- Texte
intégral de l'appel de l'Ugema à la grève du 19 mai
1956 :
Etudiants algériens!
Après l'assasinat de notre frère Belkacem Zeddour par la police
française, après le meurtre de notre frère aîné le Dr Benzerdjeb,
après la tragique fin de notre frère Brahimi du
collège de Bougie, brûlé vif, dans sa mechta incendiée par l'armée française
pendant les vacances de Pâques, après l'exécution sommaire dans un groupe
d'otages de notre éminent écrivain Réda Houhou, secrétaire de l'Institut Benbadis de Costantine , Baba
Ahmed et Tobbal de Tlemcen, après l'arrestation de
nos camarades Amara, Lounis, Saber
et Taouti de Tlemcen, aujourd'hui arrachés aux geôles
de l'administration française, celle de nos camarades Ferroukhi
et Mahidi, après la déportation de notre camarade Mihi, après les campagnes d'intimidation contre l'Ugema, voici que la police nous arrache des mains, un matin
à la première heure, notre frère Ferhat Hadjadj ,
étudiant en propédeutique et maître d'internat au lycée de Ben Aknoun, le torture, le séquestre pendant plus plus de 10 jours (avec la complicité de la justice et de la
haute administration algérienne, prévenues de son affaire) jusqu'au jour où
nous apprenons , atterés, sous le coup de l'émotion,la nouvelle de son égorgement par la police de Djidjeli, aidée de la milice locale.
L'avertissement donné par notre magnifique grève du 20 janvier
1956 n'aurait-il servi à rien? Effectivement, avec un diplôme ne plus, nous ne
ferions pas de meilleurs cadavres ! A quoi donc serviraient-ils ces diplômes
qu'on continue à nous offrir pendant que notre peuple lutte héroiquement , pendant que
nos mères , nos épouses, nos soeurs sont violées,
pendant que nos enfants , nos vieillards tombent sous la mitraillette, les
bombes, le napalm. Et nous, "les cadavres de demain" , on nous offre d'encadre quoi? D'encadrer?....
Les ruines et les morceaux de Constantine, de Tébessa, de Phillipeville, de Tlemcen et autres lieux appartenant déjà
à l'épopée de notre pays. Notre passivité face à la guerre qu'on mène sous nous
yeux nous rend complice des accusations ignobles dont notre vaillante armée
nationale est l'objet.
La fausse quiétude dans laquelle nous sommes installés ne
satisfait plus nos consciences. Notre devoir nous appelle à d'autres tâches
plus urgentes , plus coopératives , plus catégoriques
, plus glorieuses.
Notre devoir nous appaelle à la
souffrance quotidienne aux côtés de ceux qui luttent et meurent libres , face à l'ennemi.
Nous observons tous la grève immédiate des cours et des examens et
pour une durée illimitée.
Il faut déserter les bancs de l'université pour le maquis, il faut
rejoindre en masse l'Armée de Libération Nationale et son organisme politique
le FLN
Etudiants et intellectuels algériens ,
pour le monde qui nous observe, pour le destin héroique
de notre pays, serions-nous des rénégats?
UGEMA* : Union générale des étudiants
musulmans algériens
1/Lors d'une conférence -débat
tenue le 17 mai 2012 (Alger) le Dr Lamine (Abderrahmane) Khène affirmait que "ce sont les étudiants eux-mêmes
qui ont décidé , à la majorité et après concertation, de la grève, lors
d'une réunion que j'ai présidée au cercle des Oulémas qui se trouvait à
proximité de la mosquée Ketchaoua »
( Le rédacteur du texte n'est autre que Lamine Khene,
au nom de l'UGEMA). Un texte décisif et une action fondamentale pour la
poursuite de la lutte de libération.