RELATIONS INTERNATIONALES- PALESTINE- HISTORIQUE
NEGOCIATIONS
Une nuit de mars 2002, un proche du défunt président Yasser
Arafat confiait : «Vous savez… le rêve d’Abou Ammar
—nom de guerre du président palestinien—, est de proclamer l’indépendance de la
Palestine à AlHaram Al-Charif.
Il dirait : “Il n’y a aucune raison pour qu’un Palestinien décide de revenir en
Israël et devienne Israélien. Les Palestiniens viendront avec nous, construire
notre État !”.» Déjà, le 10 décembre 2000, au
lendemain d’une séance de négociations secrètes dans l’hôtel David
Intercontinental, à Tel-Aviv, Yasser Abed Rabbo, le négociateur palestinien,
révélait, devant la caméra: «Cette fois, je pense
qu’ils (les membres du cabinet de gauche israélien), veulent vraiment conclure
un accord, peutêtre par peur d’une victoire de la
droite aux législatives de l’époque. Nous devrions pouvoir conclure d’ici deux
ou trois semaines. Pour la première fois, les Israéliens ont accepté le
principe d’une souveraineté palestinienne sur Al-Haram Al-Charif». Dans l’après-midi, Gilad
Sher, négociateur et chef de cabinet du Premier
ministre travailliste Ehoud Barak, mettait les choses
au point: «Je ne comprends pas comment les Palestiniens ont pu croire que nous
étions prêts à renoncer à la souveraineté sur le mont du Temple.» Shlomo Ben-Ami, le
ministre des Affaires étrangères de l’entité sioniste, n’était pas autorisé à
faire cette concession fondamentale, et, durant toutes les négociations
suivantes, les Palestiniens ont espéré —et attendu en vain— qu’elle soit
répétée par la délégation israélienne. Le sommet de Camp David en juillet 2000,
destiné à trouver un accord de paix définitif entre Israéliens et Palestiniens,
avait échoué sur la question du lieu saint. Pour la direction sioniste, il
n’était pas question d’accepter une souveraineté palestinienne sur l’esplanade
des Mosquées. Barak avait été catégorique : «Je ne
connais pas un chef de gouvernement qui accepterait de signer le transfert de
la souveraineté sur le Premier et le Second Temple (l’esplanade des Mosquées),
qui est la base du sionisme. (…) Une souveraineté palestinienne sur la vieille
ville serait aussi dure (à supporter) qu’un deuil. Mais, sans séparation d’avec
les Palestiniens, sans la fin du conflit, nous nous enfoncerons dans la tragédie.» En août 2003, Arafat a autorisé plusieurs de ses
principaux conseillers, conduits par Abed Rabbo, à négocier avec une
délégation de l’opposition de gauche israélienne présidée par Yossi Beilin et Amnon Lipkin-Shahak,
l’ancien chef d’état-major. Ils parviendront à un accord en décembre de la même
année. Appelé «l’initiative de Genève», cet accord est
fondé sur le principe du trade-off («troc») refusé
par Israël. Les Palestiniens renonceraient au droit au retour et recevraient en
échange la souveraineté sur Al-Haram Al-Charif. Ariel
Sharon, le Premier ministre, qualifia de «traîtres»
les signataires israéliens. Élu à la tête de l’Autorité autonome et de l’OLP,
après la disparation d’Arafat en novembre 2004, Mahmoud Abbas ne peut que gérer, tant
bien que mal, le statu quo. Quelques succès diplomatiques ont été remportés,
dont l’admission, en tant qu’État, à l’Unesco en 2011. L’année suivante,
l’Assemblée générale des Nations unies accordait à la Palestine le statut
d’État observateur, non membre. Entretemps, la position de l’entité sioniste
s’est complètement radicalisée. La majorité israélienne dirigée par Benyamin
Netanyahou considère la démocratie comme la loi de la majorité avec, pour les
minorités, des protections minimales. Elle entend définir Israël comme un État
juif et démocratique —dans cet ordre— où les Juifs seuls auraient des droits
pleins et entiers. En mars 2016, 79 % des Juifs israéliens, interrogés dans le
cadre d’un sondage, étaient en faveur d’un «traitement
préférentiel pour les Juifs». C’est-àdire une forme
de discrimination envers les non-Juifs. La perspective d’une solution à deux
États n’est donc plus qu’un mirage. L’occupation de la Cisjordanie devient
pérenne avec près de 400.000 Israéliens habitant les colonies situées dans 60 %
de la Cisjordanie, annexés de fait. Sans compter les 200.000 qui résident dans
les nouveaux quartiers juifs d’Al Qods-Est. Ceux qui
parlent de statu quo se trompent. Celui-ci n’est pas stable. Il évolue dans la
direction qui mène inexorablement les parties vers les sables mouvants d’une
réalité binationale, où Israël, dominateur, tenterait d’imposer sa volonté aux
Palestiniens parqués dans des enclaves territoriales. Le contrôle des
périphéries, selon l’entité sioniste.