CULTURE-
MUSIQUE- PLATEFORMES MUSICALES/RETRIBUTIONS- ETUDE CNM France
SELON UNE ÉTUDE DU CENTRE
NATIONAL DE LA MUSIQUE EN France : Les artistes inégalement rétribués sur les plateformes
musicales
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D.R
Changer le système de répartition des plateformes musicales, en passant du
pot commun aux écoutes par artiste, impacterait peu la rétribution des musiciens
actuellement marginalisés, conclut (fin janvier 2021) le Centre
national de la musique (CNM) après une étude du cabinet Deloitte.
Rappel : aujourd’hui, un abonné qui paye 10 euros mensuels et écoute peu de
fois ses chanteurs favoris voit une grande partie de cette somme migrer vers
d’autres artistes beaucoup plus streamés (par les
abonnés en général). C’est le “market centric” (prorata des écoutes totales), opposé au modèle
théorique du “user centric”, qui s’appuierait sur les
écoutes individuelles des abonnés.
Les grands gagnants actuels se concentrent dans un cercle fermé de poids
lourds comme Drake ou Ariana Grande. La grogne de la majorité des autres
artistes – y compris des figures comme Robert Smith, de The Cure – est montée
ces derniers mois sur les réseaux sociaux. “Certains seront peut-être déçus de
voir que, si on passait au ‘user centric’, les
changements en valeur absolue pour la plupart des artistes ne représenteraient
pas grand-chose”, commente Jean-Philippe Thiellay,
président du CNM, instance qui chapeaute la filière musicale française.
“Mais il y a quand même une satisfaction, c’est d’avoir une étude française
sur le sujet, la meilleure au monde en réalité puisque deux acteurs principaux
du marché français, Spotify et Deezer, ont joué le jeu, poursuit-il. Le combat
pour les artistes, auteurs, compositeurs, qui réclament une meilleure
rémunération est ailleurs, et le CNM va étudier différentes pistes.”
“L’épaisseur du trait”
Dans les conclusions de l’étude, sous sa plume, Jean-Philippe Thiellay note d’abord qu’un passage au “user centric” “aurait pour effet de fortement atténuer les
redevances touchées par le Top 10 artistes (-17,2%), de stabiliser le milieu du
classement avec une faible augmentation des redevances perçues et de permettre
aux artistes les moins écoutés (en dessous du 10 000e rang) de profiter d’une
augmentation de leurs redevances (+5,2%)”.
En termes de genres musicaux, “la musique classique (+24%), le hard rock
(+22%), le blues (+18%), le pop rock (+17%), le disco (+17%) et le jazz (+10%)
bénéficieraient d’augmentations importantes en pourcentage, tandis que le rap
(-21%), le hip hop (-19%) et, à un moindre degré, l’afro beat (-9%) et le new age (-7%) verraient leurs redevances baisser”,
détaille-t-il.
Mais, comme il l’écrit, “l’impact du ‘user centric’
en valeur relève du symbolique pour la plupart des catégories analysées. Les
pourcentages de hausse élevés, par exemple pour le classique, s’appliquent à
des assiettes tellement faibles que, en valeur, on est dans l’épaisseur du
trait”. “Au-delà du 10 000e artiste le plus écouté, tous genres musicaux
confondus, l’impact du passage au ‘user centric’
serait au maximum de quelques euros par an en moyenne par artiste (...). Ceux
qui recevaient peu des plateformes de streaming ne gagneront pas davantage”,
souligne-t-il encore.
Question des playlists
“On considère essentiel que le débat ait lieu, confie à l’AFP Antoine Monin,
responsable chez Spotify. Sur le plan théorique, le ‘user centric’
est séduisant, mais on voit qu’il ne résoudrait pas tout.” “Il ne faut pas
oublier que les plateformes ne rétribuent pas directement les artistes, cela se
fait par l’intermédiaire des maisons de disques. Une réflexion sur un autre
modèle de rémunération ne pourra se faire qu’avec tous les acteurs :
artistes/auteurs/compositeurs, labels, distributeurs, sociétés de gestion
collective, etc.”, prolonge Antoine Monin.
Pour en revenir au système actuel, Jean-Philippe Thiellay
met par ailleurs en garde auprès de l’AFP contre les “risques de concentration
qui existent”, notant qu’Amazon et Apple ont refusé de participer à l’étude.
Dans ses conclusions, il demande aussi que “soient clarifiés (les) mécanismes”
des playlists soupçonnées d’orienter les choix des utilisateurs vers des genres
dominants (rap, R’N’B, etc.).
Et d’insister auprès de l’AFP : “La musique mise en valeur sur les
plateformes doit être celle des artistes/auteurs/compositeurs, pas celle de la
‘mood music’ – musique d’ambiance au kilomètre
parfois générée par ordinateur – ou des podcasts.”