DEFENSE- INFORMATIONS PRATIQUES- ESSAIS NUCLEAIRES
FRANÇAIS EN ALGERIE/CHRONOLOGIE
©Aps, mercredi 10 février
2021
Il y a soixante-et-un ans, la
France faisait exploser sa première bombe atomique dans le Sahara algérien, la
première d'une longue série d'essais nucléaires aux conséquences désastreuses
sur la population locale et sur l'environnement.
Au total, 17 essais nucléaires aériens et souterrains
ont été effectués par la France, entre Février 1960 et Février 1967, dans la
région de Reggane et dans les cavités du massif du
Hoggar.
Le 13 février 1960 à 07h04, la première bombe
nucléaire française dénommée "Gerboise bleue" est mise à feu sur le
site nucléaire de Reggane. D'une puissance de 70
kilotonnes, soit trois ou quatre fois plus puissante que celle larguée par les
Américains sur Hiroshima, la bombe a eu des retombées radioactives plus longues
que prévu.
Un rapport annuel du Commissariat français à l'énergie
atomique (CEA) de 1960 révèle l'existence d'une zone contaminée de 150 km de
long environ.
Un document sur les retombées réelles de cette
explosion, classé secret défense et déclassifié en avril 2013, montre l'immensité
des zones touchées et ce, jusqu'en Afrique subsaharienne, en Afrique centrale
et même en Afrique de l'Ouest. Le nuage radioactif a atteint également les
côtes méditerranéennes de l'Espagne et la Sicile (Italie). Des taux de
radioactivité différents suivant le déplacement des particules de poussière.
Après "Gerboise
bleue", trois autres essais nucléaires atmosphériques ont été effectués à Reggane entre avril 1960 et avril 1961:
-"Gerboise blanche", le 1er avril 1960
-"Gerboise rouge", le 27 décembre 1960
-"Gerboise verte", le 25 avril 1961
L’ampleur des retombées radioactives contraint la
France à abandonner les expérimentations aériennes au profit d'essais
souterrains. Pour ses nouvelles expérimentations, la France a choisi un site
dans le Hoggar, près de In Ekker, à quelque 150
kilomètres au nord de Tamanrasset.
De novembre 1961 à février 1966, il sera procédé à
treize tirs dans des galeries creusées horizontalement dans la montagne.
C'est le 7 novembre 1961, que la France a effectué son
premier essai nucléaire souterrain (Agate).
Le 1er mai 1962, la France réalise un deuxième essai
souterrain.
Cependant, lors de cet essai, un nuage radioactif
s'échappe de la galerie de tir. C'est l'accident de Béryl, du nom de code de
l'essai.
Onze autres tirs en galerie ont été effectués jusqu'à
février 1966, dont trois n'ont pas été totalement contenus ou confinés
(Améthyste, Rubis, Jade).
Après des années d’expériences diverses,
"les deux sites de Reggane et d’In Ekker ont été remis à l’Algérie sans qu’aucune modalité de
contrôle et de suivi de la radioactivité n’ait été prévue", reconnaissait,
en décembre 1997, un rapport du Sénat français.
Un autre rapport de la Campagne internationale pour
l’abolition des armes nucléaires (ICAN), plus récent, indiquait que "dès
le début des expérimentations nucléaires, la France a pratiqué une politique
d’enfouissement de tous les déchets sous les sables. Tout ce qui était
susceptible d’avoir été contaminé par la radioactivité – avions, chars, et tout
autre matériel – a donc été enterré".
Pire encore, "des matières radioactives (sables
vitrifiés, roche et lave contaminées) ont été laissées à l’air libre, exposant
ainsi la population et l’environnement à des dangers certains", a-t-elle
déploré.
Selon l'ICAN, la France n’a jamais dévoilé où étaient
enterrés ces déchets, ni leur quantité.
Le 5 janvier 2010, après une dizaine d’années
d’actions menées par les associations de victimes des essais nucléaires
français en Algérie et en Polynésie, le Parlement français a adopté une loi relative
à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais ou accidents
nucléaires, dite Loi Morin.
En application de la loi Morin, une procédure
d'indemnisation est mise en place pour les personnes atteintes de maladies
cancéreuses considérées comme radio-induites par les études scientifiques de
référence (ONU) et résultant d'une exposition à des rayonnements ionisants.
Un Comité d'indemnisation des victimes des essais
nucléaires (CIVEN) a été mis en place. Cette autorité administrative indépendante
a la compétence pour attribuer ou non des indemnisations pour les personnes
atteintes de maladies résultant d’une exposition aux rayonnements des essais
nucléaires français réalisés dans le Sahara algérien et en Polynésie française
entre les années 1960 et 1998.
Au total, 1598 dossiers ont été, entre le 5 janvier
2010 et le 31 décembre 2019, enregistrés par le CIVEN, révèle une étude publiée
par l'ICAN en juillet 2020.
Selon la même source, seulement 49 dossiers
proviennent de populations résidant en Algérie au moment des essais.
Si 75 propositions d'offre d'indemnisation ont été
faites auprès de victimes civiles et militaires ayant séjourné en Algérie,
durant la période des essais, une seule victime "habitant en Algérie"
a reçu une indemnisation en près de 10 ans, regrette l'ICAN.