Date de création: 15-12-2020 13:29 Dernière mise à jour: 19-12-2021 17:43 Lu: 850 fois
HISTOIRE –PERSONNALITES-
LAMINE KHÈNE
C’était le dernier membre encore
vivant du gouvernement de l’Algérie combattante, le GPRA proclamé le 18
septembre 1958 par Ferhat Abbas : le moudjahid Lamine Khène
est décédé ce lundi 14 décembre à l’âge de 89 ans. L’homme a été très discret
après l’indépendance – il a toujours fait valoir l’extraordinaire courage et la
clairvoyance du peuple durant ces années de combat – mais son parcours de
révolutionnaire est remarquable.
Né le 6 mars 1931 à Collo,
militant précoce de la cause de l’indépendance, il entre au PPA (Parti du
peuple Algérien) à l’âge de 15 ans. Etudiant en médecine à Alger, il active au
sein de l’Amicale des étudiants musulmans de l’Afrique du Nord (AEMAN) puis à
l’UGEMA dont il est un des membres fondateurs. L’homme s’engage au FLN. Il est
sous l’autorité de AbaneRamdane, chargé après sa sortie de prison d’organiser et de
diriger l’organisation à Alger. Lamine Khène a
présidé l’assemblée générale historique des étudiants qui a décidé de la grève
du 19 mai 1956.
Lamine Khène,
bien que déjà membre du FLN, a insisté sur le fait que la décision de faire
grève émanait des étudiants et non de l’organisation.
“Ce sont les étudiants eux même
qui ont décidé, à la majorité et après concertation, de la grève, lors d’une
réunion que j’ai présidée au cercle des Oulémas qui se trouvait à proximité de
la mosquée Ketchaoua », avait expliqué Lamine Khène lors d’une conférence à l’Ecole nationale
polytechnique d’El Harrach. Lamine Khène.
Quand BenyoucefBenkhedda demande que la grève soit déclenchée sans
attendre, Lamine Khène agit, sans hésitation.
« Je n’avais pas eu l’idée de contester l’ordre qui venait de m’être
transmis. Benkhedda était mon aîné, il était
responsable au sein du parti où je militais, c’est ça l’autorité qu’on accorde
aux plus anciens. Cela n’avait besoin ni d’écrits ni de notification. Comme
j’étais assistant médical à la médersa de Ben Aknoun
(actuel lycée Amara Rachid), j’avais une chambre. Je m’y suis rendu et j’ai
rédigé l’appel à la grève avec l’appel pour le maquis. Je suis descendu en
ville, j’ai donné le texte à Salah Benkobbi, un
militant du FLN, qui était en même temps membre du bureau de section de
l’UGEMA. Il l’a transmis à Benkhedda, car sa machine
à écrire ne fonctionnait pas. Tapé, ronéotypé, il a été diffusé. Voilà comment
les choses se sont faites » a-t-il expliqué dans un entretien, rare, au
journal El Watan.
« Nous
ne ferons pas de meilleurs cadavres… »
Le texte de l’appel est d’une
grande vigueur : «
Effectivement, avec un diplôme en plus, nous ne ferons pas de meilleurs
cadavres ! ( … ) et nous , « les cadres de demain » on
nous offre d’encadrer quoi? D’encadrer qui ? ( … ) Les
ruines et les monceaux de cadavres, sans doute ceux de Constantine, de Tébessa,
de Philippeville(Skikda), de Tlemcen et autres lieux appartenant déjà à
l’épopée de notre pays ? Notre passivité face à la guerre, qu’on mène sous nos
yeux, nous rend complices des accusations ignobles dont notre vaillante armée
nationale est l’objet. La fausse quiétude, dans laquelle nous nous sommes
installés, ne satisfait plus nos consciences » .
Quelques jours seulement après
l’appel, le 1er juin 1956, il monte au maquis en Zone 2, en compagnie du chahidAllaouaBenbaatouche, tombé au champ d’honneur en 1958. L’étudiant
en médecine, devenu officier de l’ALN (capitaine chargé de la santé) met en place le service de santé
de la wilaya 2 dirigée par ZighoudYoucef. Homme qu’il n’a jamais cessé d’admirer et sur
lequel il tenait à édifier les plus jeunes. « C’est un personnage extraordinaire. Un génie
politique et militaire. J’ai eu l’occasion d’animer des conférences à son
sujet, j’aimais dire à mon auditoire, que je commence toujours par la fin quand
il s’agit de ce héros de la guerre de Libération nationale. Je rappelle
toujours «que le monsieur duquel je vais parler, qui est pour moi un génie
politique et militaire, est mort à l’âge de 35 ans».
Lamine Khène
est désigné membre du CNRA en 1957. Il est membre du premier gouvernement provisoire de la
République algérienne (GPRA 1958-1960. A l’indépendance, il poursuit ses études en médecine tout en prenant la
direction de l’’organisme de mise en valeur des richesses du sous-sol algérien
(OS) puis de l’Office de coopération industrielle (OCI) en 1966. Lamine Khène sera ensuite ministre des travaux publics jusqu’en
1970 avant de mener une carrière internationale : il a été secrétaire
général de l’OPEP, puis président de l’ONUDI. Lamine Khène
était en désaccord avec les choix faits dans les années 90 et il ne cachait
pas, à ses proches, son dégout à l’égard des responsables de la déliquescence
de l’Etat au cours des deux dernières décennies