VIE
POLITIQUE- ETUDES ET ANALYSES- PUISSANCES AU MAGHREB/ALGERIE-
ETUDE
GIISA 2022/ALLEMAGNE
L'Algérie est-elle
réellement le leader naturel et la puissance numéro 1 du Maghreb ? Pas vraiment
à en croire une étude menée par le think tank
allemand German Institute for International and Security Affairs
(GIISA), l'un des plus influents cercles de réflexion dans toute l'Allemagne et
toute l'Europe. Et pour cause, ce Think Tank
conseille les décideurs politiques allemands sur des questions de politique
étrangère et de sécurité ou de politique internationale et européenne. Il est
régulièrement sollicité par le Bundestag, le parlement, allemand le
gouvernement fédéral, mais conseille aussi plusieurs organismes de l'Union
Européenne (l'UE).
Pour cette étude, le
GIISA a recensé 35 indexes et classements pour se concentrer sur trois pays, le
Maroc, la Tunisie et l’Algérie. De prime abord, la principale conclusion de
cette étude des classements permet aux experts du GIISA d'affirmer que les pays
du Maghreb sont généralement classés dans le tiers du milieu des États étudiés,
jamais tous dans le dernier tiers. Pour les questions militaires (Global
Militarisation Index), de force de passeport (Arton Capital’s Passport Index) ou de
performance gouvernementale (Ibrahim Index of African
Governance) ils atteignent même le premier tiers. Ce
qui peut être considéré comme une bonne performance pour les pays maghrébins.
Cependant, concernant
l'Algérie, force est de constater que notre pays ne domine ses voisins
maghrébins que dans trois domaines déterminés. Oui seulement domaines.
L'Algérie n’est en tête de ses paires que dans trois classements : l’Human
Capital Index, l’Human Development Index et le Global
Militarisation Index.
En clair, l'Algérie
bat largement le Maroc et la Tunisie concernant l'indice de développement
humain. L'indice de développement humain (IDH) correspond à un indice composé
calculé chaque année par le PNUD afin d'évaluer le niveau de développement des
pays en se fondant non pas sur des données strictement économiques, mais sur la
qualité de vie de leurs ressortissants. Cet indice s'appuie sur
l’espérance de vie à la naissance, car elle est significative des
conditions de vie à venir des individus (alimentation, logement, eau potable…)
et de leur accès à la médecine, le niveau d’éducation, qui détermine
l’autonomie tant professionnelle que sociale de l’individu et le revenu national
brut par habitant, révélateur du niveau de vie des individus et ainsi de leur
accès à la culture, aux biens et services, aux transports.
L'Algérie domine aussi
ses voisins concernant le classement mondial des armées les plus
puissantes. Le Global Militarization Index a
été réalisé par le Centre international de la reconversion de Bonn (BICC). Cet
index classe au moins 152 états par le degré de leur militarisation, est
accessible via ce lien. Le calcul de cet index de la militarisation est basé
sur trois paramètres: budget( % du PIB),
effectifs (% de la population qui appartient aux armées et aux réserves) et
arsenal (% des armes lourdes par rapport à la population). Et l'Algérie figure
régulièrement dans le TOP 15 des pays les plus militarisés de la planète
dépassant de loin la Tunisie et le Maroc.
L'Algérie domine enfin
ses voisins dans L'indice du capital humain qui
est un rapport préparé par la Banque mondiale. Cet indice mesure les pays qui
mobilisent le mieux le potentiel économique et professionnel de leurs citoyens.
L'indice mesure combien de capital chaque pays perd par manque d'éducation et
de santé.
Excepté ces trois
domaines, l'Algérie est, malheureusement, à la traîne dans de nombreux autres
domaines notamment ce qui concerne la bonne gouvernance ou le développement
économique ainsi que la liberté de la presse et les libertés publiques.
L'Algérie fait, par
exemple, de très mauvais résultats par rapport à la Tunisie dans le Bertelsmann
Transformation Index (BTI) qui évalue la transformation politique, économique
et la gouvernance. La Tunisie a atteint la 44e place sur 137 Etats contre 83e
place pour l’Algérie qui fait tout de même mieux que le Maroc classé au 94e
rang mondial.
Toutefois, en matière
de démocratie, l'Algérie est la derrière de la classe
au Maghreb. Le BTI considère que la Tunisie est une "démocratie
défectueuse", qui concorde avec la notion de "démocratie
imparfaite" du Democracy Index de l’Economist
Intelligence Unit. De son côté, le Maroc se classe comme "régime
hybride" dans lequel des entraves à la démocratie existent alors que
l'Algérie est officiellement classée comme un régime autoritaire.
Sur le plan
économique, l'écart se creuse entre l'Algérie et ses voisins maghrébins. Le
Maroc est devenu leader en termes de durabilité écologique se hissant à la 7e
place (sur 61) du Climate Change Performance Index.
Le Maroc fait mieux que l'Algérie en terme
d’entreprenariat pour la Banque Mondiale qui le classe 53e (sur 190) dans son Ease of Doing Business Index. En
termes de transparence budgétaire, liberté économique et de connectivité, le
Maroc et la Tunisie devancent aussi largement l’Algérie. Et en termes de compétitivité économique, l'Algérie est battue par
le Maroc et la Tunisie dans le Global Competitiveness
Index, un indice composite, analysant 103 indicateurs différents, répartis sur
12 piliers: Institutions, Infrastructure, Aptitude à intégrer la technologie,
Stabilité macroéconomique, Santé, Éducation et compétences, Marché des biens,
Marché du travail, Système financier, Taille du marché, Dynamisme des
entreprises et Innovation.
En guise de
conclusion, rien ne permet réellement d'affirmer que l'Algérie est le pays le
plus puissant de la région du Maghreb. C'est, certes, le pays le plus important
au regard de sa superficie, des richesses de son sous-sol et de l'envergure de
son armée. Mais l'Algérie ne domine guère outrageusement ses voisins dans les
domaines les plus stratégiques du développement économique et technologique.
Pis encore, elle doit rattraper du retard sur plusieurs volets.