RELATIONS
INTERNATIONALES- MAROC- RELATIONS UE/MAROC/ LIBERTÉ DE LA PRESSE / CRITIQUE UE ,JANVIER 2023)
Les députés européens ont vivement
critiqué jeudi 19 janvier 2023, la détérioration de la liberté de la
presse au Maroc, se disant par ailleurs « préoccupés » par les allégations
de corruption pesant sur Rabat dans le cadre d’une enquête menée par la justice
belge et visant aussi le Qatar.
Dans un texte non contraignant largement
adopté à Strasbourg – 356 voix pour, 32 contre et 42 abstentions -, le
Parlement européen demande « instamment » aux autorités marocaines de
« respecter la liberté d’expression et la liberté des médias » et de
« garantir aux journalistes incarcérés (…) un procès équitable ».
Les eurodéputés insistent en particulier
sur le cas d’Omar Radi. Ce journaliste indépendant de 36 ans, connu pour ses
positions critiques envers le pouvoir, a été arrêté en 2020 et condamné en
appel en mars à six ans de prison ferme pour « viol » et
« espionnage », accusations qu’il a toujours niées. « De
nombreux droits de la défense n’ont pas été respectés, ce qui entache
d’iniquité et de partialité l’ensemble du procès », considèrent les
eurodéputés qui demandent sa remise en liberté provisoire, de même que celle de
Taoufik Bouachrine, 54 ans, ex-patron de presse
emprisonné depuis 2018, et de Soulaimane Rassouni, 50 ans, autre journaliste condamné à cinq ans de
prison en 2022.
Tous trois ont été condamnés pour des
accusations à connotation sexuelle. Les eurodéputés exigent également « la
fin du harcèlement de tous les journalistes dans le pays ». Rabat n’a pas
réagi immédiatement au vote de cette résolution inédite du Parlement européen,
même si des médias proches du pouvoir ont fustigé une « ingérence »
et un « chantage ».
Lors de la récente visite au Maroc du
chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, son homologue marocain Nasser Bourita avait estimé que « le partenariat entre le
Maroc et l’UE fai(sai)t
face à des attaques médiatiques répétées et des attaques notamment au sein du
Parlement ».
Le Maroc et l’UE sont liés depuis 1996
par un accord d’association qui couvre d’étroites relations économiques et
commerciales, en particulier dans le domaine de l’agriculture et de la pêche.
Les autorités marocaines assurent que la
justice est indépendante et que les condamnations de journalistes « n’ont
rien à voir » avec leur travail journalistique. Human Rights
Watch (HRW) avait au contraire dénoncé en juillet le développement de
« techniques sournoises de répression » envers les opposants.
« Ce vote confirme qu’il s’agit bel
et bien d’attaques contre des journalistes afin de les faire taire », a
déclaré à l’AFP le père d’Omar Radi, membre du comité de soutien aux
journalistes emprisonnés au Maroc. « Nous réitérons notre appel à libérer
les journalistes et les militants des mouvements sociaux (en détention) et à
leur garantir le droit à des procès équitables dont ils ont été privés »,
a réagi Driss Radi.
« Après 25 ans de passivité »,
le Parlement européen « met fin à une fâcheuse tendance qui consiste à
exempter le Maroc de toute remarque sur les atteintes à la liberté de la presse
et aux droits humains », s’est réjoui Reporters sans frontières (RSF) dans
un communiqué.
Le Maroc occupe la 135e place sur 180
pays dans le classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.
Cette résolution concernant les médias
au Maroc fait également état de l’implication présumée de Rabat dans le
scandale de corruption qui ébranle le Parlement européen depuis décembre.
Le Parlement européen se dit
« profondément préoccupé » par « les allégations selon
lesquelles les autorités marocaines auraient corrompu des députés au Parlement
européen ». Il réaffirme sa détermination à « enquêter pleinement sur
les cas de corruption impliquant des pays tiers qui recherchent une prise
d’influence au Parlement européen ».
Comme Doha, le royaume chérifien a
fermement contesté ces allégations de corruption.