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Essai Hedia Bensalhi- "L'Algérie juive. L'autre moi que je ne connais pas"

Date de création: 29-12-2023 19:45
Dernière mise à jour: 29-12-2023 19:45
Lu: 87 fois


POPULATION- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH-ESSAI HEDIA BENSALHI- « L’ALGÉRIE JUIVE. L’AUTRE MOI QUE JE CONNAIS SI PEU »

 

 L’Algérie juive. L’autre moi que je connais si peu. Essai de Hedia Bensahli. Editions Frantz Fanon, , Alger  2023 , 359 pages, 2 000 dinars

 

 

On eu, déjà quelques ouvrages, édités en Algérie (voir plus bas) sur la présence juive en Algérie. Mais , à vrai dire , ils étaient passés inaperçus pour la simple raison que le sujet n’avait alors aucune prise sur l’actualité. Cette fois-ci, c’est assez différent, en ce sens  que cet ouvrage va encore plus loin  en remontant et en détricotant le passé du pays et qu’il arrive sur le marché éditorial au moment d’une actualité plus que brûlante. Encore que.....Certes  l’entité sioniste appelée « Israël » a accueilli surtout des juifs venus de plusieurs coins du monde, tout particulièrement des pays de l’ancien bloc soviétique.......mais on sait maintenant que les Juifs d’Algérie n’ont  représenté qu’une très infime partie. A peine  11% d’une communauté alors évaluée à 140 000 personnes Et, cela leur a même été reproché puisque  le 23 janvier 1963, une action a été intentée  à leur encontre (au Beit Ha’omanim de Jérusalem) parce qu’ils « avaient refusé d’immigrer  en masse ». vers le nouvel « Etat » , après l‘Indépendance de l’Algérie . Si le sionisme a eu des effets plus que néfastes, car raciste , arabophobe et islamophobe,    ce sera plus tardivement à partir de la France .

Selon l’auteure, l’entreprise d’écriture de toute cette histoire n’est pas simple.Un sujet très sensible.  Trop longtemps minimisé, souvent évité , pour ne pas dire étouffé ou nié pour de multiples raisons. En l’absence d’archives consistantes ou même légères, cela a poussé l’auteure à exploiter tant les récits déjà publiés ici et là que les souvenirs, les vies individuelles, les perceptions et les mémoires  des uns et des autres : « Ce n’est pas parce que les archives sont absentes qu’il ne s’est rien passé »

Donc, pour résumer, un essai explorant la présence juive en Algérie depuis deux mille ans et montrant que la judéité est un élément constitutif de son identité, dans une atmosphère de très grande tolérance.  L'auteure explique comment la colonisation a constitué la première cassure dans la relation symbiotique entre les Juifs et la communauté musulmane (en la  dissolvant dans ses statistiques puis dans la nationalité, les juifs affublés d’identités multiples, français  d’abord ,  « pieds-noirs » ensuite)  tout en rappelant les événements à son origine, comme la dissolution du consistoire algérien ...puis  le décret Crémieux.

Des parties très émouvantes sont consacrées aux héros juifs de la guerre de libération nationale : Daniel Timsit, Pierre Ghenassia, Jean-Pierre Saïd et bien d’autres. Il y a aussi les artistes de renom, femmes et hommes , qui ont excellé tout particulièrement dans le genre musique andalouse, un héritage multiculturel, rite de fraternité et de convivialité.

L’Auteure : Ecrivaine franco-algérienne et enseignante . Master en littérature (Université d’Alger), Dea en didactologie des langues et des cultures (Paris III). Prix Yamina Mechakra (« Orages » , 2019) et finaliste du Prix Mohammed Dib (« L’agonisant », 2022).

 

Table des matières : Préface (de Valérie Zenatti/ Introduction/ I. L’Algérie juive/ II. Juifs algériens et colonisation/ III. Fidaïne, moudjahidine : des combattants pour la cause/ Le syncrétisme/ Conclusion/ Bibliographie

 

Extraits : « Les exigences peuvent donc varier en effet selon le dynaste ; aussi, plusieurs auteurs s’accordent pour avancer que plus il est fort et puissant, et moins il craint les minorités, et donc est moins radical. Durant les périodes fastes, les restrictions sont généralement ignorées » (p 63) , « La conquête de l’Espagne par les Arabes à la fin du VIII ème siècle se traduisit pour eux non seulement par un allègement du joug de leurs oppresseurs (note : les rois wisigoths rudes et cruels) mais suscita dans leur sein des expressions culturelles d’une richesse et d’une profondeur comparables à celles des plus grands peuples de l ’Histoire » (Nissim Rijvan cité, 1999, p 90) , « En devenant la cible de la Couronne de Castille, comptant unifier politiquement et religieusement le royaume, les Juifs, tout comme les Musulmans, connaîtront les affres de l’Inquisition durant une très longue période puisqu’elle ne sera définitivement abolie qu’en juillet 1834 » (p 97), « Le statut officiel de dhimmi n’empêche nullement une réalité socioculturelle indéniable ; elle subsistera pendant des siècles et donnera naissance à une riche culture dite judéo-arabe ou judéo-berbère au Maghreb que l’on tend à minimiser , et parfois à ignorer » (p 99) , « Si certains sont venus d’Espagne, du Portugal ou encore d’Italie se réfugier au Maghreb au cours du temps, une bonne partie de la population juive est essentiellement installée depuis plus de deux millénaires : des Juifs, des Berbères judaïsés, puis arabisés » (p103), « Il convient de préciser que la population  juive de l’époque, nouvellement colonisée par la France, n’est pas du tout homogène comme on pourrait le faire croire ;il n’y a pas une population juive , mais des populations juives (niveau social, éducatif, culturel, etc..) disséminées dans les différentes régions du pays, vivant avec les Musulmans et comme les Musulmans eux-mêmes différenciés par les cultures régionales et sociales... » (p106)

 

Avis : Beaucoup de choses que l’on savait (pour les plus âgés d’entre-nous), mais qu’on n’osait pas dire ou écrire.......et encore moins assumer .L’histoire d’une communauté alors bien intégrée.....mais que le colonialisme puis le sionisme a perturbé, détourné et brisé.

Un document émouvant, la lettre adressée le 3 février 1957  du maquis ,à ses parents,  par Pierre Ghenassia, dit « El Hadj », mort à 17 ans,  les armes à la main, dans l’Atlas blidéen , défendant des compagnons blessés dont il avait la responsabilité . Une lettre digne de figurer dans les programmes scolaires

 

Citations : « Ce n’est pas parce que les archives sont absentes qu’il ne s’est rien passé  »  (Valérie Zenatti, préface, p 10), « En dehors des palais, avec le temps, la population avait appris à vivre ensemble. Il faut attendre la colonisation française pour la voir « disparaître », officiellement, du paysage démographique algérien, période durant laquelle on s’acharnera à rendre honteuses les origines autochtones » (p 100), « Les Juifs algériens ont subi l’histoire, résisté à leur manière, comme ils pouvaient.

Nombreux sont ceux qui disent (ou disaient) avoir été français dans la rue, au travail, mais jamais à la maison, ni avec leurs voisins musulmans qu’ils ne pouvaient en aucun cas mépriser » (pp 177-178), « La judéité algérienne est particulière, plurielle, et ne peut donc être simplifié » (p 255), « La Reconqusita (« une période noire vécue par les Musulmans et les juifs »), qui durera plusieurs siècles, ne renvoie pas à une simple reconquête de territoires, c’est une Croisade contre les « Infidèles »  (p321)

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