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Enquête Tarik Khider- "L'Affaire Khider...."

Date de création: 09-03-2019 18:16
Dernière mise à jour: 09-03-2019 18:16
Lu: 1050 fois


L’Affaire Khider. Histoire d’un crime d’Etat impuni. Enquête historique de Tarik Khider. Koukou Editions, Alger 2017. 242 pages, 800 dinars

Mohamed Khider  est, c’est bien connu, un politique d’expérience, sévère et strict.....Houari Boumediène , c’est bien connu , n’a pas la mémoire courte. Durant la période du Caire......nous dit l’auteur, Boumédiène a , en  présence de H. Aït Ahmed (Khider et Aït Ahmed sont mariés à des sœurs , donc parents assez proches) , a été giflé par le premier. Pourquoi ? Boumediène, alors étudiant à l’université d’Al Azhar exigeait de Khider une indemnité financière pour évacuer un logement qu’il occupait abusivement.....Une humiliation qui sera ruminée bien longtemps, « avant d’ordonner la terrible vengeance ». Peut-être ! Mais, il y a bien d’autres éléments, la vie politique des « révolutionnaires » étant toujours bien complexe et les relations inter-personnelles souvent compliquées allant  jusqu’à l’oubli de la cause commune et à l’élimination physique : Abane Ramdane , Krim Belkacem, Mohamed Khemisti, Châabani, A. Medeghri, Mecili Ali....et bien d’autres, dont beaucoup d’ illustres inconnus ...la raison dite d’Etat se dressant , alors , toujours contre la justice. Et,  bien des coupables –exécutants et commanditaires -  jamais arrêtés et punis .

Mais qui était donc Mohamed Khider ? Pour bien des observateurs, le grand militant de la guerre de libération nationale et futur Sg du Fln était  sincère et dévoué à la cause de son pays . Habile manoeuvrier, il avait l’expérience de ceux qui ont beaucoup souffert. Doté d’une ardente curiosité intellectuelle, il avait mis à profit ses nombreuses années de captivité pour s’instruire dans tous les domaines. « En toute honnêteté , il donnera sa confiance et son appui à Ben Bella ». L’erreur fatale, d’autant que Mohamed Khider « détenait » un « trésor de guerre »  (7 milliards  de cts venant de La Fédération de France et remis en 1962 à M. Khider, alors responsable des finances au sein du Bp du Fln)   qu’il avait mis à l’abri –en Suisse-  , en attendant – lui, le partisan d’un parti de masse face au Président du Conseil Ben Bella qui voulait un parti d’avant-garde - qu’un régime politique légitime et démocratique  s’instaure juste après l’Indépendance , et ce dans la légalité. Un « trésor » que beaucoup, et Ben Bella en tête , voulaient récupérer....à tout prix. La suite est (presque ) connue. Le 17 avril 1963 , Khider , démissionne de ses fonctions de Sg/Fln et part à l’étranger, voulant se démarquer de la  « dictature » qui s’annonçait (avec un Ben Bella qui , le pouvoir aidant , est  « consacré » par le fameux Congrès d’avril 1964)  dévoilait peu à peu sa vraie nature, et d’un ministre de la Défense , Houari Boumediène, considéré comme un « danger potentiel pour le pays ».

L’exil ! La Suisse, la France, la Grande-Bretagne......et enfin l’Espagne...Le coup d’Etat du 19 juin 1965 ne changera rien à la situation. Au contraire. Avec une opposition se trouvant à l’étranger qui s’organise de mieux en mieux (ex : le 29 décembre 1966 , à la frontière franco-suisse, un pacte est signé entre M. Khider, Mohamed Lebdjaoui de l’Ocra, H. Aït Ahmed du Ffs et Mohamed Boudiaf du Cndr ) et qui se verra (ainsi, d’ailleurs que d’autres personnalités opposées à H. Boumediène) aidée financièrement par M. Khider. . Quelques jours après, le soir du 3 janvier 1967, M. Khider est assassiné à Madrid., sous les yeux horrifiés de son épouse.....L’enquête , menée rapidement par la police espagnole établit l’implication de membres de l’ambassade d’Algérie à Madrid et d’un certain Dakhmouche Youssef....... recherché mais jamais arrêté. Mohamed Khider sera enterré à Casablanca. Il y est encore.....

Après la mort de H. Boumediène,  et grâce à la politique plus ouverte et plus conciliante de Chadli Bendjedid, l’affaire des fonds trouvera enfin son dénouement.......Qu’en fera –t-on ? Là , c’est une toute autre histoire.

Aujourd’hui, heureusement, et grâce à Ali Kafi, le nom de Mohamed Khider est donné à l’aéroport à l’Université de Biskra......et , selon les « mémoires d’un agent secret » européen (Grasset, 1976),  Dakhmouche , après avoir échappé à toutes les recherches,  est mort, «la tête écrasée par un char »....ayant « trébuché sur une pierre (sic !) , lors de manœuvres militaires » auxquelles il était invité.

 

L’ Auteur : C’est le fils de Mohamed Khider, né en 1954 au Caire. Agé de 13 ans au moment du drame, il consacre sa vie à la recherche de la vérité sur la mort de son père. Son livre est dédié à sa mère , à sa famille mais, en premier lieu, à son père « assassiné par ses « frères » .......et aux compatriotes « qui ont soif de vérité »

Extrait : « Malgré ces dissensions internes, la Révolution marque des points sur la scène internationale. Enlisée dans le bourbier algérien, la France perd le peu de prestige que le Général De Gaulle lui a restauré  après la débâcle du régime de Vichy en 1940. La torture pratiquée à grande échelle par l’armée française soulève l’indignation de la communauté internationale. Un front Nord africain consitué à l’Onu mettra la France dans le banc des accusés » (p 58)

 Avis : Très convaincant ! Fourmille d’informations et chargé d’émotion.....car, et c’est bien vrai , malgré tout, « les héros ne meurent jamais ».Voir , en annexes, des textes de haute teneur politique pour l’époque, le discours de M. Khider au Parlement français lors des  séances du 18 mars 1947 (débat sur l’Indochine) , du 26 juillet 1949 (débat sur l’intégration de l’Algérie dans le Pacte Atlantique) , du 13 décembre 1949 (débat sur les évènements de Sidi Ali Bounab)

 Citations : « Il avait un sens de l’humour très vif......Critiquant ce qu’étaient advenus les comités algériens d’autogestion....il avait dit « A vrai dire, ce sont des comités d’autodigestion » (p 131) , « Que peut-on espérer , en effet, d’un régime décidé à effacer toute trace de Khider , de sa personnalité, de son combat ?Non satisfait de lui avoir  ôté la vie, il veut  salir son âme. Continuer à le faire passer pour un voleur  reste , pour Boumediène, la seule voie à suivre pour achever sa victime »  (p 163), « La guerre de libération a été , pour les uns une guerre totale et sincère contre l’occupant pour l’indépendance ; pour d’autres, une opportunité pour prendre le pouvoir afin d’asservir et de s’enrichir. Pour cela , ils n’ont pas hésité à éliminer ceux qui n’étaient pas d’accord avec eux » (p 198)