HISTOIRE- RESISTANCE- ATTAQUE GRANDE POSTE ORAN(5/4/1949)
L’attaque de la grande Poste d’Oran, le 5 avril
1949, est considérée comme l’une des actions les plus spectaculaires menées par
l’Organisation Spéciale (OS), pour assurer la préparation du déclenchement de
la future lutte armée contre l’occupant français.
Exécutée par un groupe de militants de
l’OS, la branche armée du PPA-MTLD, l’attaque de la grande Poste d’Oran visait
la récupération des fonds nécessaires à l’acquisition d'armes devant servir,
plus tard, au déclenchement de la Révolution du 1er Novembre 1954.Les
responsables de l’OS avaient réfléchi aux voies et moyens pour collecter les
fonds nécessaires pour mener le combat libérateur contre l’occupant français. Pour
cela, le responsable national de l’Organisation, Hocine Aï Ahmed, avait donné
son aval pour la conduite de cette opération et sa préparation sur les plans
logistique et matériel, avec le soutien de l’ensemble des responsables des
cellules de la région ouest, Ahmed Ben Bella et le responsable de la cellule
locale, Hammou Boutlélis. Au
commencement, la réflexion avait porté sur l’attaque d’un train transportant
des fonds entre Oran et Béchar. Toutefois, l’idée avait été vite abandonnée
car, supposée risquée du fait qu’elle nécessitait des éléments spécialisés et
de gros moyens, soutient l’universitaire Belhadj selon qui le militant Bekhti Nemmiche, employé comme préposé à la Poste d’Oran était
chargé de se procurer le plan des lieux à investir. Il avait suggéré,
comme cible, ce centre régional
qui finance la Grande Poste d’Oran et les villes de l’ouest du pays et avait
pour rôle, dans cette opération, de trouver "la brèche" pour pouvoir
y accéder en prenant toutes les précautions nécessaires. La préparation était
parfaite pour cette importante opération et avait duré trois mois entiers pour
laquelle une petite chambre a été louée au quartier de "Gambetta"
(l’actuel Seddikia) à Oran par le militant de l’OS, Gheddifi Benali. Le lieu a servi de base des opérations et
de la préparation du hold-up, rappelle l'universitaire. Le domicile d’un
militant, en l'occurrence Zaoui Abdelkader, au
quartier populaire " les planteurs" (l’actuel Haï sanawber)
a également servi dans cette opération pour loger des membres du groupe qui
devaient connaître l’adresse du domicile du chahid Hamou Boutlélis, au Boulevard de
Mascara, pour procéder, après l’action, au transfert des fonds récupérés. Concernant
l’établissement visé, le choix a porté sur le militant Souidani
Boudjemaa pour repérer l’objectif que représentait la
Poste d’Oran et surveiller, pendant 15 jours, l’entrée et la sortie des
véhicules et les mouvements des agents. Pour cette mission, Souidani
Boudjemâa s’est fait passé pour un vendeur ambulant opérant aux alentours
de la Poste. Ahmed Benbella s’est déguisé, quant à
lui, en agent postier à l’entrée en faisant la reconnaissance des coins et
recoins de la poste, de l’intérieur, rapporte l’historien. "L’exécution de
l’opération devait avoir lieu au mois de mars. Toutefois, il a été décidé de la
reporter en raison d’une panne ayant touché le véhicule devant servir de moyen
de transport des fonds. Ce n’est ainsi qu’en avril 1949 que le choix avait
porté sur six militants pour mener cette attaque. Il s’agit de Belhadj Bouchaïb, le seul à porter les armes dans cette opération,
Mohammed Bouihi, Amar Haddad, Rabah Louraghiou, Souidani Boudjemaa et Mohamed Khider. Après
quelques jours de surveillance de l’édifice, le feu vert a été donné pour
accéder au service de télégraphie, passage indiqué par le militant Djelloul Nemmiche pour pénétrer à
la Poste d'autant qu'il était le seul service qui ouvre tôt le matin, et
partant pouvoir voler la voiture ciblée d’un médecin français pour mener cette
opération. Le 5 avril, les membres du commando accédèrent au service de télégraphie
après avoir réussi à tromper la vigilance d’un des agents postiers. Ils se sont
dirigés directement vers l’étage supérieur où se trouvait le coffre contenant
plus de 30 millions de Francs. Cependant, les membres du commando ont été
surpris par un planton qui avait alerté la police. Les membres de l’OS avaient
réussi à prendre un butin de 3.178.000 francs français qui devait être
distribué aux sept centres postaux d’Oran. L’argent fut transporté rapidement
au domicile de Hammou Boutlélis
et Mohamed Khider a été chargé d’acheminer les fonds
jusqu’à Alger pour les mettre au Commandement de l’OS.
Grâce aux fonds provenant de
l’attaque de la Grande Poste, plus de 350 pièces d’armes et des munitions
provenant de la Libye ont été acquis. Le stock a été acheminé jusqu’à la région
de "Machounch", entre Biskra et Batna et
enterré dans une "Matmoura" jusqu’au
déclenchement de la lutte armée, rapporte Mohamed Belhadj, se référant au
témoignage d’un des organisateurs de l’opération, Ahmed Benbella.
Avant le déclenchement de la révolution armée, il a été procédé à la
distribution des armes dans la région Est du pays, selon le témoignage de feu
Ahmed Benbella, en tant qu’acteur et témoin, qui
avait déclaré que "l’argent de l’opération de la Poste d’Oran avait
contribué en grande partie au déclenchement de la lutte armée dans la région
des Aurès". Ahmed Benbella a indiqué, dans ce
cadre, "l’existence de plusieurs autres opérations et attaques dans d’autres
régions du pays, pour récupérer des armes, des explosifs, des fusils de chasse
et munitions". Suite à cette audacieuse opération, une enquête judiciaire
a été déclenchée par les autorités coloniales sans qu’elle n’aboutisse à la
conclusion que cette attaque aurait un lien quelconque avec la question
nationale, mais confondue comme une opération de " casse et de
banditisme" ayant ciblé la poste centrale d’Oran. "Toutes les
investigations ont convergé à cette piste et n’ont fait le lien avec l’OS
qu’après, une année, lors de la découverte de l’existence de l’OS et son
démantèlement. Dans ce cadre, il a été procédé à l’arrestation de plusieurs
auteurs de l'opération, à l’instar de Hammou Boutlélis, condamné à 7 ans de prison, Rabah Lourghiou à 20 ans de prison, Fellouh
Meskine, 5 ans de prison et Benaoum
Benzerga, à plus de 10 ans.