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Etude Christain Pheline- "Les insurgés de l'An I.Marguerite...."

Date de création: 08-02-2019 18:01
Dernière mise à jour: 08-02-2019 18:01
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HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ETUDE CHRISTAIN PHELINE- « LES INSURGES DE L’AN 1.MARGUERITE.... »

Les insurgés de l’an 1. Marguerite (Aïn Torki), 26 avril 1901. Etude de Christain Phéline. Casbah Editions, Alger, 2012.870 dinars, 270 pages

 

L’affaire de Margueritte (aujourd’hui Ain-Torki) sur les pentes du Zaccar  ........une révolte populaire (100 à 200 personnes conduits par un certain Yacoub, appartenant à une famille maraboutique   ) certes circonscrite à un petit village colonial, mais qui trouve une grande valeur annonciatrice......préfigurant tout ce qui allait se passer jusqu’à la révolte suprême , celle de 54.

Elle avait commencé à mettre en lumière, aux yeux des plus conscients des observateurs (si peu nombreux et encore bourrés de préjugés) les pratiques par lesquelles la puissance coloniale , au cours des cinq décennies suivantes , fermera obstinément la voie à toute issue pacifique.

Elle a préfiguré les méthodes ( dépossession, exploitation, racisme ou mépris...)  qui, avec des conséquences irréversibles, allaient  se  développer  à grande échelle à partir des événements de Guelma et de Sétif en 1945...... accroître l’ « anticolonialisme » et surtout, développer la conscience nationale

26 avril 1901. Un petit centre de colonisation,  (du côté de Hammam Righa....avec sa placette, son église, ses « petits blancs », son garde-champêtre, son institutrice laïque, ses petis colons, son caïd,  ses vignobles.....et un gros propriétaire terrien détenant à lui seul quelque 1 299 hectares, la plupart acquis par licitation et spoliation ........et, tout autour , des tribus réduites à la ruine , à la misère , à l’errance et à la  mendicité.

Un soulèvement populaire (des individus « à la recherche d’une mort plus digne qui n’était leur survie ») ,...... cinq européens et un tirailleur « indigène » morts (et non 30 ou 50 comme il est rapporté au public) . La répression s’abat assez vite sur la région et ses habitants musulmans ; ordre est donné « d’amener tous les indigènes de 18 à 60 ans rencontrés ». Il y en aura 400. 188 inculpés , 137 incarcérés et renvoyés devant les assises ....et des dizaines et des dizaines de victimes (200  selon un article du journal  « Turco »)  des exactions , soit des militaires (tirailleurs, chasseurs et zouaves) organisant des « battues » et des « chasses à l’homme » , tuant, brûlant ,pillant et violant  , soit de colons armés se vengeant à qui mieux mieux.

Un procès en France. Certes, quelques défenseurs. Mais , pas assez pour plaider la révolte politique et un traitement de « prisonniers politiques », les accusés ayant été pris « les armes à la main ».  Par contre,   beaucoup pour accuser le fanatisme religieux . Certes, aucune condamnation à mort mais des travaux forcés à perpet’ (à Cayenne, en  Guyanne, connue pour être « la guillotine sèche »)  pour    9  dont quatre y trouveront rapidement la mort....y compris Yacoub qui avait été « affecté » aux îles du Salut, un lieu suscitant « l’effroi de tous les bagnards »  , de lourdes peines allant de 5 à 15 ans.

Et des interdictions de séjour  . Peu d’acquittements (81) . Encore faudrait-il préciser qu’en cours de route (en plus des séquestres des biens) , étant donné les conditions inhumaines de transport (maritime) , de détention,  de non-prise en charge médicale et psychologique, beaucoup (19 entre avril 1901 et l’ouverture des assises) sont morts de maladie ou de déprime....et même les acquittés, ne connaissant pas le français, dénués de tout, furent abandonnés , à Montpellier, à leur sort  en terre inconnue peuplée  d’ « infidèles » .  Les interdits de séjour,  « rapatriés », seront accueillis par les agents de l’Administration qui les enverront , menottes aux mains, dans le Sud de L’Algérie , au pénitencier. Quant aux « acquittés », ils ne leur sera pas permis de revenir auprès de leurs familles et seront « interdits »  de pénétrer dans le village.  

L’Auteur : Membre de la Cour des comptes (France) , ancien coopérant au ministère algérien de l’Agriculture  et de la Réforme agraire (fin des années 60) , arrière petit-fils du magistrat colonial qui avait été chargé des premiers constats de l’ « Affaire Margueritte »

Extraits : « Sous la pression de l’opinion coloniale, s’était cependant imposée une inculpation massive, en disproportion manifeste avec la réalité des responsabilités individuelles » (p 80), « Trois décennies plus tard, les tenants de l’ « école psychiatrique  d’Alger » continueront ....à invoquer le soulèvement de 1901 à l’appui de leur théorie de « l’impulsivité criminelle de l’indigène algérien », théorie dont Frantz Fanon , le premier, dénoncera le caractère grossièrement raciste » (p 80)  , « Je ne suis ni voleur, ni assassin, proclame Yacoub (lors du procès). J’avais du bien, on me l’a pris. Je regrette ce qui s’est passé (la mort d’hommes) ......mais je ne crains pas d’en assumer hautement la responsabilité » (p 158)

Avis : Ni idéologue, ni militant, modeste et rigoureux , s’interdisant tout commentaire ou jugement de valeur. Un maximum d’éléments d’information....sur un événement que beaucoup d’Algériens ont mis aux « oubliettes » de leur Histoire.Et, pourtant, une page (parmi les toutes premières) de la lutte pour la libération.

Critique technique : Manque de contrôle de qualité car mélange de « cahiers » et répétition de chapitres : Bagne, Mémoires, Bagne, Mémoires...(à partir de la page 205)

Citations : « Le politique en Algérie-et cela explique beaucoup de choses- dépend du colon, l’administration dépend du politique et, au fond, c’est toujours l’Arabe qui, par cette succession de responsabilité, paye les pots cassés » (extrait d’une déposition de témoin.....un colon européen, p 151)