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Football/Afrique/Coupe du monde

Date de création: 16-02-2022 19:32
Dernière mise à jour: 16-02-2022 19:32
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SPORTS -ETUDES ET ANALYSES- FOOTBALL/AFRIQUE/ COUPE DU MONDE (I/II)

Une étude de Harvard explique pourquoi aucune équipe africaine n’est prête à remporter la Coupe du monde de football

© Servan Ahougnon/Agence Ecofin.com, samedi 12 février 2022

En mars 2021, Patrice Motsepe, le président de la Confédération africaine de football avait insisté sur le fait qu’une équipe africaine devait gagner la Coupe du monde dans un futur proche. Cette sortie intervient 51 ans après une déclaration similaire du roi Pelé, légende de ce sport, et 7 ans après celle de l’ancienne star de l’équipe nigériane Jay Jay Okocha. Pour lui, une victoire africaine en Coupe du monde était imminente.

Ce 06 février, l’Afrique et les fans de football du monde entier avaient les yeux rivés sur la finale de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN). Point d’orgue d’une compétition ayant déchaîné les passions, le match opposant le Sénégal et l’Egypte s’est achevé sur une victoire des Lions de la Teranga. L’équipe sénégalaise, qui jouait sa 4e finale, a remporté le trophée pour la première fois, face à l’Egypte, nation la plus titrée de la compétition avec 7 CAN remportées. Ce match de cadors de la scène africaine, plus qu’une simple finale, servait également de jauge pour les observateurs du football, voulant évaluer le niveau des meilleures équipes du continent à l’approche de la Coupe du monde 2022. En effet, comme souvent, l’Afrique espère de bonnes prestations de ses représentants. Pourtant, lors de la précédente édition de la compétition, survenue en 2018, les parcours africains étaient loin d’être les meilleurs de l’histoire du continent. Toutes les équipes du continent ont été éliminées dès la phase de poules, y compris l’Egypte et le Sénégal, protagonistes de la finale de ce 06 février. En 2010, après la qualification du Ghana pour les quarts de finale, faisant du pays le 3e représentant africain à se hisser à ce niveau, après le Cameroun en 1990 et le Sénégal en 2002, de nombreux experts prédisaient de belles performances pour le football africain au niveau mondial dans les années qui suivraient.

Ce sentiment était renforcé par le fait que le Ghana avait été Champion du monde des moins de 20 ans en 2009. L’édition suivante, en 2014, aucune équipe ne dépasse les huitièmes de finale. La situation a attiré l’attention de chercheurs de l’université américaine d’Harvard qui ont décidé de réaliser une étude sur la possibilité des nations africaines de remporter une Coupe du monde. Au final, une nation africaine est-elle proche de remporter le trophée le plus convoité de ce sport ?

Le niveau de compétitivité a augmenté mais est encore loin de celui des meilleures nations : Le premier constat apporté par l’étude est que malgré une augmentation du niveau de compétitivité des nations africaines, elles sont encore loin du niveau des nations ayant déjà remporté la Coupe du monde. Pour parvenir à ce constat, les chercheurs d’Harvard ont analysé les performances des meilleures équipes africaines entre 1970 et 1979, avant de les comparer aux performances affichées entre 2010 et 2019. Les meilleures nations africaines de football ont été identifiées sur la base des classements moyens de la FIFA au cours des 5 dernières années, et des pays ayant participé à la Coupe du monde dans les années 2010.

Cette méthode permet de classer l'Algérie, le Cameroun, l’Égypte, le Ghana, la Côte d'Ivoire, le Maroc, le Nigeria, le Sénégal, l’Afrique du Sud et la Tunisie comme les meilleures nations africaines de football, sur la base de leurs performances. En observant les deux figures, on se rend compte que l’indice de compétitivité des nations africaines a comblé une partie de son retard sur les meilleures nations du monde.

Mais, malgré ce progrès, les performances des nations africaines les placent encore dans la moyenne au plan mondial en termes d’indices de performances. En tant que participants à la Coupe du monde, les pays africains passent d’indices variant entre 25 et 45, entre 1970 et 1979, à des indices allant entre 43 et 57, entre 2010 et 2019.

En tant que concurrentes pour le trophée, les indices de performances des pays africains étaient entre 23 et 56 de 1970 à 1979. Ils passent entre 39 et 62 pour la période 2010-2019. La compétitivité africaine au niveau mondial du football a donc augmenté.

Mais les meilleures nations du monde, ayant déjà remporté le trophée ou susceptibles de le gagner, ont fait davantage de progrès. L’indice de concurrence des meilleures nations de la Coupe du monde se situait entre 57 et 79 sur la période 1970, 1979. Sur la période 2010-2019, il est entre 67 et 90. Performances des meilleures équipes africaines en Coupe du monde entre 1970 et 1979 (source Harvard ; Can Africa Compete in World Soccer)

Pour faire simple, en termes de concurrence pour remporter la Coupe du monde, les équipes africaines ont progressé, mais les meilleures nations du monde encore plus.

Entre 1970 et 1979, l’écart entre le plus haut niveau de compétitivité africain et le plus haut niveau mondial était de 23 unités de performance (plus haut niveau mondial 79, plus haut niveau africain 56). erformances des meilleures équipes africaines en coupe du monde entre 2010 et 2019 (source Harvard ; Can Africa Compete in World Soccer)

Entre 2010 et 2019, malgré les progrès africains, l’écart a augmenté et est désormais de 28 unités de performances (plus haut niveau mondial 90, plus haut niveau africain 62). Autrement dit, l’Afrique fait mieux que la période 1970-1979, mais a encore moins de chances de ravir le trophée aux meilleures nations du monde qu’à cette époque.

Les raisons de l’écart entre les performances africaines et celles des meilleures nations : Selon l’étude, la principale raison pour laquelle la compétitivité des équipes africaines augmente n’a rien à avoir avec le talent. Pour le prouver, les chercheurs comparent les résultats de la Tunisie et de la France. « Les observateurs de la Tunisie attribuent les performances des années 70 à une génération dorée, notamment Mokhtar Dhouib, Néjib Ghommidh, Raouf Ben Aziza et Tarak Dhiab. Ils ont fait de la Tunisie un potentiel vainqueur de la Coupe du monde. L'ascension de la France au début et au milieu des années 1980 a également été attribuée à une génération dorée comprenant des joueurs comme Tigana, Platini, Giresse et Genghini qui formaient ce que certains appelaient le carré magique », peut-on lire dans l’étude. Pourtant, la France a remporté deux coupes du monde et la Tunisie aucune. Pour les chercheurs d’Harvard, la différence entre les deux équipes s’est faite au niveau des adversaires qu’ils ont affronté depuis leurs débuts sur la scène internationale. « L'expérience de la France, qui est sortie de la période décevante du début de l'ère industrielle, est révélatrice d'une telle stratégie. L'équipe nationale a disputé quarante matchs contre les 10 meilleures nations du monde au cours des six années qui ont suivi la création de l'équipe nationale. Elle a participé à 34 autres rencontres de ce type entre 1984 et 1989. Cet accent mis sur la qualité de la compétition a permis à la France de faire passer son score de 43 à 73 en une décennie », explique l’étude. « Contrairement à la France, la Tunisie n'a disputé que 13 matches contre des pays de haut niveau dans les années 1970 et 1980 et n'a pas augmenté son exposition à ce type d'opposition au cours des décennies suivantes. Le taux de victoire de la Tunisie contre l’élite du football est passé de 25 % pendant la période de la génération dorée à 18 % au cours des dernières décennies, bien en deçà du taux français de 67 % ».

Pour les chercheurs de l’étude, le niveau de l’adversité rencontré par les pays africains est la principale raison de leurs échecs en Coupe du monde. « L’Égypte a participé à dix des treize dernières phases finales de la CAN en remportant 4 trophées et en terminant 2e deux fois. Pourtant, le pays a perdu les trois matchs qu'elle a disputés lors de la phase finale de la Coupe du monde au cours des 30 dernières années », peut-on lire dans l’étude.