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Consulting (France) (II/II)

Date de création: 18-03-2022 16:39
Dernière mise à jour: 18-03-2022 16:39
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COMMUNICATION- FORMATION CONTINUE- CONSULTING (France)(II/II)

Qui sont les consultants et pourquoi l’Etat fait appel à eux, en 7 questions

Par Manon Romain/www.lemonde.fr, jeudi 17 mars 2022

5 – Quelle est la plus-value des consultants ?

Les consultants sont prisés pour leurs capacités à réunir, synthétiser et analyser un grand nombre d’informations de façon très efficace. A la faveur des moyens alloués par leur cabinet, ils peuvent avoir un accès privilégié à des ressources spécialisées, ou faire appel à des experts extérieurs pour certaines analyses.On justifie aussi le recours aux consultants par leur positionnement extérieur, qui leur permettrait de formuler des avis plus neutres que les personnes directement impliquées. Daniela Restrepo ajoute que « ce qui se vend, c’est surtout l’expérience des consultants qui ont vu des centaines d’entreprises dans des cas similaires ». Dans certains cas, le recours au conseil est plus politique. « Avoir un rapport de McKinsey ou du BCG qui accrédite sa position fait toujours bon effet en conseil des ministres, relève Benjamin Polle, journaliste pour le site spécialisé ConsultorEt cela permet aussi de se dédouaner en cas d’échec de la politique conseillée. »

6 – Combien ces missions de conseil coûtent-elles ?

Il est difficile de chiffrer le coût total d’une mission. Selon sa durée et le niveau d’expertise requis, il peut aller de quelques milliers d’euros – comme cette mission de Deloitte pour l’agence régionale de santé (ARS) d’Auvergne-Rhône-Alpes – à plusieurs millions d’euros – comme cette mission de 10 millions d’euros d’EY pour accompagner la direction informatique de Pôle emploi.D’après les éléments transmis par le gouvernement à la récente commission d’enquête sénatoriale, la journée d’un consultant dans le public est facturée en moyenne autour de 1 500 euros TTC, même si le tarif peut bondir chez les cabinets les plus prestigieux (3 352 euros TTC par jour et par consultant pour une mission de Roland Berger, par exemple). A titre de comparaison, la commission estime qu’un fonctionnaire de catégorie A+ coûte en moyenne 362 euros TTC par jour à l’Etat.

7 – Qui sont les consultants ?

Au sein des grands cabinets de conseil, le pouvoir se concentre dans les mains des partners ou « associés », qui dirigent et possèdent collectivement l’entreprise. Les cabinets s’organisent ensuite par strates hiérarchiques, selon l’expérience.Dans les cabinets les plus prestigieux, on ne recrute que dans les meilleures grandes écoles (HEC, Sciences Po, Polytechnique, etc.), avec un processus très sélectif : « Il y a jusqu’à huit entretiens différents, où on teste non seulement leurs capacités quantitatives, mais aussi relationnelles », relate Benjamin Polle :

« Vont-ils savoir adopter le bon ton, la bonne manière de parler, de se présenter ? Il faut avoir les codes. »

Daniela Restrepo note toutefois que les cabinets « s’ouvrent de plus en plus aux profils atypiques », comme le sien – elle a suivi une formation de philosophie à l’Ecole normale supérieure avant d’intégrer EY. On recherche avant tout des personnes capables de synthétiser rapidement des situations très complexes dans des domaines nouveaux.Ces jeunes diplômés à la tête bien faite mais avec une formation généraliste sont attirés par la diversité des missions proposées qui leur ouvrira les portes des industries de leur choix : « C’est la classe prépa de la vie professionnelle », résume Benjamin Polle. Les cabinets offrent aussi une rémunération très avantageuse, autour de 60 000 euros brut annuels en sortie d’école, en augmentation ces dernières années. Quelques-uns de ces « juniors » passeront au niveau supérieur, dans un écosystème très stratifié, avec une rémunération et un niveau de responsabilité croissant rapidement. D’autres sont recrutés par les clients qu’ils servaient en tant que consultants. Ce processus d’écrémages successifs s’accompagne d’une spécialisation progressive vers un domaine – énergie, santé, grande distribution, etc. – ou un champ d’expertise technique – restructuration des entreprises, finances, achat-vente d’entreprises, etc. Les cabinets recrutent parfois aussi en externe, en débauchant des profils très expérimentés. Dans le privé, il n’est pas rare que les cabinets profitent d’une crise dans une entreprise pour reprendre les dirigeants en partance. Dans la sphère publique, nombre de hauts responsables se sont recyclés dans le conseil privé, à l’image du général Pierre de Villiers, recruté par BCG après sa démission de l’armée, ou d’Axelle Lemaire, l’ancienne secrétaire d’Etat chargée du numérique, qui avait rejoint Roland Berger en 2018. A l’inverse, beaucoup d’anciens consultants irriguent la sphère politique, notamment dans la majorité macroniste, comme l’a documenté le site Consultor. C’est notamment le cas des députés La République en marche (LRM) Pierre Person et Pacôme Rupin. Plusieurs consultants de haut niveau, comme Karim Tadjeddine (McKinsey), s’étaient par ailleurs investis dans la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron en 2017.

« Consultocratie » : un quinquennat de conseils

Invisibles, mais omniprésents, quelle est l’influence réelle des consultants privés dans la conduite des affaires de l’Etat ? C’est la question que s’est posée la commission sénatoriale sur l’influence des cabinets de conseil sur les politiques publiques, qui rend son rapport le 17 mars. Parallèlement, Le Monde a mené sa propre enquête, fondée sur des témoignages, des sources ouvertes et des demandes d’accès à des documents, pour tenter de mesurer l’impact de ces cabinets sur le quinquennat d’Emmanuel Macron.