoccupé par l’argent de l’économie informelle dont profitait largement la nébuleuse islamo -terroriste, comme source de financement , de carburant....et de profit pour les plus malins. Il fallait donc, nous dit l’auteur, grâce aux anciens du Malg, de mettre sur place une banque de droit privé vers laquelle seront canalisés les capitaux hors la loi.....l’argent des trabendistes,  et qui sera une banque commerciale de droit primaire agréée pour les transferts de fonds.....avec ,bien entendu, l’approbation préalable de la Banque d’Algérie. Ainsi, soit-il !

Les gens de pouvoir ( et le « pouvoir profond » ?) croyant , comme toujours, être plus malins que les autres pensèrent  pour la diriger, à un jeune .....issu de la famille révolutionnaire, petit pharmacien de son état ......trésorier, disait-on, de la section communale du Fis de Cheraga..... « ce qui pourrait attirer aussi la clientèle des activistes intégristes et leurs soutiens » . Ce sera donc Riad Khalifa (Khortall dans le roman) .

Tout allait pour le mieux dans le meilleur du monde de la finance et de la politique nationales.......Mais, quelques années et un président plus tard (les années 2000)...un inspecteur-douanier curieux découvre, par hasard ( ?!?!) , au port d’Alger, un conteneur abandonné éventré contenant des centaines de bouteilles de whisky de différentes  marques ...ne contenant que de l’eau de mer. Partie  d’un juteux trafic puisque l’opération concernait soixante conteneurs et elle venait de coûter à l’Etat 500 millions de dollars  déjà partis à l’étranger.

Une enquête démarre...... avec des arrestations multiples (à partir d’octobre 2003)  mais surtout avec la découverte d’un « empire des sables » construit par le jeune pharmacien et ce en quelques années à peine.....et avec , toujours, le soutien et les encouragements , parfois publics, des tenants du (nouveau) pouvoir et –selon le romancier- des « gens de l’Ombre ».Un « trou » financier  de trois milliards de dollars, des entreprises tous azimuts (dont deux  chaînes de télé à l’étranger , une compagnie d’aviation, une banque......), des milliers d’employés subitement mis au chômage en raison des faillites en cascade , des milliers de gros et petits épargnants ainsi que des   caisses sociales mis brutalement « sur la paille » , des dizaines et des dizaines de hauts fonctionnaires, ministres , hommes politiques , magistrats, militaires, cadres d’entreprise, journalistes  et syndicalistes, vedettes et stars étrangères......tous corrompus par des enveloppes généreuses emplies d’euros, ayant profité –eux , leurs enfants ou les épouses et/ou maîtresses -  des « largesses » du « tycoon » et dont certains avaient (fait) versé les deniers publics dans les caisses de la banque  ...En tout 104 accusés....... un ministre des Finances qui avoue à la barre « qu’il n’avait pas été suffisamment intelligent pour détecter la gravité de la situation » ...et un Sg (de l’Ugta) qui déclare au tribunal « qu’il assume ses actes » ( président du Ca de la Cnas, il avait ordonné au DG de transférer tout l’argent de l’institution dans les caisses de la banque Khalifa) .Et un « tycoon » en fuite puis difficilement ( ?!?!) ramené au pays de sa rapine. Un long procès....qui n’est  pas allé jusqu’au bout de la vérité....et des condamnations, comme toujours, des seconds couteaux. Et, en cours de route (selon le romancier) des enquêteurs « curieux » sont éliminés......Ceci pour la réalité.

Dans le roman, la fin est tout autre......le coupable disparaissant en mer alors qu’il revenait à Alger ... « pour dénoncer les vrais coupables ».... Où est la réalité, où est la fiction....A vous de voir...l’auteur affirmant en guise d’épilogue, ironiquement que « les faits relatés dans cette histoire auraient pu être réels »......et, en Algérie, « il faut se rendre à l’évidence que la réalité dépasse souvent la fiction littéraire »

 

 

L’Auteur :  Longtemps journaliste en Algérie, près de 35 ans , résidant actuellement au Canada , écrivain, auteur , déjà, de plusieurs ouvrages  dont « Le grain de sable  » traitant de l’assassinat du président Mohamed Boudiaf et  «  L’otage » dernièrement présenté in Mediatic). Ancien directeur de l’édition au sein de l’Anep, poste duquel il a été écarté après la publication, à compte d’auteur, et la diffusion (en 2006) de ce roman présenté ce jour qui avait alors un autre titre, « Le tycoon et l‘empire du sable »....un livre rapidement « épuisé » ,car « ramassé » des librairies et des dépôts de distribution puis dit-on, détruit par on ne sait quel « service ».   L’auteur, lui , sera réduit au chômage et....obligé de s’exiler.

Extraits : « L’affaire Khalifa banalisa la rapine et la malversation, puisque l’argent sale et la corruption, la prébende sont érigés en système de gouvernance » (pp 9-10), « Lorsqu’on se paye les services du frère du Président comme conseiller juridique, que le président de la République en personne vous gratifie de mots gentils et d’apparitions publiques à vos côtés, cela tétanise et neutralise toute action des services de contrôle.. » (p 72), « Pour le commun des mortels, Riad Khortall (ndlr : Khalifa) n’était qu’un épouvantail derrière lequel se cachaient des personnes qui évoluaient dans le cercle des décideurs » ( p 81), « Ce qui se disait sur Khortall et ses agissements n’étaient que  la partie visible de l’iceberg. Le pays traverse une période de grande bouffe que les années noirs du terrorisme avaient favorisée davantage... » (p 82), « Le secteur privé n’est pas issu des réseaux du marché pour qu’il accepte les règles du marché. Il est issu des réseaux de l’»administration et de la bureaucratie... » (p 216)

Avis : Un roman basé sur une histoire vraie.....et qui, peut-être (l’histoire et ses retombées),a eu des conséquences socio-politiques à long terme désastreuses car elles étaient annonciatrices d’une complicité pouvoir-affairistes(avec le règne de la « chkara »)  catastrophique pour l’économie du pays (à travers la corruption, entre autres )  et le moral des populations, surtout celui des jeunes.

Citations : « La pays traverse une période de grande bouffe que les années noires du terrorisme avaient favorisée davantage »(p 82), « Les gouvernants du pays ont une trouille bleue des jeunes. Face à leur incapacité de les encadrer et l’inexistence de partis politiques, ils maintiennent le pays dans une espèce de joug où même l’approbation est réservée aux seuls courtisans du pouvoir effectif. N’ont-ils pas tenté de  créer une caste de flagorneurs qu’ils nomment les nobles du président ? » (p 217)