HABITAT- VILLE- KENADSA
Située à l'ouest de la ville de Béchar, dans le
sud-ouest de l'Algérie, la cité de Kenadsa est l'une
des plus importantes cités sahariennes connue pour son histoire séculaire, la
beauté de son paysage, ses sites patrimoniaux et ses monuments religieux, culturels
et touristiques, mais également ses personnalités littéraires et
intellectuelles, témoins de sa particularité et son originalité. Agé de plus de
huit siècles, le vieux Ksar de Kenadsa, symbole
immuable de la ville, est l'un des plus majestueux ksour (palais) de Béchar et
de la Saoura en termes de beauté architecturale et de richesse patrimoniale
historique, même si la majeure partie de ses bâtisses est tombée en ruine, à
l'exception de l'allée centrale connue sous le nom de la
«Casbah» avec ses deux villes mosquées, un cimetière et ses innombrables
sentiers exigus. Ce majestueux Ksar, construit à partir d'un mélange de terre,
où se mêlent argile et feuilles de palmiers, abrite la zaouïa ziyaniya qui compte des disciples de la ville malienne de
Tombouctou, du Sahel et d'Algérie, outre la bibliothèque dite
«ziyania kandoussia»,
fondée par un enfant du ksar et renfermant de nombreux manuscrits rares sur la
religion, le soufisme, la littérature et l'histoire de la région. L'histoire de
Kenadsa remonte à des milliers d'années... Son musée
communal expose une série d'outils en pierre utilisés par les premiers
habitants, tels que des grattoirs, des lances, des flèches et des pilons en
pierre, en plus de nombreuses gravures rupestres. De nombreux animaux empaillés
y sont également exposés pour rappeler la diversité de la faune dans la région
de la Saoura, à l'instar d'oiseaux, serpents, lézards, loutres et bouquetins,
qui vivent à proximité du barrage «Djorf
Torba» (à 30 km de Kenadsa),
en plus de fossiles datant de millions d'années. La Saoura est prisée pour sa
beauté naturelle captivante, ses montagnes rocheuses, ses dunes et une oasis
pittoresque à côté de laquelle a été bâti l'ancien ksar. Kenadsa
est, par ailleurs, connue pour son riche patrimoine immatériel à l'instar d'«El Ferda», une musique antique
traditionnelle basée sur le Melhoun où se mêlent harmonieusement spiritualité,
soufisme, invocations (tawassoul), madih et poèmes d'amour (achaki).
D'après l'un des membres de la troupe «El Ferda», Hocine Zaidi, plusieurs instruments sont utilisés
dans cette variété de musique dont le luth, le violent, le banjo, soussen (petit goumbri) et le
tambour. El Ferda est un genre de musique raffinée
qui a su se démarquer des autres chants populaires de la région, a mis en avant
H. Zaidi. Cette diversité musicale a engendré une variété de danses
folkloriques propres à la région, à l'image de «berkaïcho» exécutée dans le cadre d'un festival
annuel où les danseurs se déguisent en animaux et suivent leur leader «berkaïcho» submergé par le rythme de kerkabou.
De la ville de Kenadsa sont issues de nombreuses
personnalités intellectuelles et hommes de lettres, dont les plus connus sont
le romancier Mohamed Moulesshoul, connu sous le nom
de Yasmina Khadra et la romancière Malika Mokadem. Le
musée communal expose des oeuvres de ces écrivains et
bien d'autres en guise de reconnaissance aux enfants de la ville. La ville est
aussi connue pour être la ville natale du maitre du luth, le prodige Abdelaziz
Abdellah, connu sous le nom de «Alla El Bechari». Auteur compositeur de renommée mondiale, Alla a son propre style «fondou»,
une musique douce et improvisée à travers laquelle il fusionne les deux
dimensions algéro-saharienne et africaine.
Mines
de charbon : histoire d'un drame
La découverte du charbon dans la région de Kenadza remonte au début du XXe siècle avant qu'elle ne
devienne une importante industrie dans les années 1930/40. Les mines et la cité
européenne témoignent à ce jour d'une époque où les habitants de Kenadza gagnaient leur pain en exerçant dans des
exploitations minières aux côtés d’ouvriers européens. A l'entrée de la ville,
un vieux train de marchandise qui transportait autrefois du charbon est exposé
avec une pancarte sur laquelle est écrit «cité des
mines» en sus d’amas de résidus de charbon visibles ici et là dans le tissu
urbain. Cette industrie est désormais «un triste
héritage» pour la mémoire des Kenadsa, dit Ibrahim,
un de ses habitants, qui ajoute que les Français «exploitaient les
propriétaires des terrains par les moyens les plus abominables et les
exposaient à la mort dans des tunnels sombres... Plusieurs d'entres eux y ont même perdu la vie ou amputés d'un membre,
sans oublier des maladies respiratoires chroniques, y compris «la silicose» et d’autres allergies. Le musée municipal du
patrimoine présente un aperçu de la mine et son histoire à travers des outils
de creusement, des casques, des haches, des batteries, des lampes, des outils
spéciaux pour allumer le feu et des chariots de transport du charbon, en sus de
nombreux documents exposés qui mettent en exergue les accidents de travail à
l'époque et des journaux qui documentent certaines catastrophes ayant touché
les mineurs (la plupart étant des Algériens). Consultante au musée, Amina Belhafiane, a indiqué que le charbon «fut
découvert à Kenadsa en 1906 par un Algérien, Kendoussi, avant d'être exploité par le colonisateur pour
la première fois en 1917. Et dans les années 1930 et 1940, son industrie s'est
développée permettant son exportation vers la France, l'Espagne et l'Italie,
avant d'être gelée après l'indépendance en 1967»,
ajoutant que grace au charbon les Français étaient
dans «une situation d'aisance financière et bénéficiaient de l'énergie électrique
dans les villes».