HISTOIRE
– PERSONNALITES- GHENASSIA PIERRE
Pierre Ghenassia (dit Pierrot…..et
« El Hadj » au maquis dura,t la guerre de
libération nationale ) est né le 24 juillet 1939 à Ténès, d’un père
fonctionnaire des impôts et d’une mère bijoutière.
Mais comme bien
d’autres juifs de la petite commune de Ténès, sa famille a de bonnes relations
avec son entourage musulman. Surtout, le jeune Pierre est influencé par des
discussions avec son voisin communiste, le docteur Jean Massebœuf,
et avec son cousin Jean-Pierre Saïd,
Membre de la
délégation algérienne du Festival mondial de la jeunesse de Varsovie à l’été
1955, il fréquente fin 1955-début 1956 des communistes algérois engagés dans la
lutte armée, comme Abdelkader Choukal et Georges
Marcelli.
Quand l’Union générale
des étudiants musulmans algériens (UGEMA) déclenche en mai 1956 une grève
illimitée des cours et des examens, il déserte le lycée Bugeaud comme de
nombreux jeunes qui iront grossir les maquis de l’ALN.
Il rejoint la Wilaya
IV, où il remplit plusieurs fonctions, dont celle d’infirmier. Son chef, le
commandant de l’ALN Si Azzedine, écrira en 1976 :
« Parmi [les
infirmiers et médecins], l’une des figures les plus attachantes fut celle de
notre infirmier zonal, Hadj. Nous l’appelions ainsi, mais son vrai nom était Ganacia .
Il était juif, parlait
très bien l’arabe. Pour tous ceux qui tiennent comme un fait établi le prétendu
antagonisme de nos origines religieuses, je voudrais qu’on le sache : Hadj est
mort, refusant d’abandonner ses blessés. C’était un frère et nous l’avons pleuré.A Boukren,
il sauva Boualem Oussedik de la gangrène. […] Hadj
est mort à Tiberguent, en défendant une infirmerie et
les blessés dont il avait la responsabilité. »
Comme dans les tracts
de l’ALN adressés aux juifs algériens où Pierre Ghenassia
est honoré dès 1957 comme un exemple à suivre, le commandant Azzedine insiste
sur la judéité du jeune homme, tant il a conscience d’être face à un exemple
exceptionnel – si ce n’est unique. Il met aussi l’accent sur son arabité.
Voici une des lettres
qu’il a envoyées à ces parents le 03 février 1957
Chers Parents
J’emprunte cette fois
ci l’organisation du maquis pour vous faire parvenir de mes nouvelles qui sont
excellentes. En ce moment je me remets très vite dans une infirmerie d’une
petite affection intestinale. Je vais déjà très bien. Cela fait déjà trois mois
que je vous ai quittés et je n’ai pas vu le temps passer. Bien des aventures me
sont arrivées mais celles-ci je me réserve de vous les conter après
l’indépendance In challah.
Je milite depuis au
milieu de millier de jeunes qui comme moi ont rejoint le maquis et dans un
magnifique élan d’enthousiasme tendent tout leur être vers la réalisation de
leur idéal. Un véritable esprit Révolutionnaire existe et nous marchons
infailliblement vers la liberté. Je suis pour le moment assez loin de vous mais
je pense peut-être revenir dans nos parages. Et vous comment allez-vous ?
Anne-Marie travaille-t-elle toujours aussi bien en classe. Et la 203 se
porte-elle toujours aussi bien.
Nous avons ici un
excellent moral car nous sommes sûrs en considérant tous les symptômes
politiques que l’issue est proche. J’ai été affecté au service de presse de la
wilaya et j’ai dernièrement fait, armé d’un appareil de photos, une enquête sur
les atrocités des Nazis Français dans un douar particulièrement éprouvé. J’en
été écœuré.
« Ici vois-tu, l’on
sue et l’on crève » comme dit la chanson. On ne se lave pas souvent non plus et
on a des poux : mais cela fait rien on a tout accepté.
J’ai appris par les journaux que l’organisation de Tenes
avait été décapitée. J’ai fui à temps.
Bon je crois que je
vous ai assez rassuré comme cela. Je vous quitte en vous embrassant affectueusement.
A bientôt dans une
Algérie libre et indépendante.
Pierre – dit « El Hadj
».
Il tomba aux champs
d’honneur pour l’Algérie trois mois plus tard dans une attaque de l’armée
française, le 22 février 1957, à l’âge de 17 ans.
Une rue porta son nom
à Ténès mais elle fut « rebaptisée » durant les années1990 par l’APC de l’époque