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Gestion d'un journal - Abrous Outoudert

Date de création: 04-05-2013 19:46
Dernière mise à jour: 04-05-2013 19:49
Lu: 1523 fois


COMMUNICATION – ETUDES ET ANALYSES – GESTION D’UN JOURNAL –  ABROUS OUTOUDERT 

LES CONTRAINTES ECONOMIQUES DES ENTREPRISES DE PRESSE

Conférence de Abrous Outoudert, directeur de publication de Liberté en date du jeudi 2 mai 2013, Tipasa,  organisée par l’Association des journalistes de Tipasa en Rencontre sur 50 ans de médias algériens en partenariat avec l’ENSJSI. Autres conférenciers : Omar Belhouchet, Directeur de publication d’El Watan, Pr Belkacem Mostefaoui, Dr Laid Zeghlami, Pr B. Ahcene-Djaballah)

 Généralement quand on aborde une discussion sur la presse, son existence et son devenir, le débat s’oriente sur la déontologie et l’éthique. Rarement sinon jamais sur les contraintes que vit au jour le jour cette profession.

Rares sont ceux qui voit en un journal, une entreprise qui obéit aux mêmes règles qu’une entreprise qui produit des boulons ou n’importe quel produit ?

 Bref retour historique

 Après la constitution de 1989 qui a consacré entre autres ouvertures, le pluralisme médiatique, une véritable floraison de titres a vu le jour. On en a dénombré à l’époque plus de 424 titres, toutes périodicités confondues. C’était l’époque de l’aventure intellectuelle où le message primait sur la gestion et où le directeur de la publication consacrait la majeure partie de ses journées avec la rédaction et son rôle de gérant relégué à un rôle secondaire.

Les maisons de la presse mises à la disposition des titres prenaient en charge les frais induits pour les loyers et autres charges comme l’eau et l’électricité. Les autres services fiscaux ont laissé pendant un temps les titres évoluer selon la capacité des uns et des autres à conquérir des niches de marchés. Les imprimeurs étaient peu regardant sur les échéanciers des frais d’impression. Il est vrai que la naissance de la plupart de ces titres coïncidait avec une situation au niveau national, critique. Celle de la décennie noire .Aux menaces quasi quotidiennes des groupes islamistes armés, les pouvoirs publics ont préféré laissé les journaux en paix d’autant que les grands titres de cette période prenaient, fait et cause pour la sauvegarde de la république, au péril de leur existence et de la vie de leurs collectifs.

Cette accalmie n’a été que de courte durée.

 Quand l’information prime sur le silence

En pleine décennie noire, le rôle du journaliste reste ce saint  devoir d’informer. A la publication d’une information sécuritaire, le pouvoir en place réagit par des suspensions abusives, à même de mettre en péril l’existence du titre. Beaucoup n’ont du leur survie aujourd’hui que grâce à la solidarité qui y prévalait, à l’époque entre les titres. Un journal suspendu et c’est une grève générale qui y est déclenchée. Personne n’était concurrent de l’autre mais tous étaient solidaires du confrère. Combien d’informations sécuritaires avons-nous donné d’un commun accord pour mettre en difficulté les censeurs ?

Aux alibis de non paiement d’une facture d’impression, la corporation s’est montrée solidaire pour soutenir le confrère en difficulté.

Mais face à cette solidarité, le pouvoir a sorti les armes de la persuasion. D’abord la publicité, arme de premier ordre du pouvoir qui choisissait les supports en fonction de leur soutien et ensuite l’imprimerie, alors domaine du monopole de l’état. Un défaut ou un retard de paiement, c’est le refus d’accepter le journal, pourtant fait.

 ANNEE 2000, ANNEE DE LA PRISE DE CONSCIENCE

En 1999, année de l’élection du président Bouteflika, les relations ont été d’abord bonnes puis en dents de scies. Bonnes, par les premières annonces pour réformer l’état, la justice, l’école, ouvrir de grands chantiers. J’avoue que j’ai commis des éditoriaux pour saluer ces grands chantiers avant d’être déchanté.

Et c’est à ce moment que certains éditeurs ont compris que le pouvoir ne ferait plus de cadeaux. Pour survivre, il fallait changer sa casquette de DP en celle de gérant.

Se mettre en tête, que nous avons à gérer une entreprise et non plus un titre.

Effectivement, à chaque information jugée inopportune ou diffamatoire, le journal reçoit les agents du fisc, de la sécurité sociale et d’autres services.

D’où l’urgence à mettre en place une administration forte.

D’où aussi cette question : Comment continuer à exister ?

Le prix du journal à l’exemplaire.

Depuis 1990 jusqu’aux années 2000, la pagination était limitée à 24 pages du fait que les imprimeries d’état ne roulaient que sur trois groupes et chaque groupe tirait 8 pages d’où la pagination à 24 pages. Il n’y avait pas encore l’introduction de la couleur et le prix à la vente a été décidé administrativement.6 Da.

La structure de ce prix était décomposée comme suit :

         2 da : Frais d’impression

          2da : Circuit de distribution qui comprend le sous traitant et le kiosquier

          2 da : Part revenant à l’éditeur

Prix de vente publique : 6 Da

 A la demande des imprimeurs qui n’arrivaient plus à supporter le cout des frais d’impression, après la tendance haussière du prix de la tonne du papier journal qui s’est retrouvée négociée jusqu’à 800 dollars la tonne, une série de réunions avaient lieu sous l’égide de la SGP service dont le président était le défunt Benmahmoud et le ministère du commerce sous Harchaoui,en 1996.Après des réunions interminables, le prix de vente d’un exemplaire a été décidé à 10 Da. Prix symbolique d’une pièce de monnaie.

Mais la structure de ce prix avantageait les imprimeurs et les éditeurs n’ont pas gagné un centime.

 

               -6 da : Frais d’impression

               -2 da : Circuit de distribution

               -2 da : Part revenant à l’éditeur.

        Prix de vente publique : 10 Da

 Ce prix est encore maintenu pour la plupart des titres. A ce jour, seuls trois quotidiens ont décidé de revoir à la hausse ce prix depuis 2 ans concernant El Watan et Liberté et 5 mois pour le Quotidien d’Oran. Pourquoi ?

 Dès l’année 2002,(le 26 octobre)il y a eu l’introduction de la couleur et l’arrivée sur le marché de l’impression, d’imprimeurs privés avec la possibilité de doter leur machines d’un 4e groupe pour avoir un journal d’une pagination de 32 pages et mieux d’un demi groupe avec une pagination de 28 pages, le cout de vente publique de l’exemplaire appelait à une véritable déconstruction de l’entreprise, qui courrait à sa perte.

Qu’on en juge par cette structure des prix.

        Pagination                     prix unit/ht

  24 pages dont 04 couleurs       6,85

24 pages dont 08 couleurs        7,05

28 pages dont 04 couleurs         7,85

28 pages dont 08 couleurs          8,05

32 pages dont 08 couleurs          9,05

 Si on maintient la pagination minimum de 24 pages avec seulement 04 pages couleurs, la structure des prix serait la suivante

           6,85 da : Frais d’impression

            2 da     : circuit de distribution

             1,15 da : part revenant à l’éditeur

Et cela uniquement si le journal est vendu sinon il y a les frais d’impression à prendre en considération. Ce qui requiert un tirage en fonction des ventes et non des tirages pour faire sensation.

De ces 1,15 da, il faut payer les salaires et les charges diverses (sécurité sociale, impôts, assurances et charges communes).

Il y a lieu de relever que le cout d’impression représente 40% du C.A.

   PUBLICITE

D’où donc l’importance de la publicité sans laquelle aucun journal n’est viable.

Il y a les grands annonceurs constitués par les concessionnaires automobiles et les opérateurs de téléphonie qui sont les gros porte- feuilles des journaux qui connaissent vis-à-vis d’eux des contraintes. Rares sont les titres qui critiquent les produits de ces annonceurs.

La publicité institutionnelle qui passe par l’Anep est redistribuée aux 86 titres existant et elle a tendance à baisser, sauf événement national qui mérite médiatisation. Cette agence se contente donc de saupoudrer les nombreux titres de publicité dont l’espace varie entre une demi-page et 10 pages par titre.

 CHARGES

 Comme une entreprise, le journal est astreint aux mêmes charges.

Les charges fiscales et parafiscales(Cnas) représentent 14% du C.A.

Les charges salariales : 20% du C.A.

 Autres contraintes :

Difficultés d’accès au foncier pour investir dans une imprimerie.

Obligation et nécessité de mettre en place un plan de formation.

La concurrence est rude avec sur le marché des dizaines d’entreprises de presse qui vendent le même produit périssable.

Les journaux électroniques.

                                                                                     © Abrous Outoudert,2013

                                                                                        abrousliberte@gmail.com