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Zahia Ziouani (Chef d'orchestre)

Date de création: 08-07-2022 12:16
Dernière mise à jour: 08-07-2022 12:16
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CULTURE- MUSIQUE- ZAHIA ZIOUANI (CHEF D’ORCHESTRE)

 

 

Zahia Ziouani garde toujours ses baguettes près d’elle. Une dans sa voiture. Une autre à son domicile, pour être «opérationnelle» partout. Quand la cheffe d’orchestre ne dirige pas dans les salles les plus prestigieuses d’Ukraine, d’Allemagne, des Etats-Unis, à la Philharmonie de Paris ou à Pleyel, elle travaille à Stains (Seine-Saint-Denis) où elle a créé son ensemble symphonique en 1998 : Divertimento, avec 70 instrumentistes.

Cet ancrage en banlieue constitue une fierté pour celle qui a joué pas moins de quatre fois à l’Elysée, dont la dernière devant Emmanuel et Brigitte Macron. Sous les ors de la République, on s’est parfois étonné. Elle constate : «L’excellence dans les territoires ne va toujours pas de soi. Mais pourquoi le fait d’être une femme, issue de la banlieue, d’origine algérienne, exclurait-il celui de devenir l’une des meilleures cheffes d’orchestre de France, voire d’Europe ?»

«Mon profil était surréaliste à l’époque» Zahia Ziouani, 43 ans, a grandi à Pantin. Arrivé d’Algérie en 1962, son père apprend à lire seul, pousse la porte des salles de concert, consulte les journaux, prête une oreille attentive à France-Culture et découvre la musique classique. A la maison, c’est un bouillonnement de culture. On visite châteaux et musées. On écoute au moins autant Jacques Brel ou le chanteur kabyle Idir que les symphonies de Mozart et de Beethoven.

Zahia Ziouani dessine des clés de sol. Sa mère l’inscrit au conservatoire de Pantin. A 8 ans, elle apprend la guitare, puis choisit l’alto. Au centre de l’orchestre, entre aigus et graves, elle a une révélation : elle sera cheffe. Ses professeurs la découragent : ce n’est pas une profession pour les femmes. Dans les années 1990, le chef d’orchestre reste un mâle, blanc, âgé, souvent doté d’une barbe, confirme-t-elle. Vienne, par exemple, interdira ses orchestres aux femmes jusqu’en 1997.

«J’ai grandi avec des figures de combattantes. Ma grand-mère a été emprisonnée pendant la guerre d’Algérie. Moi, à embrasser cette profession-là, je ne risquais pas ma vie

Auditrice assidue des masterclass de Sergiu Celibidache à Paris – où il n’y a que des garçons –, Zahia Ziouani se fait repérer à 16 ans par l’entourage du maestro. Un premier stage auprès de son assistant lui donne l’occasion de rencontrer le chef roumain dont le poster veille sur sa chambre d’adolescente.

Un an et demi de cours intensifs la conforte dans sa vocation, même si doutes et interrogations la tenaillent.

«Mon profil était surréaliste à l’époque. Ça a été compliqué de me projeter

Mais elle a moins souffert de ses origines que de son statut de femme, et d’arriver du « 9-3 ». Si elle a dû fonder son propre orchestre, c’est parce qu’elle avait moins d’opportunités que les hommes de diriger.

Avec Divertimento, elle fait venir les concerts classiques dans des territoires toujours plus marginalisés. Et participe à la démocratisation de la musique en ouvrant, notamment, une académie aux débutants. Stimulée par sa double culture («Je suis 100 % française et 100 % algérienne»), elle rappelle que Camille Saint-Saëns, compositeur qu’elle chérit par-dessus tout, s’est inspiré de la musique arabe. Son credo ? Faire du classique une musique «populaire». Principal obstacle :

«Je ne reçois pas les mêmes subventions du ministère de la Culture que mes collègues. On relègue mes projets à la politique de la ville

Pourtant, Zahia Ziouani continue de tracer son chemin. Après un concert à la Philharmonie de Paris, le 13 juin,

elle sera cet été sur le tournage de «Divertimento», film de Marie-Castille Mention-Schaar inspiré de sa vie.

Elle enseignera à l’actrice Oulaya Amamra, qui joue son rôle, l’art subtil du maniement de la baguette. Niels Arestrup, lui, incarnera Sergiu Celibidache. L’aventure la ravit : «Rendre visible par le cinéma des parcours

Elle a participé à la cérémonie de clôture des Jm d’Oran (Juillet 2022) en se produisant (deux compositions) avec son orchestre devant près de 50 000 spectateurs