HABITAT -PERSONNALITES- FERNAND
POUILLON (Complément)
Fernand
Pouillon est né le 14 mai 1912 à Cancon dans le Lot-et-Garonne où son père, entrepreneur
de travaux publics, construit la voie de chemin de fer. Bientôt la famille
regagne Marseille, le berceau familial.
C’est en Provence que Fernand Pouillon établira les bases de son savoir-faire
et sa notoriété. On peut se reporter utilement à ses « Mémoires d’un
architecte » (Ed du Seuil. 1968) pour comprendre l’envol de sa carrière
dès le début des Trente Glorieuses. Néanmoins, tandis
que dans les années 1930 ses confrères affrontent un marasme profond,
Fernand Pouillon construit déjà beaucoup: un immeuble de trente à quarante
logements environ chaque année, toujours bien situé dans les centres villes
d’Aix-en-Provence et de Marseille, de 1934 à 1939, alors qu’il a tout juste
vingt-deux ans.
Toute sa vie il restera ouvert à toutes les techniques, tous les procédés, tous les
matériaux, toutes les formes dès lors, et cela est le fondement même de son
travail, qu’ils serviront ses objectifs: des prix bon
marché et la restitution authentique par les volumes, les formes et les
matériaux de ses propres sentiments et aspirations.
Jusqu’à la
fin de sa vie l’énergie de Fernand Pouillon sera sans limite. En dehors du fait
de construire des milliers de logements simultanément en France, en Algérie et
en Iran où il construit notamment deux
gares et des cités militaires, il est architecte-conseil du département du
Vaucluse et il est professeur à Aix-en-Provence puis à Marseille. Sa
collaboration avec ses élèves d’Aix-en-Provence lui fait faire les premiers pas
dans deux domaines où il excellera : l’écriture et l’édition de livres
d’art.
A partir de 1959 la gestion peu orthodoxe du CNL met sa société au bord de la
faillite. Il gagne un peu de temps mais n’évite pas le désastre.
Il est arrêté le 5 mars 1961. Le CNL est mis en liquidation.
Le 23 septembre de la même année le Conseil de l’Ordre des Architectes prononce
sa radiation à vie du tableau de l’ordre des Architectes.
Le 8 septembre 1962, Fernand Pouillon s’évade de la clinique où il était détenu
pour raisons de santé. Le 14 mai 1963 Il se constitue prisonnier pour le jour
même plaider lui-même sa défense lors du procès qui vient de s’ouvrir.
Le 13 juillet 1963, il est condamné à quatre ans de prison, ramenés à trois ans
par la Cour d’Appel le 15 janvier 1964. Fernand Pouillon retournera en prison
le 5 février 1965. Il sera libéré le 25 février 1965 après une ultime grève de
la faim, et amnistié le 12 mai 1971 par un homme qui connaît le dossier pour
avoir été dès 1958 le directeur de cabinet du général de Gaulle, puis son
premier ministre à partir de 1962, le Président de la République Georges
Pompidou.
Pendant ces années de prison, Fernand Pouillon trouve le ressort d’écrire un
livre qui affirme son talent d’écrivain. «Les pierres
sauvages» publié en 1964, reçoit le prix des Deux-Magots. C’est un
livre de chevet pour nombre de personnes dans le monde puisque ce livre,
constamment réédité (dernière édition, 2006) a été traduit en plus de trente langues.
Il écrit également des chapitres de ses futures « Mémoires d’un
architecte ».
En 1964 Fernand Pouillon ne reste pas inactif. A sa sortie de
prison Guillaume Gillet (Grand Prix de Rome en 1946) l’accueille dans
son agence .Un peu plus tard,
Au même son ami Jacques Chevalier qui n’a jamais quitté l’Algérie , l’incite à
l’y rejoindre à Alger. Fernand Pouillon
retrouve donc la maison qu’il occupait au début des années cinquante, villa et
agence tout à la fois, la Villa des Arcades, très dégradée par l’occupation
militaire française et qu’il restaurera pour la seconde fois, puis qu’il
agrandira.
C’est donc l’Algérie qui bénéficiera des compétences
de Fernand Pouillon pendant vingt ans, jusqu’en 1984, deux ans avant sa mort.
Avec le ministre du tourisme Mohamed Maoui il
couvrira le territoire algérien d’hôtels d’affaires ou de tourisme et de
complexes balnéaires. Les ministères de la Poste, de l’Enseignement Supérieur,
de l’Intérieur, lui confieront aussi des projets.
En 1982 la Biennale de Venise sur le thème de l’architecture dans les
pays islamiques rend hommage à son travail, aux côtés de Hassan Fathy, Louis Kahn et Le Corbusier.
Alors qu’il achève triomphalement et dans des délais record en juillet 1982 le
chantier de l’hôtel El-Djazaïr à Alger (ex-hôtel Saint-Georges), qui doit être prêt pour les vingt ans de
l’Indépendance de l’Algérie, sa fin dans ce pays est pourtant déjà programmée.
Au printemps 1984, Fernand Pouillon renonce à retourner à Alger, abandonnant ce
qu’il y possède.
En France les événements se précipitent alors. Fernand Pouillon a bien
réintégré le tableau de l’Ordre des Architectes et été élu au Conseil régional
de l’Ordre d’Ile de France en 1980 .Le Président de la
République François Mitterrand aura à cœur d’aider Fernand
Pouillon à réintégrer la France et à le réhabiliter en l’élevant au grade
d’Officier de la Légion d’Honneur (1984). Ces attentions rassérènent beaucoup
Fernand Pouillon.
Lorsqu’il meurt le 24 juillet 1986 dans le château de Belcastel en
Aveyron, une ruine très délabrée mais majestueuse qu’il a restaurée pendant
sept ans avec une équipe de maçons algériens.