HISTOIRE – PERSONNALITÉS- ZOULEIKHA OUDAÏ
Textes de Belkacem Ahcene
Djaballah Belkacem inspirés après lecture de trois ouvrages de
Kamel Bouchama , de M’hamed
Houaoura et de Aziz Moutas
sur l’héroïne (voir www.almanach-dz.com/histoire/bibliothèque
d’almanach):
1/Elle
s'appelait Yamina Echaib, épouse Oudaï,
mais toutes et tous l'appelaient Lalla Zouleikha.
Lalla ? Un substantif qui nous vient -tradition citadine- du grand respect,
voire de vénération vouée aux aînées. Lalla ? Parce qu'elle était une femme de
caractère, «radjel ou nass». Lalla ? Parce qu'elle était une nationaliste très
tôt engagée, suivant ainsi l'exemple de son père, aux côtés de son époux et des
combattants pour la libération du pays du joug colonial.
Lalla ? Parce
cela n'était guère facile dans une ville comme Cherchell (ville de l'époux), où
se trouvait installée une Ecole militaire bien gardée et gardant toutes les
Portes de la ville et ville dominée par des colons. Pourquoi ? Une Cherchelloise bien née, taillée dans le roc des
Berbéro-Hadjoutis, cette tribu Hadjoute, éternelle
rebelle.
Née à Marengo
(Hadjout aujourd'hui) en 1911, elle fut une des rares
«indigènes» à décrocher son Certificat d'études (en 1924, à l'âge de
treize ans), prenant en même temps conscience de son statut de colonisé... Son
fils aîné, Lahbib, ayant «fait
l'Indochine», de retour au bercail,prend le maquis.
Il tombera au
champ d'honneur en janvier 1957 à Sidi El Kebir, dans
la région de Chréa, deux mois après l'exécution de
l'époux, El Hadj Larbi.
Organisatrice
hors-pair de la résistance, responsable du «nidham» à Cherchell, elle animera les réseaux de
soutien (deux cellules, l'une composée de femmes, et l'autre d'hommes) au sein
et en dehors de la ville, parfois au nez et à la barbe des services de sécurité
A la suite
d'une dénonciation, le 21 mars 1957, elle rejoint définitivement le maquis...
et pourtant, la lutte continue. Hélas, elle est arrêtée le 15 octobre de la même
année... et torturée ( Le nom de son bourreau est
connu : le Lieutenant-colonel Le Cointe, devenu par la suite général de corps
d'armée), puis assassinée, exécutée le 25 octobre à 15 heures. Son corps ne
sera retrouvé que plus tard, en mai 1982... Elle est enterrée aujourd'hui au
cimetière des chouhada de Menaceur
(...)
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2/Elle a été
l'unique femme algérienne responsable politico-miltaire
durant la guerre de libération nationale. «Certes, il
y avait de grandes moudjahidate mais, à ma
connaissance, et je le dis pour l'Histoire, Yamina Oudaï,
connue sous le pseudonyme de Ella Zoulikha est
l'unique femme algérienne qui avait été désignée à la tête d'une organisation politico-militare» souligne un moudjahid de la région, Ghebalou H'mimed. Elle avait,
aussi, organisé un réseau de soutien composé uniquement de femmes
Une situation,
fruit d'une certaine histoire familiale, faite d'engagements politiques, de
combats et de martyrs (dont l'époux, Hadj Ahmed Oudaï
et un fils, Lahbib).
Belle,
intelligente, cultivée, généreuse, sociable, mère de famille exemplaire (deux
filles et trois garçons), née à Hadjout et installée à son mariage à Cherchell,
elle a réussi, avec l'accord et le soutien de l'époux, à activer pour la cause
nationale dans la plus stricte clandestinité.
Mais, toujours
sur ses gardes, car surveillée, harcelée par la police, les gendarmes et les
militaires... la maison familiale se trouvant à quelques mètres de l'académie
militaire de Cherchell.
Après sa
capture au maquis (le 15 octobre 1957), torturée, toujours résistante (elle
avait craché au visage du capitaine français, en public, alors qu'elle était
traînée par un half-track), elle fut froidement abattue le 25 octobre 1957 et
son cadavre abandonné dans la forêt... Sans sépulture (certes, il existe un
témoignage mais il reste bien incertain), son histoire a été évoqué par Assia
Djebar dans un de ses romans («La femme sans
sépulture») et son nom reste toujours vivant dans la mémoire populaire.
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3/Une
femme étonnante, native de Hadjout
- comme Annie Steiner l’autre
moudjahida- fille de
propriétaires terriens, épouse
d’un maquignon aisé, connue dans la ville (de Cherchell) pour sa classe et ses tenues élégantes, qui fut nommée, par le Fln, responsable de réseau dans la région.L’unique femme responsable
politico-militaire durant
la guerre ! Un poste imposant très exposé. Après la mort, au combat,
de son mari, Larbi Oudaï,
et le démantèlement de l’un
de ses réseaux , elle fut conduite
à prendre à son tour le maquis. Capturée par l’armée française en octobre 1957, elle est exposée,
attachée à un véhicule blindé et elle
se serait adressée à la foule....Elle aurait été exécutée le 25 octobre à 15 h à Sidi Semiane
sans que la date soit certaine....et
son corps manque ...Ses restes
( ?) « ont beaucoup voyagé » : D’abord un coin perdu du Dahra oriental, son corps en lambeaux et sans vie alors éjecté sans aucun égard, et enterrée par des
habitants dans une fosse commune. Puis,
au cimetière des Martyrs de la région
de Boukerdane et, enfin , en
juin 1984, au cimetière de Menaceur. « Une femme sans sépulture »
(si l’on emprunte au titre de l’ouvrage de Assia Djebar, publié en 2002). Mais, une femme encore bien vivante
dans l’imaginaire populaire
de la région et sur les totems nationaux
de la résistance populaire.A noter que si
Lalla Zoulikha est le personnage central du récit, d’autres personnages, héros de la lutte de libération nationale sont présentés, certains (rares) encore en vie, et ils enrichiront le récit grâce à leurs témoignages
(comme Ahmed Ghebalou, comme les propres enfants de Zoulikha...) et bien d’autres (dont le fils aîné
de Zoulika, mort au combat).