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Rachid Mimouni , roman - éL'honneur de la tribu"

Date de création: 20-01-2023 12:00
Dernière mise à jour: 20-01-2023 12:00
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HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN RACHID MIMOUNI- “L’HONNEUR DE LA TRIBU”

L’honneur de la tribuRoman de Rachid Mimouni. Editions Sédia, Alger 2008 (Editions Robert Laffont, 1989 , puis Editions Stock 1999), 215 pages, 650 dinars

Un livre qui  raconte le retour innatendue, peu de temps après l’indépendance du pays, à Zitouna,  de Omar El Mabrouk, un  enfant du pays que l’on croyait mort dans le maquis de la lutte de libération nationale .

Zitouna ! Un  lieu ignoré et tranquille qui passe brusquement du  statut de « lieu-dit » (vivant dans la sérénité, ignorant et ignoré du monde, ayant su faire son profit des expériences des sages et des enseignements des saints, ayant appris à faire le dos rond contre les assauts de l’adversité, conscient que les plus grands dangers surgissent presque toujours de son sein) à celui  d’une daïra (sous- préfecture). Il va , alors, traverser  les turbulences d’une « modernité » imposée - qui a surtout pour fonction de tout « fonctionnariser » , de déraciner, de désarticuler la micro société qui vivait jusqu’ici sereine dans ses habitudes ancestrales.  Omar El Mabrouk, devenu chef de daïra, (alors qu’il prétendait , lui l’ancien moudhajid, à une grande ambassade d’un pays nanti afin, se dit-il,  de mener la belle vie qu’il estime bien méritée)  va se mettre à décider   tout seul ,  en se couvrant de la légitimité d’une loi qu’il créée , parfois, sur mesure.....la sienne . Il  ne tiendra compte d’aucun bon sens. C’est l’envolée sans retenue et sans mesure qui déclenche un imaginaire débridé et même une envie de rire. Il va aller très loin : il "verbalise les ânes",  il "oblige les paysans à porter des chaussures »  il « modifie le nombre des prières quotidiennes » et il oblige les habitants « à avoir des adresses fixes ». « A la suite d’Omar El Mabrouk s’installèrent les gendarmes, puis les policiers, puis les officiers du secteur militaire, puis les responsables du Parti, les instituteurs de l’école, les médecins et infirmières de l’hôpital, les gardiens de prison, l’imam de la nouvelle mosquée, les caissières du supermarché.. »

L’ironie est dans  chaque ligne. Elle reflète un monde complètement immergé dans un système inouï il n’existe pas de communication entre le pouvoir et les administrés car  ne subsistent que des injonctions ou des obligations à assumer.

 

L’Auteur : en 1945 à Boudouaou (Boumerdès) et décédé à Paris en 1995 des suites d’une hépatite aiguë. Auteur d’une dizaine d’ouvrages: des romans dont « Le fleuve détourné », « Tombeza », « La ceinture de l’ogresse », « La Malédiction »....et des essais dont « De la barbarie en général et de l’intégrisme en particulier » , « Chroniques de Tanger ».....

 

Extraits : « Nous avons appris à faire le dos rond contre les assauts de l’adversité, conscients que les plus grands dangers surgiraient de notre sein » (p 36), « Nous avons appris de nos fougueux ancêtres le goût du défi et la promptitude du geste.On tue pour un mot, un sourire, un regard.Frustrés d’ennemis, nous étions devnus vifs à retourner nos fusils contre nous-mêmes.Un simple affront pouvait générer une interminable tuerie » (p 97), « Nous n’avons pas appris à aimer les étrangers.C’est toujours par eux que le malheur arrive « (p129), « De nos défaites et renoncements, nous avons forgé une morale qui nous aide à vivre plus haut que votre confort » (p 133), « Tous ces gens qui nous entourent sont supposés nous aider.En fait, nous sommes leur otage.C’est eux qui décident qui peut ou pas nous voir. A les écouter , nous avons toujours un emploi du temps terriblement chargé et des problèmes majeurs à résoudre » (p154)

 

Avis :Un livre au contenu indémodable, encore d’actualité.....plus que brûlante. Décortique avec réalisme et humour les déviations et déviances  d’une société qui  recouvre sa liberté mais qui , hélas, découvre une nouvelle servitude, « managée » , cette fois-ci, par certains de ses propres enfants. La naissance du « Système » !Un style direct qui peut paraître , aujourd’hui, quelque peu désuet, mais un style qui capte tous les sens, qui remue les tripes....et qui fout la rage.

 

Citations : « L’Histoire est rancunière » (p 37), « La victoire appartient souvent au plus déterminé, non au plus fort » (p 73) , « Qu’est-ce qu’une vérité , si elle accroît l’injustice » (p 156), « Combien sont nombreux les barreaux de l’échelle du pouvoir.On peut grimper jusqu’au ciel, il y aura encore des gens au-dessus » (p158)