COMMUNICATION- OPINIONS ET POINTS DE VUE- SITUATION EL WATAN/OPINION Pr
AHMED CHENIKI
© Pr Ahmed Cheniki, fb, mardi 21 juillet 2022
AVEC CETTE HISTOIRE D'EL WATAN, JE REPUBLIE CE TEXTE QUE J'AI POSTE L'ANNEE
DERNIERE LE 28 JUILLET 2021
QUE CACHERAIT LA PROBABLE DISPARITION D’EL WATAN ?
Je m’y attendais. Ce SOS d’El Watan ne m’a
nullement surpris. J’avais, il y a quelques semaines, soulevé la question en
posant surtout le problème de la publicité, indicateur privilégié du mode de
gouvernementalité. Je n’avais pas du tout dit qu’il fallait accorder
préférentiellement la publicité aux uns aux dépens des autres, mais de laisser
les entreprises publiques et privées, décider librement de la destination de
leurs pages en fonction de la rentabilité de tel ou tel journal, gouvernemental
ou privé.
Je suis de ceux qui disent que la transparence est fondamentale. Les
Algériens en général et les lecteurs devraient savoir où va la publicité comme
ils devraient aussi être informés des ventes et de l’audience du journal. L’OJD
(Office de la Justification des Tirages) est d’une nécessité absolue. Avoir 100
ou 1000 journaux ne veut absolument rien dire, mais ce qui serait important,
c’est leur impact (chiffré). Aucun responsable ne devrait avoir la latitude, le
droit, il n’en a théoriquement pas, d’attribuer des pages de publicité pour
services rendus ou arrêter un contrat parce que tel ou tel journal aurait déçu.
Le journal ne doit pas chercher à plaire, ce n’est pas son rôle. Mais s’il
prend cette direction, il risque sa peau. Beaucoup ont préféré éviter les
informations qui fâchent le distributeur de la publicité. Le journalisme, c’est
l’écrit, sa justesse. A quoi serviraient mille ou cent mille journaux si tous
écrivent la même chose, tout en tendant la main ? J’aime beaucoup cette déclaration
d’Albert Londres : "Notre métier n'est pas de faire plaisir, non plus de
faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie en mettant dans la
balance son crédit, son honneur, sa vie."
La fonction d’un journal n’est pas de faire de la propagande ou de
l’opposition, mais de dire ce qui lui semble être la « vérité ». En faisant
cela, il fait aussi acte de patriotisme, permettant ainsi de dévoiler les
failles freinant le développement d’un pays, donc de contribuer à leur
règlement.
Je ne comprends pas certains anciens journalistes qui justifient leurs
haines des organes privés par le fait, selon eux, que les associés des journaux
privés, leurs collègues, à un moment donné, se seraient enrichis. Drôle de
raison ! La question fondamentale devrait-être ailleurs. Ce qui devrait-être
important, c’est ce que les uns et les autres, organes de presse, ont apporté
ou pas au secteur et les conditions dans lesquelles s’exerce le métier.
Aujourd’hui, est-il possible d’avoir un débat sérieux sur la presse, en mettant
sur la table tous les chiffres ?
Je reproduis ici le texte que j’ai publié le 10 juillet 2021 :
LES PARADOXES SANS FIN D’UNE PRESSE PARADOXALE
Le quotidien « El Watan » connaît de sérieuses
difficultés financières dues essentiellement au COVID et à l’épineuse question
de la publicité. El Khabar avait les mêmes problèmes . C’est du moins ce que révèlent certaines plumes
de ce quotidien.
Je ne sais pas, mais j’ai toujours considéré que ces deux journaux peuvent
être des centres importants de la cartographie médiatique. Paradoxalement,
d’après des informations non vérifiées, El Watan
serait le journal de langue française qui connaitrait le plus d’exemplaires
vendus, El Khabar qui aurait perdu de nombreux
lecteurs resterait un quotidien essentiel dans un pays où le lectorat bilingue
commence à s’imposer. Mais un paradoxe en appelle un autre, des journaux, trop
peu vendus, avec un extraordinaire bouillon, bénéficient de la manne
publicitaire de l’ANEP au moment où la publicité privée recule très sérieusement.
J’ai toujours été critique à l’égard de ces deux journaux, comme d’ailleurs
de la presse, mais il serait peut-être temps de comprendre que le pays devrait
plutôt permettre à ses « bons » journaux d’exister tout en admettant leur ton
critique. Ce n’est qu’ainsi que les fléaux et les maux sociaux et politiques
seraient révélés. Charles de Gaulle dont la gestion était souvent critiquée par
Sirius (Hubert Beuve Mery) dans Le Monde considérait ce quotidien comme un
espace emblématique, représentatif de la France, au-delà de sa personne ou de
l’institution présidentielle. D’ailleurs, ce quotidien a toujours été défendu
par les pouvoirs publics malgré la férocité de ses critiques, comme d’ailleurs
la BBC, The Guardian, The Times ou The Financial Times en Grande Bretagne ou
The Washington Post ou The New York Times aux Etats Unis ou Die Welt, Frankfurter Allgemeine
Zeitung et Bild Zeitung en Allemagne. Churchill, au
moment d’une profonde crise traversée par Financial Times avait estimé que ce
serait une tragédie si ce journal disparaissait, faisant intervenir le soutien
indirect de l’Etat.
Ces deux journaux, El Watan, avec une meilleure
distance et El Khabar devraient retrouver sa
dimension professionnelle si la publicité allait aux journaux, gouvernementaux ou
privés, ayant une grande audience et si on activait l’OJD (office de
justification de la diffusion). Pourquoi n’impose-t-on pas aux journaux
l’obligation de publier les chiffres du tirage quotidien ?
P.S: La discussion devrait être calme, argumentée. Tout post ne
s'inscrivant pas dans la logique du débat qui implique la connaissance du
terrain médiatique. Ceux qui ne maîtrisent pas les contours du sujet pourraient
poser des questions, apprendre. Aujourd'hui, un peu partout dans le monde, la
presse vit des moments difficiles, notamment avec l'apparition d'internet et le
déficit en pages publicitaires.