HISTOIRE- GUERRE DE LIBERATION
NATIONALE- GREVE DES 8 JOURS (1957)
©Mohamed Bouraib/El Moudjahid, samedi 29/1/2022
Le Comité de coordination et d’exécution (CCE), créé juste
après le Congrès de la Soummam, le 20 août 1956, dont la mission consistait à
superviser la Révolution dans son intégralité et de veiller à l’application des
décisions du Conseil national de la Révolution algérienne, (CNRA), décide
d’organiser une grève de 8 jours, (du 28 janvier au 4 février 1957).
L’objectif est de démontrer au monde entier le caractère populaire de la
Révolution, que le peuple est totalement acquis au FLN et qu’il est prêt à se
mobiliser autour de lui pour arracher l’indépendance. Le succès de cette vaste
initiative politique répondra aux déclarations des forces coloniales, dont
l’argument principal était de faire passer le FLN comme minoritaire, que les
Algériens seraient attachés à la France et souhaitent son maintien.
Plusieurs semaines avant le jour J, le mot d’ordre est lancé à la population et
les familles doivent s’approvisionner en denrées de première nécessité pour
tenir une semaine.
Larbi ben M’Hidi et
le CCE. avaient publié plusieurs tracts annonçant
l’épreuve de force : «Durant les journées de grève, ne circulez pas dans la
ville européenne. Ne sortez pas de la Casbah. Evitez tous les rassemblements en
des lieux clos, ils pourraient faciliter des rafles éventuelles. Hébergez dans
vos propres maisons les pauvres, les mendiants, les frères sans logis».
Le jour convenu, le pays tout entier est
mobilisé. Les PC des régiments de parachutistes et l’état-major, accomplissent
une grande opération antigrève à la première heure, notamment dans la Casbah
d’Alger, avec un seul but : faire sortir les Algériens, ouvrir les boutiques
par la force, emprisonner, réprimer.
Alger, citadelle de la résistance
Le 7 janvier 1957, le général Massu rentre
dans le vieux palais d'Alger où il a installé son état-major. L'arrêté que
vient de lui remettre le préfet Serge Baret, sur ordre du ministre résidant en
Algérie, Robert Lacoste, transfère au patron de la sinistre 10e division
parachutiste, l'ensemble des pouvoirs. Des milliers de parachutistes investissent
la ville pour combattre les moudjahidine et tous ceux qui soutiennent le FLN.
Une sale besogne que le pouvoir politique confie aux militaires qui vont
exercer une répression impitoyable sur les patriotes algériens et sur la population
dite «musulmane».
Les méthodes employées sont radicales. Le
général Paul Aussaresses racontera, dans ses sombres
mémoires, comment, alors commandant, il pénètre mitraillette au poing, dans les
locaux de la police et rafle les fichiers de l'ensemble des Algériens susceptibles,
de près ou de loin, d'aider le FLN. S'ensuivent les arrestations, la torture,
les exécutions sommaires… À lui seul, à la tête de son escadron de la mort, il
avouera avoir tué de sa main 24 Algériens. Pour l’histoire, rappelons que
le secrétaire général de la préfecture d'Alger, Paul Teitgen,
démissionne. La liste des disparus qu'il a réussi à tenir, compte plus de 3.000
noms, chiffre que validera Aussaresses «Oui, cela doit correspondre à peu près à la réalité. «Teitgen avait en effet découvert
qu'on le roulait dans la farine depuis longtemps. Je lui faisais signer des
assignations à résidence, ce qui permettait d'enfermer les personnes arrêtées
dans des camps (…). En fait, on exécutait ces détenus, mais Teitgen
ne s'en est rendu compte qu'après coup. »
Guy Mollet, le président du Conseil avait
choisi de faire la guerre au FLN. Vote des pouvoirs spéciaux qui permettent,
entre autres, les perquisitions de jour comme de nuit, l'envoi du contingent,
les premières exécutions capitales de militants du FLN.
Les émigrés répondent à l’appel
Mohamed Lebdjaoui,
premier responsable de la fédération de France du FLN. (à
la fin de 1956), membre du premier CNRA, issu du congrès de la Soummam, s’est
rendu en France début janvier 1957 sur décision du CCE.
Abbane Ramdane lui donne
instruction de préparer l’émigration à la grève. C’est la première bataille
politique décidée par le CCE, menée en Algérie et en France.
Les émigrés structurés au sein de la
Fédération de France du FLN, vont paralyser l’industrie et toutes les activités
économiques françaises ; ce qui permettra de sensibiliser l’opinion française
et internationale sur la guerre menée par le colonialisme français contre la
Révolution algérienne. Lors de sa XIe session, le 15 février 1957, l’ONU
déclare que l'Assemblée générale, ayant entendu
les déclarations des diverses délégations et discuté la question algérienne,
exprime l'espoir d’une solution juste par des moyens appropriés, conformément
aux principes de la Charte des Nations unies. Le 17 septembre 1957,
l’organisation onusienne met à nouveau l'Algérie à l'ordre du jour de sa XIIe
session ; l'Assemblée générale réaffirme, le 11 décembre 1957, la nécessité
pour tous les pays (ce qui est un message clair adressé à la France) de faire
respecter le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Le ministre des Affaires
étrangères, Christian Pineau a, devant la commission politique de l'ONU, rejeté
la compétence de l'ONU.
En conclusion, cette grève générale marque
l’un des plus grands moments de l’Histoire de l’Algérie.
L’action qu’a lancée le FLN, est largement
médiatisée sur le plan international. Désormais nul ne pouvait douter de ce que
le peuple algérien veut, revendique et exige haut et fort. Depuis ce coup
d’éclat, le chemin vers la liberté a été long et semé de difficultés.
Le cessez-le-feu n’interviendra que dans cinq
longues années durant lesquelles d’autres actions de lutte devront être
accomplies pour concrétiser le rêve d’un peuple.