COMMUNICATION-
PRESSE- ARRÊT JOURNAL LIBERTÉ (J14/4/2022)- DÉCLARATION
ISSAD REBRAB
Chers collègues, chers
amis, chers lecteurs et chers concitoyens.
C'est avec beaucoup d'émotion que je m'adresse à vous aujourd'hui. J'ai passé
près de 30 ans de ma vie à vos côtés à travers ce journal, et en dépit des
moments difficiles que nous avons pu traverser, je peux affirmer que j'ai vécu
cette période avec beaucoup de plaisir.
Ma décision d’arrêter le journal Liberté a soulevé une vague d’émotion et de
protestation. Je comprends le sentiment de ceux, si nombreux, qui refusent de
consentir à l’extinction d’un support dévoué de la liberté d’expression, d’une
citadelle de lutte démocratique et d’un témoin qui a accompagné, jour après
jour, un long épisode de l’Histoire récente de notre pays.
Aux concitoyens et amis du journal ayant exprimé leur souhait de voir sa
parution se poursuivre et à ceux n’en ayant pas compris les motifs, je confirme
que sa situation économique ne lui permet qu’un court et vain sursis. Ce
quotidien d'information a été proposé à la vente mais il a été victime, comme
beaucoup de supports de presse, de l’évolution mondiale des comportements des
lecteurs qui s’oriente vers la presse électronique. Le problème procède autant
de l’état général récessif de la presse papier que du contexte commercial qui
prive le journal de la contribution de vitales annonces publicitaires et de
l’amenuisement accéléré du lectorat. Depuis un temps, le journal est distribué
à perte. Et la perspective n’est point encourageante. La décision est aussi à
replacer dans un contexte plus large d’évolution dans l’organisation des
activités que j’ai, jusqu’ici, initiée et dirigée.
Depuis plus d’une année, j’ai placé le groupe Cevital
dans une perspective d’un nouveau départ devant faire suite à mon retrait de la
vie active que mon âge a rendu nécessaire et que j’annoncerai prochainement.
Les modestes réalisations dont je suis l’initiateur et le promoteur m’ont
demandé une vie d’efforts et de sacrifices. Au moment où je prends enfin une
retraite effective, j’ai voulu faire en sorte que la relève qui me succédera
puisse se consacrer au seul impératif de développement des activités
industrielles du groupe, libérées des contraintes particulières de gestion
d’une entreprise de presse.
C’est au demeurant le souhait légitime de mes successeurs. Au moment où prend
fin l’exaltante aventure collective autour de Liberté, je tiens à saluer le
geste de nombreux intellectuels, femmes et hommes politiques, de lettres et de
culture qui ont appelé à sa préservation. Ce quotidien a été une belle
aventure, enrichissante et fructueuse pour tous ceux qui ont contribué à son
élaboration. Il a su porter le combat pour la défense de toutes les libertés.
La multitude de sujets qui ont été traités dans les rubriques phare du
quotidien a permis de diffuser des informations capitales à grande échelle,
touchant un large public.
Je tiens particulièrement à exprimer ma reconnaissance aux générations de
lecteurs de Liberté qui, par leur présence, lui ont constamment donné sa raison
d’être et, dans les moments les plus difficiles, lui ont fourni la meilleure
raison de résister et de persévérer.
Je tiens aussi à rendre hommage aux générations d’employés qui y ont
successivement partagé l’exigeante tâche de confection quotidienne du journal
et fait de lui l’œuvre impérissable qu’il est.
Je m’incline devant la mémoire de ceux d’entre eux qui, sous les balles
assassines du terrorisme, ont payé de leur vie la cause de progrès et de
démocratie qu’il a toujours défendue. J’ai une pensée attristée pour d’autres
parmi eux qui ont eu à subir l’épreuve imméritée de la prison. Je remercie
enfin les différents partenaires, annonceurs, imprimeurs et diffuseurs qui ont
participé à sa réalisation.