VIE POLITIQUE-
BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI ALI GUENOUN- « LA QUESTION KABYLE DANS LE
NATIONALISME ALGERIEN.1949/1962 »
La question
kabyle dans le nationalisme algérien .1949-1962. Essai de Ali Guenoun (préface d’Omar Carlier .Postface
de Mohammed Harbi). Casbah Editions, Alger 2021, 1300
dinars
En fait, c’est là le fruit d’une thèse de
doctorat en histoire soutenue en septembre 2015…..ce qui fait sa consistance et
sa richesse.D’emblée, l’auteur avertit les lecteurs
(certains) qui ont fait part de leur perplexité sur le choix du titre.Pourquoi « La question kabyle » et pas
« La question berbère »….Pour lui, le titre est uniquement motivé par
un souci de rigueur analytique car les « acteurs de la crise stigmatisés
comme berbéristes venaient tous de Kabylie et d’aucune région berbérophone d’Algérie ».Une
argumentation qui se tient…..mais qui, quand même, laisse « perplexe » le commun des
lecteurs.
Le travail de recherche a porté sur deux
aspects et deux moments de la lutte des nationalistes algériens pour
l’indépendance du pays.L’un
se rapporte à la crise dite « berbériste » de 1949, au sein du Ppa, suscitée par la définition même de la nation
algérienne ; l’autre à la montée en puissance de la wilaya III et de son
chef Krim Belkacem au sein du Fln et de l’Aln. Sans
oublier la période intermédiaire 50-54 qui sépare la « crise » de
l’insurrection du 1er novembre et en conditionne la préparation.
Une première partie qui débute à la fin de la
seconde guerre mondiale…..avec une période charnière
d’après-guerre pleine de douleurs (massacres de mai 1945) et d’espoirs d’une libération proche.
L’émergence de jeunes militants qui vont impulser au Ppa
clandestin une dynamique jamais connue. Des sigles de partis et des noms de
militants (dont « le Groupe de Ben Aknoun ») , parfois contestataires (mais non opposants) , et
désignés (par les moyens de propagande du parti) comme « berbéristes » alors qu’ils posaient seulement des questions
nationales
Une seconde partie aborde la période de la
guerre entre 1954 et 1962….qui va voir la région de
Kabylie s’imposer comme une région-pivot dans la lutte pour la libération du
pays….avec un Fln/Aln qui n’admettait pas de voix
discordante ou supposée l’être .Le discours contre les anciens contestataires
de 49 est, selon le chercheur, « réactivé ». Pour lui, « force
de constater que cette conflictualité se perpétue dans un contexte nouveau où
les protagonistes étaient armés ».
L’Auteur : Natif de Kabylie
maritime, trilingue (arabe, kabyle, français) , études
supérieures à Alger puis à Paris.
Docteur en histoire (Paris I, Panthéon -Sorbonne).Déjà
auteur d’un ouvrage : « Chronologie du mouvement berbère.Un
combat et des hommes » (Casbah Editions, 1999)
Table des matières :Sigles et
abréviations /Avertissement/ Préface/ Introduction/
Première partie : La crise de 1949 (huit chapitres)/Deuxième partie :
Des usages de la reéférence « kabyle » dans
la guerre d’indépendance (cinq chapitres)/Conclusion/ Postface/Fiches
biographiques (34) / Annexes/Bibliographie/ Index (personnes citées)
Extraits : « Mohamed Harbi est le premier auteur à mettre des noms sur les
militants de l’Algérie algérienne-des autres militants nationalistes aussi -et
à présenter leurs parcours.Il se démarque, ainsi, de
l’histoire officielle qui a pris le soin de gommer les noms d’acteurs » (p
43), « Le manque de documents nous empêche d’avancer une date précise du
début de la crise (« berbériste ») , mais nous pouvons la situer au
début du mois de mars 1949 au plus tard » (p153), « Pour Abane, le moment de discuter de l’identité amazighe n’était
pas encore venu.C’était, pour lui, un sujet diviseur
au moment où il fallait se consacrer à la lutte pour l’indépendance du
pays » (Témoignage, Belhocine, M. p 163). « La
mémoire a retenu, dans la plupart des cas, moins les événements eux-mêmes que
les représentations imaginaires qu’ils font naître- dimensions imaginaires dans
lesquelles le poids du traumatisme, du passionnel et de l’émotif est très
important » (p250) », « La crise de 1949 a été vécue comme une fin de
non-recevoir à l’ensemble des réflexions sur le devenir du nationalisme
algérien et sur la définition de la nation.Ce courant
désigné comme déviant est rejeté hors du parti comme menace à l’unité
sacralisée (….).La crise de 1949 résolue avec une violence verbale et physique
restera vivante dans la mémoire des militants.Les
idées développées en 1949 connaîtront un cheminement souterrain pour
réapparaître avec une nouvelle élite à l’indépendance de l’Algérie « pp
410-411)
Avis :D’abord ,en empruntant au préfacier, c’est là un « choix
courageux qui aborde directement une question difficile car se prêtant aux
passions, jusqu’à aujourd’hui ».Ensuite, pour suivre le postfacier, c’est là « un livre « indispensable
pour modifier notre vision de la crise de 1949 et (qui) change notre regard sur
les questions régionales dans l’ensemble algérien ……Il a rendu à la
mémoire algérienne une histoire enfouie». Pour ma part, une thèse très
(trop ?) riche en détails et en « révélations », mais non exempte aussi de……….. prise(s)
de position.Il est vrai que la couleur était annoncée
en introduction : « Notre démarche a été guidée par la question
de savoir comment le référent kabyle est devenu un paramètre important ,
pertinent, de l’histoire politique contemporaine et du nationalisme radical
et indépendantiste… ».C’est tout dit.
Citations : « Il ne
suffit pas d’accumuler du « matériel », il faut en établir la
fiabilité et objectiver le sens » (Omar
Carlier, préface, p 17) , « L’intérêt régional
renforce l’identification à la nation
qui ,elle seule, est capable de développer la région » (p 412)