HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH-
ROMAN MOHAMED ABDALLAH- « LE VENT A DIT SON NOM »
Le
vent a dit son nom. Roman de Mohamed
Abdallah. Apic Editions, Alger 2021, 260 pages, 900
dinars
D’abord
, le titre, assez original et
démontrant une certaine recherche culturelle et historique, ce qui n’est pas
rien en cette période : C’ est, dit-il,
« une référence aux vers de Rimbaud commençant par «Le vent a dit
le nom d'un nouveau Jugurtha» et censés rendre hommage au célèbre roi numide
tout en suggérant un possible parallèle avec l'Émir Abdelkader. En choisissant
ces mots comme titre d'un roman parlant de l'engagement d'intellectuels, de militants
algériens à la veille du déclenchement de la guerre de Libération nationale, je
voulais reprendre possession de cette Histoire et du récit qui en est fait.
J'ai cherché à la ramener à un contexte algérien, à montrer un monde où le
discours sur l'Algérie revient progressivement entre les mains et sous les
plumes de ses enfants ».
Ensuite le
contenu : Un quartier d’Oran , la Mauresque, l’Impasse
des artisans, le café Medioni….au cœur de la ville indigène. Et, bien
d’autres espaces symboles de tout un
pays en agitation, avec
des vies parfois sinon souvent
difficiles qui avancent, de l’enfance innocente à la prime jeunesse avec ses
doutes et ses interrogations jusqu’à l’âge adulte , celui de l’engagement . La
fin des années 40, et le début des années 50, une période charnière de l’Histoire du pays,
avec un monde ancien , en apparence
soumis, qui se meurt et avec un nouveau monde qui, pour beaucoup, tarde à
naître et qu’il faut renverser.
Une
foule de personnages se rencontrant, se liant d’amitié, échangeant les idées et
les expériences…..Un enfant, un traducteur, un
activiste, une exilée….Anir, Aomar, Shanez, Said, Aomar, Kamal, Noreddine, Abdou, Nanna la grand-mère, Tassadit, Damia….mais aussi le Père Clément, Edward, Roth, Simone,
déjà des justes…..toutes et tous aux
vies et histoires s’entrecroisant et naviguant dans un océan d’éveil des consciences pour la liberté des
hommes et du pays .
Mais ,aussi, une foule
d’interrogations….sans conclusions
définitives et absolues. Surtout des pistes de réflexion que les personnages en
scène cherchent à explorer pour mieux exploiter leur futur. Car novembre 1954 n’est pas loin , il est déjà là…..disant
son nom.Un bouleversement sec , abrupt, sans ambiguité.
Liberté ! Libération !
Au passage, le texte, en revisitant
une période charnière de l'histoire algérienne, rend hommage à des symboles
majeurs de la culture et de l'engagement dans notre pays. Ce qui donne au roman
un air « dibien » .En
tout cas , la volonté y est. L’appréciation finale appartient aux lecteurs.
L’Auteur :Mathématicien
de formation, né en 1997 à Tlemcen. Déjà auteur de trois romans :
« Aux portes de Cirta » en 2019, « Souvenez-vous de nos sœurs de
la Soummam » en 2018 et « Entre l’Algérie et la France
, il n’y a qu’une seule page », en 2017.Il a même publié , en
2020, à l’occasion du centenaire de la naissance de Mohammed Dib, un roman sur
l’auteur de « La grande maison », intitulé « Le petit
Tlemcénien »
Extraits : « Taos
n’avait que faire des théories élégantes et des nobles idéaux ; elle ne
voyait que la réalité dure et injuste qui lui était imposée.Il n’y avait pour elle qu’un seul triptyque
qui vaille la peine d’être défendu : liberté, liberté, liberté. »(p52), « La poésie n’avait pas à se préoccuper des
gloires nationales, mais devait plutôt aider le poète à sonder ses entrailles,
à pénétrer dans les plus intimes de ses sentiments, à formuler ses mots avec
grâce avant de les offrir aux autres » (p65), « Si pour certains les
événements du 1er novembre sonnaient comme un coup de tonnerre, pour
d’autres, ils annonçaient un aboutissement prometteur » (p165)
Avis :
Au départ, on pensait qu’il était un « Ovni » dans le paysage
littéraire national.En fait,
c’est un jeune écrivain « hors du champ » , réécrivant les pages de l’histoire
(lointaine ou proche) du pays. Pour mieux expliquer le présent ? Un
mélange des temps qui ne facilite pas la lecture.
Citations : « Lire,
et encore plus écrire, c’est rentrer dans un monde qu’on fait sien, et ne pas
avoir peur de le dire lorsqu’un géant est injuste » (p 40), « Le
savoir est quelque chose que nous devons manier avec prudence, surtout lorsque
des étrangers viennent y glisser leurs mensonges et les faire passer pour une innocente vérité » (p
45) , « Les cafés…..Remplis de monde.Tant
de personnes ici mais, dans le pays, personne !C’est le problème de notre
pauvre Algérie.Comme nous perdons notre temps à
palabrer … »(p100)