TRAVAIL- ETUDES ET ANALYSES- MIGRATIONS
INTERNATIONALES- ETUDE CREAD 2020
L’Algérie est le pays qui accueille le moins de
travailleurs immigrés : 239 500 immigrés et 100 000 réfugiés,
soit un taux de 0,7% de la masse globale de la population occupée dans le pays.
L’économie algérienne ne bénéficie
pas de l’apport des compétences étrangères. Ou pas trop. Et pour cause :
le pays ne capte pas suffisamment de travailleurs immigrés, en particulier les
cadres qualifiés. C’est ce qu’ont noté des chercheurs du Cread
qui viennent de lancer un projet de recherche sur le «Travail
et migrations internationales en Afrique du Nord – Focus sur l’Algérie
(2021-2023)».
En attendant les résultats de cette étude ambitieuse,
les donnés disponibles pour la période 2001-2016,
soulignent les chercheurs, démontrent déjà une réalité. Même dans la région
d’Afrique du Nord, l’Algérie est le pays qui accueille le moins de travailleurs
immigrés : 239 500 immigrés et 100 000 réfugiés, soit un taux de
0,7% de la masse globale de la population occupée dans le pays.
Selon les mêmes chiffres présentés par le sociologue
Hocine El Abdellaoui, l’Algérie compte, jusqu’en 2016, 87 417 travailleurs
salariés, 12 039 travailleurs non salariés et
39 244 classés dans la catégorie «autres».
Par secteur d’activités, les données disponibles
démontrent que les travailleurs immigrés sont intéressés en premier lieu par le
BTPH, avec 78 641 travailleurs, (soit 85,30%), l’industrie avec 9671
travailleurs (10,49%), les services avec 3857 employés (4,18%) et enfin
l’agriculture avec 29 travailleurs (0,03%).
Concernant les qualifications, sur la totalité des
travailleurs immigrés, 15 229 sont des cadres (6,52%), 31 299 ont la
maîtrise (33,95%) et 45 670 sont des exécutants (49,53%). «A la lecture de
ces chiffres, on constate une faible captation des compétences immigrées par
l’Algérie, malgré l’attractivité du marché économique», souligne le sociologue.
Selon lui, cette situation est engendrée par les
textes algériens qui donnent la préférence aux travailleurs locaux et le climat
des affaires qui n’est pas propice à la captation des compétences étrangères
qui trouvent d’énormes difficultés à se faire recruter en Algérie.
En tout cas, le nouveau projet lancé par l’équipe du Cread devra déboucher sur un diagnostic général de la
situation en Algérie par rapport aux pays de la région : Egypte, Libye,
Tunisie et Maroc.
Le Cread, rappelons-le, a
réalisé plusieurs travaux de recherche sur les migrations internationales ces
20 dernières années, avec une vision comparative entre Algériens à l´étranger
et étrangers en Algérie, et parfois avec extension aux pays du Maghreb et en
Afrique.
Ce nouveau projet, explique Mohamed Saïb Musette, sociologue et membre du groupe qui mène cette
étude, est conçu par une équipe pluridisciplinaire (sociologues, économistes,
statisticiens, politologues…).
Il devra aborder ce phénomène dans une perspective
comparative entre cinq pays de l’Afrique du Nord (Algérie, Egypte, Libye, Maroc
et Tunisie), avec un focus dans l’immédiat sur l’Algérie. «Ce nouveau projet
sera une première tentative de lever le voile sur cette réalité, qui semble
marginale selon les données onusiennes, à peine 1% des actifs en Afrique du
Nord et 0,7% en Algérie. Cette sous-région serait la moins attractive en
Afrique ! Ces données sont limitées strictement aux migrations régulières,
relevées à partir des permis de travail délivrés», souligne-t-il. Selon lui, la réalité est beaucoup plus importante et
complexe, si on inclut les travailleurs étrangers qui n’ont pas besoin de
permis de travail, les travailleurs saisonniers frontaliers et les travailleurs
du secteur informel, le travail des réfugiés et autres demandeurs d´asile.
«L’objectif de ce projet est de mesurer les flux des travailleurs migrants en Algérie
en comparaison avec quatre pays de l’Afrique du Nord (Egypte, Maroc, Tunisie et
Lybie) selon les nouvelles directives de la 20e Conférence
internationale des statisticiens du travail (CIST).»
Ce projet, ajoute-t-il, proposera aux autorités des
pays d’Afrique du Nord une connaissance approfondie pour toute prise de
décision concernant les migrations de travail. «Il entre parfaitement dans les Objectifs 8 et 10 de
l´Agenda 2030 des Nations unies sur le développement durable (2015) et apporte
les premiers éléments à l´implémentation de l´objectif n°1 du Pacte
international des Nations unies sur les migrations sûres, ordonnées et
régulières (2018)», note-t-il.