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Journal/Contenu/Agenda (II/II)

Date de création: 27-02-2021 19:00
Dernière mise à jour: 27-02-2021 19:00
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COMMUNICATION- FORMATION CONTINUE- JOURNAL/CONTENU/AGENDA (II/II)

Il n’y a pas de bon journal sans agenda bien tenu mais l’agenda  n’est pas un livre sacré. Le risque existe même que le journaliste se fasse piéger s’il se laisse imposer la loi de l’agenda par les professionnels de la communication. S’il veut être plus performant que ses confrères, le journaliste doit se montrer exigeant  avec lui-même. Une fois qu’il a réfléchi aux diverses façons de transformer son agenda du jour en sujets rédactionnels, il doit se poser une ultime question : que puis-je faire de plus, ou de mieux, pour que le contenu de mon journal soit meilleur que celui des autres ?   Il existe cinq voies d’excellence qui permettent d’enrichir en permanence ses contenus rédactionnels :

 

1      Varier les formes journalistiques.

 

On renseigne en racontant, c’est la narration.

La Brève est la forme informative minimale. Une phrase suffit pour répondre aux questions élémentaires ( Qui ? Quoi ? Où ? Comment ? ).

Le récit est la forme informative maximale. C’est l’exposé détaillé d’une suite de faits enchaînés l’un à l’autre, dans l’ordre chronologique ou logique, pour transmettre au public ce que l’on sait de l’événement de la façon la plus claire. Une addition de phrases suffit.

 

On renseigne en décrivant, c’est le reportage.

Le reportage est la forme informative optimale. C’est un récit complété par la description des faits rapportés. Cette description ajoute à l’exposé des détails tout ce qui les caractérise: couleurs, sons émotions, témoignages, scènes de vie, scènes de mort, etc. Le reportage donne à voir. Le recours aux adverbes, adjectifs, aux choses vues et entendues, donne aux faits une consistance concrète.

 

On explique en analysant, c’est l’enquête.

L’enquête est la forme informative analytique. Elle donne à comprendre. C’est la décomposition des faits dans leurs éléments constituants. Ce travail d’analyse nécessite une bonne connaissance du sujet à traiter, une documentation appropriée, des sources fiables, des témoignages précis, un temps de réflexion. Il arrive que l’enquête analytique n’explique pas certaines choses à cause de données invisibles, camouflées ou occultées. Le journaliste engage donc des recherches au-delà des données connues. C’est l‘enquête d’investigation, forme  informative la plus approfondie.

 

On explique en faisant analyser, c’est l’interview.

L’interview est un procédé analytique de substitution. Quand le journaliste n’est pas en mesure de fournir lui-même les explications qu’on attend de lui, il sollicite l’avis d’un spécialiste du sujet. L’interview publiée sous forme de questions-réponses est la plus éclairante.

 

On interprète en évaluant, c’est le commentaire.

Il y a plusieurs façons de partager ses réflexions personnelles avec ses lecteurs mais toutes sont des formes de commentaire : billet, chronique, dessin. C’est le lecteur qui, alors,  juge de la pertinence de l’interprétation.

 

On interprète en concluant, c’est l’éditorial.

Si au terme de ses réflexions personnelles le journaliste porte un jugement de valeur sur les faits observés, analysés, évalués, il signe un éditorial. Le lecteur est alors libre d’épouser ou non ce point de vue mais celui-ci, de toute façon, l’éclaire sur la pensée de l’éditorialiste et constitue donc, en soi, une information.

 

2       Varier les formes d’écriture.

L’écriture journalistique est une écriture de précision. Elle est claire, concise. Elle va à l’essentiel, parce qu’elle n’a pas de temps à perdre, mais elle doit être aussi exacte que l’écriture scientifique. Elle va au plus simple parce qu’elle doit être comprise par tout le monde ; mais elle sait être aussi élégante que l’écriture littéraire. Variable selon ses formes d’expressions, l’écriture journalistique n’est pas formatée ; elle a sa propre amplitude. Chaque journaliste doit trouver son style, l’affirmer, singulariser sa production. On y parvient en prenant du plaisir à écrire chaque jour. Il s’agit pour chacun de travailler à rendre unique sa façon de rapporter les images, les sons, les parfums. Le journaliste apprend à écrire comme il respire, en jouant avec les figures de style qui donnent rythme et souffle à l’agencement des idées, des mots et des images.

 

Jouez avec la signification des mots !

Trouvez des analogies appropriées ! Laissez votre imagination dénicher les bonnes ressemblances ! Rien ne vaut une image pour orner un texte. Les légions romaines de Marius sont en marche vers le camp de Jugurtha ?  A quoi ressemblent-elles, les unes derrière les autres, sur la route d’ El Kef ? L’image est immédiate : « les chenilles processionnaires de Marius avancent vers El Kef… ».

 

 Personnifiez les idées abstraites ! Voyez sur les traces de Marius « la Justice poursuivant le Crime... ». Créez de nouveaux types d’individus ! Transformez les noms propres en noms communs : « Désormais, en Tunisie, pour qualifier un héros on dira « un jugurtha » et pour qualifier un vaniteux on dira « un marius » !

 

Exprimez-vous par euphémisme ! Suggérez le plus en disant le moins : « La situation de Marius n’est pas impériale... ». Maniez l’ironie ! Exprimez une idée et son contraire : « Tout ce bel échantillon de la civilisation romaine, à force de déployer son génie militaire, se retrouvera bientôt ensablé dans le désert… ».

 

Jouez avec la position des mots !

Accumulez les mots ! Provoquez des gradations : « Adieu chevaux, chameaux, veaux, vaches, poulets !… ». Ce procédé donne de la nervosité à l’écriture.

 

Produisez des effets d’insistance ! Rythmez votre texte en répétant le dernier mot d’une phrase au début de la phrase qui suit : « Il y avait un légionnaire dans le poulailler. Le poulailler était calme... ». Ou rythmez votre texte en répétant le même mot au début et au milieu de la même phrase : « Le légionnaire était dans le poulailler, le légionnaire était affamé… ». Ce procédé permet aussi des progressions éditoriales : « Puisque Jugurtha est encerclé, puisque Marius se croit tout permis, puisque les droits des habitants de Carthage sont bafoués… », etc.

 

Ornez votre texte d’un « effet miroir » ! Faites en sorte, par exemple, que votre chute soit parallèle à votre accroche : « Son cheval boîte… Son cheval meurt… ».

 

Surprenez le lecteur en bousculant les normes ! Optez pour la rupture dans la construction de vos phrases : « Le nez de Cléopâtre, s’il eut été moins fin, toute la face de l’Egypte aurait changé… ».

 

Jouez avec la musique des mots !

Bâtissez des harmonies sonores ! Faites rimer vos phrases quand le contexte autorise un brin d’éloquence : « Les Carthaginois pourraient s’accommoder de vivre sans bonheur mais jamais ils n’accepteront de vivre sans honneur… ».

 

Glissez un brin de poésie dans votre prose ! Essayez l’allitération qui consiste à répéter le même son : « La muse de César ne s’appelait pas Cambuse par hasard... ». Essayez l’assonance qui consiste  à répéter la même voyelle : «  Veni, vidi, vici... », « Je suis venu,  j’ai vu, j’ai vaincu… ».

 

Faites de beaux articles ! Un bel article, c’est celui qui donne autant de plaisir à son auteur qu’à ses lecteurs.

 

3      Appliquer la règle des quatre « C ».

 La question de savoir comment enrichir ou approfondir le traitement prévu d’un sujet d’actualité débouche toujours sur quatre possibilités : le traitement en contrechamp, le traitement en contrepoint, le traitement en contre-pied, le traitement en contre-écrou.

 

La valeur ajoutée en contrechamp consiste à produire un effet de miroir inversé : on complète le traitement du sujet principal par le traitement du même sujet abordé sous un angle diamétralement opposé. J’ai décidé de  consacrer mon sujet principal au génie militaire d’Hannibal. En contrechamp, je traiterai aussi des servitudes qui en résultent pour le fantassin carthaginois de base.

 

La valeur ajoutée en contrepoint consiste à produire un effet de second plan: on juxtapose le traitement d’un sujet annexe, voire décalé, sur le traitement du sujet principal. J’ai décidé de consacrer mon sujet principal aux problèmes d’intendance que rencontre Hannibal dans ses expéditions. En contrepoint, je ferai le portrait de l’un de ses vaguemestres  chargés de cavaler en autour de la Méditerranée pour informer Carthage des exploits de son héros.

 

La valeur ajoutée en  contre-pied consiste à produire un effet de contraste : à une enquête on oppose une contre-enquête, à un témoignage on oppose un contre-témoignage, à un exemple on oppose un contre-exemple, etc. J’opposerai à mon enquête sur les pratiques esclavagistes des Romains une contre-enquête de mon correspondant à Rome sur les actions humanitaires de la femme de César.

 

La valeur ajoutée en contre-écrou consiste à produire un effet de solidité : on renforce le traitement du sujet principal avec plusieurs apports complémentaires. Je consoliderai mon enquête sur le financement des campagnes d’Hannibal en ajoutant trois éléments informatifs à mon texte principal : une petite interview de son banquier ;  un encadré sur le coût de l’alimentation des éléphants de combat ; un graphique sur l’évolution comparée des dépenses militaires d’Hannibal et de celles de son père Hamilcar.

 

 

4      Pratiquer la relecture obligatoire.

 

Se relire, quand on écrit, c’est une précaution. Quand on est journaliste, cela devient un devoir. Mais il ne suffit pas de relire soi-même ce qu’on écrit pour garantir au lecteur que le texte qu’il lira dans le journal sera irréprochable. Chaque auteur a ses manies, ses tics d’écriture, ses faiblesses. Le journaliste professionnel considère la double relecture comme une discipline impérative. Aucun texte ne doit paraître avant d’avoir été été relu et, au besoin, corrigé par quelqu’un d’autre que son auteur. La relecture est l’ultime valeur ajoutée : non seulement elle corrige mais elle embellit   et bonifie. Cette obligation de la double relecture impose aux rédactrices et rédacteurs l’utilisation quotidienne des dictionnaires, toujours préférables aux logiciels de correction orthographique.

 

5      Soigner la présentation et la mise en « vitrine ».

 

J’écris pour être lu. Si je veux que les acheteurs de mon journal me lisent, je dois attirer leur attention sur mon article. J’y parviendrai si mon article bénéficie d’un bon titre. Qu’est-ce qu’un bon titre ? C’est une invitation. Il doit donner envie. Sa rédaction parachève le travail d’écriture ; elle réclame un soin extrême. Je conçois donc mes titres moi-même. Et comme le meilleur titre est toujours le plus simple, je ne m’encombre pas d’éléments accessoires  quand il suffit d’un titre principal pour tout résumer. Ma préférence va toujours au titre informatif mono-phrasé, celui qui répond en une phrase courte aux deux questions essentielles : « qui » et « quoi » ? : « Hannibal fonce sur Rome ! ».

 

Quant à la mise en page, c’est la mise en « vitrine » de la production rédactionnelle. Objectif recherché : mettre en valeur les articles. Les règles qui s’appliquent sont celles de la composition picturale. Chaque page du journal doit être composée comme un tableau : il s’agit d’assembler autour d’un motif principal des motifs secondaires hiérarchisés. L’ensemble doit être clair, lisible, esthétique.  Il n’y a qu’un seul sujet principal par page. Il occupe la place d’honneur dans le tableau : la tête de page. Il bénéficie du plus gros titre. Mais sa prééminence ne doit ni écraser ni éclipser les autres articles qui ont aussi, séparément, beaucoup d’importance. L’architecte de la page doit rechercher des proportions harmoniques en utilisant toute la gamme de sa palette graphique pour produire les meilleurs effets visuels.