INFORMATIQUE-ENQUÊTES ET REPORTAGES6
-TIC/NUMÉRISATION- CÂBLE ALVAL/ORVAL
© KAMEL BENELKADI/El
watan, mercredi 20 JANVIER 2021
Après avoir raté son
virage technologique, l’Algérie tente de rattraper son retard. Jusque-là, les
effets d’annonce ont contraint les entreprises algériennes à rester en retrait
de la révolution du numérique en dépit de l’accélération des usages des TIC,
notamment de la part de la jeune génération, boostée par la téléphonie mobile
(3G et 4G).
Dans ce contexte, le système de câble
sous-marin en fibre optique Alval/Orval (reliant
Alger et Oran à Valence, en Espagne) est opérationnel et sa mise en
exploitation effective permettra à l’Algérie de disposer, à terme, d’une
capacité allant jusqu’à 40 térabits, soit près de 20 fois les besoins actuels
du pays, améliorant, ainsi, de manière sensible le débit internet.
Ce système, qui devait être lancé en
décembre 2019, n’a été mis en service que le 31 décembre 2020.
Ce câble sous-marin en fibre optique est
un système stratégique pour l’Algérie, qui concrétise ainsi la démarche de
consolidation de la souveraineté nationale dans le domaine des
télécommunications.
Le nouveau système devrait permettre de
gérer efficacement le flux internet entrant et sortant du pays, le transfert de
la Data tout en augmentant la vitesse et le flux d’informations vers l’Algérie,
mais aussi les capacités de connexion à domicile et dans les entreprises, selon
le ministère de la Poste et des Télécommunications.
Orval/Alval
vient renforcer les deux autres liaisons sous-marines passant par Annaba, dont Medex d’une capacité atteignant les 2 téras,
et d’un troisième câble Alpal 2 passant par Alger via
Palma Di Mallorca (Espagne) avec un débit de 85
gigas, jugés «insuffisants».
Le câble sous-marin à fibre optique Alval (Alger-Valence) et Orval (Oran-Valence) relie
précisément le réseau de communication national, à partir de la station d’El
Djamila à Alger et celle d’Oran, au réseau européen, au niveau de la ville de
Valence.
Sa longueur dépasse les 770 km de fibre
optique sous la mer. Selon le site du ministère de la Poste et des
Télécommunications, le câble Alval/Orval est doté de
4 paires de fibres optiques reliant les trois stations. Il délivrera
initialement 3×100 gigabits/s par paire de fibres et peut augmenter jusqu’à 10 terabits/s par paire de fibre, soit un total de 40
térabits/s, en utilisant la dernière technologie à 100 Gb/s pour chaque
longueur d’onde.
Ce projet permet de doubler et protéger
efficacement (redondance en cas de catastrophe naturelle) les deux liaisons
sous-marines Alger-Palma (Alpal2) au Centre et Annaba-Marseille (SMW4) à l’Est,
d’offrir une diversité des points d’atterrissement à l’international et
d’augmenter la capacité de l’opérateur historique Algérie Télécom dans le
domaine des communications et du haut débit internet.
C’est une infrastructure 100% algérienne,
qui sera exploitée dans son intégralité par l’opérateur public national, à
travers Algérie Télécom en Algérie et Algérie Télécom Europe en Espagne.
Compte tenu de leur importance de premier
ordre, l’endommagement des câbles sous-marins a des conséquences majeures sur
les télécommunications et donc sur l’économie des pays touchés par une panne.
En avril 2017, la coupure d’un câble SeaMeWE 4 sur la côte algérienne de Annaba avait causé
l’arrêt quasi-total d’internet et la perte temporaire de 90% des capacités de
connexion du pays avec l’extérieur.
Il est donc capital de pouvoir garantir
l’intégrité du réseau de câbles car elle détermine la sécurité des Etats et la
défense de leur position économique et industrielle. Seul 1% du trafic internet
transite par les réseaux satellitaires. Les 99% des flux de données restants
passent par ces câbles.
Contribution à la
numérisation
La bande passante internationale est
passée de 1,7 à 2,4 Tbps entre janvier 2020 et
janvier 2021. Cette capacité sera doublée durant l’année 2021. Il faut signaler
le déploiement de la technologie FTTx de haut et très
haut débit : 133 000 nouveaux accès FTTx
réalisés en 2020.
Il a été procédé à la modernisation des
réseaux de télécommunication vétustes des
grandes agglomérations pour l’amélioration de la qualité de la connexion
internet au profit des citoyens : un total de 203 672 accès modernisés au
niveau des wilayas d’Alger, Oran et Constantine.
Il faut préciser aussi que la réussite des
opérations de numérisation et la modernisation des procédures administratives
est tributaire d’un bon et stable débit internet.
Il est aussi nécessaire dans le cadre de
l’inclusion financière et la généralisation des moyens de paiement
électronique.
«Le débit minimum de 2 mégas, inchangé depuis 2018, reste
insuffisant pour permettre une navigation aisée sur le Net», reconnaît Brahim Boumzar,
ministre de la Poste et des Télécommunications. «Nous allons augmenter le débit internet minimum
(actuellement 2 Mégas). L’objectif à court terme est d’arriver à un débit
minimum de 4 à 8 Mégas pour que le citoyen puisse accéder à des services à
valeur ajoutée, comme la VOD (Video On Demande) et la
vidéo haute définition», a-t-il
annoncé sans donner de date précise à cette mutation. Le système TDM
(technologie utilisant le fil en cuivre) est remplacé progressivement par la
technologie de pointe en fibre optique FTTX (fibre jusqu’au domicile, entre
autres).
Selon les statistiques officielles,
jusqu’au 31 décembre 2020, il a été procédé au basculement vers le FTTX de plus
de 203 600 abonnés et la cadence sera accélérée en 2021 pour connecter le
maximum des 700 000 abonnés restants vers la nouvelle technologie.
Pour Ali Kahlane,
consultant en transformation et maturation numériques, s’appuyant sur les
analyses des organisations internationales, «seule la démocratisation de l’internet permet au citoyen,
quelle que soit sa condition, de pouvoir s’informer et d’accéder aux services
en ligne, tout en permettant aux TPE/PME/PMI d’évoluer et de réussir leur
transformation ou transition numérique, à moindre coût, en utilisant l’internet
fixe. L’internet est le levier de croissance par excellence de toute économie,
depuis plus de 10 ans. C’est dire son importance pour le programme de relance
économique que le gouvernement a adopté».
Le président de la République, Abdelmadjid
Tebboune, avait ordonné en août dernier au ministre
de la Poste et des Télécommunications de venir, immédiatement, à bout du
problème de la faiblesse du débit internet et de définir «les facteurs nuisibles».
Si le président de la République en
personne a haussé le ton, c’est qu’il a conscience qu’avec un débit internet
faible, c’est son propre programme économique et social qui risque de ne pas se
concrétiser, ou du moins perdre toute crédibilité.
Plus qu’un simple outil de partage
d’informations et de divertissement, internet s’impose au fur et à mesure du
perfectionnement de nos systèmes de transmission, non plus comme un espace
parallèle, mais comme une entité fusionnant avec notre environnement
naturel.