La douzième session du Conseil
d’Association Algérie-Union européenne (UE) s’est tenue, lundi 7 décembre 2020,
par visioconférence. Elle a été présidée, côté algérien, par le ministre des
Affaires étrangères SabriBoukadoum
en présence notamment du ministre de l’Industrie Ferhat Aït Ali. Et côté
européen, par le Haut représentant pour les Affaires étrangères et la Politique
de sécurité, Josep Borrell.
Les deux parties ont évoqué la
révision de l’Accord d’Association signé en 2002 et entré en vigueur le 1
septembre 2005. « En tant que négociateurs Algériens nous sommes assez
conscients des manquements en matière de l’application de l’Accord
d’association notamment dans son aspect commercial. L’essentiel est qu’il y a
une volonté de dialogue de part et d’autre et il est évident que quand il y a
déséquilibre nous intervenons pour le corriger.Le
message de l’Algérie est bien reçu par la partie européenne », a déclaré SabriBoukadoum à l’APS.
Il a indiqué que tous les
partenaires européens, dont l’Italie, la France, la Hongrie, le Portugal et
l’Allemagne, sont conscients de ce déséquilibre. Les ministres des Affaires
étrangères de ces pays ont abordé cet accord en prélude de la réunion de lundi
7 décembre lors de récentes visites en Algérie.
« Les relations de l’UE avec
l’Algérie sont vitales. L’Algérie, qui est la porte de l’Afrique, est
aussi un facteur de stabilité dans la région. C’est un marché de 45
millions d’habitants. L’Accord est aussi vital pour l’Algérie particulièrement
en termes d’investissement. Notre pays et l’UE vont continuer dans la mise
en œuvre de l’Accord d’association qui ne concerne pas que l’aspect
commercial mais d’autres aspects globaux », a appuyé le chef de la
diplomatie algérienne.
Réserves de l’Algérie
Alger entend, entre autres,
reposer la question de la libre circulation des personnes et le transfert de la
technologie, deux points contenus dans l’Accord mais non respectés par
Bruxelles. AissaBekai, ministre
délégué chargé du Commerce extérieur, a, de son côté, indiqué à l’APS que
les concertations entre l’Algérie et l’UE se poursuivaient
toujours « dans le but d’évaluer l’accord ».
Des concertations qui ont débuté
en septembre 2020. « L’Algérie et l’UE ont fait, chacun de son côté,
son évaluation du document. La réunion de ce lundi était une occasion pour
passer en revue l’Accord et œuvrer pour arriver à une entente sur les
données commerciales », a-t-il souligné. Il a précisé que l’Algérie avait
émis des réserves en 2014 dans le but de sauvegarder la balance commerciale qui
était en sa défaveur. « L’Algérie a procédé à l’évaluation de tous les
accords commerciaux, à l’instar de celui avec la Zone arabe (de libre
échange) », a-t-il noté.
Entre 2005 et 2019, l’Algérie,
selon l’Association nationale des exportateurs algériens, a acheté à l’Europe
l’équivalent en valeur de 270 milliards d’euros. Durant la même période,
l’Algérie n’a exporté que 13,5 milliards d’euros vers le continent européen.
« Tout accord
est sujet à un ajustement »
Ferhat Ait Ali a, pour sa part,
annoncé que le ministère de l’Industrie a émis « certaines réserves sur
quelques segments ». « Nos réserves ont été d’ores et déjà
prises en considération par les partenaires européens. D’autres vont l’être.
Nous sommes en concertation avec l’UE pour remédier à toutes ces
lacunes. Tout accord est sujet à un ajustement », a-t-il appuyé.
L’Algérie, pour rappel, a
clairement montré sa volonté de faire « une réévaluation
globale » de l’Accord d’Association. Le 1 septembre 2020 devait
entrer en vigueur la zone de libre échange entre l’UE et l’Algérie en
application de cet Accord (la date initiale était le 1 septembre 2017). Alger a
décidé de reporter sine die la mise en place de cette zone. « Nous allons
établir un nouveau calendrier avec l’UE, mais, nous n’allons pas annuler
l’Accord d’Association. Il faut le réviser. L’UE est d’accord pour cette
révision et est prête pour de nouvelles rencontres. Nous devons accélérer ce
processus. Pour le principe, nous sommes des associés de l’UE mais pas au
détriment de notre économie », a déclaré le président Abdelmadjid Tebboune, le 20 septembre 2020.
Blocages et
bureaucratie
Le démantèlement tarifaire doit,
selon lui, être réciproque. Les opérateurs économiques algériens, qui ont
critiqué la précipitation dans la signature de l’Accord d’Association, se
sont plaints de beaucoup de blocages, sous plusieurs formes, pour l’accès
au marché européen surtout pour les produits agricoles.
Alger, en quête de diversification
de partenaires, souhaite rééquilibrer les échanges commerciaux et attend de
Bruxelles plus d’efforts pour encourager les investisseurs européens à
s’intéresser à l’Algérie. Les opérateurs économiques européens se plaignent,
pour leur part, de l’instabilité juridique, des freins bureaucratiques et de
l’efficacité limitée du système bancaire.
Le dernier Conseil d’Association
Algérie-UE remonte à mai 2018. La diversification de l’économie, la lutte
contre la migration clandestine et contre le terrorisme, et la coopération énergitique étaient parmi les points discutés lors de ce
Conseil.
L’ombre de la résolution du Parlement européen
« Les deux parties
réaffirment leur volonté à ce que toutes mesures relatives à leurs échanges
commerciaux soient prises dans le respect de l’Accord d’Association, qui
intègre des mécanismes permettant de tenir compte des difficultés économiques
rencontrées par l’une ou l’autre partie(…) Les parties soulignent l’importance
d’un climat des affaires propice à l’entrepreneuriat et à l’investissement…»,
était-il écrit dans la déclaration conjointe. Des questions qui n’ont pas
beaucoup évolué depuis…
Dernièrement, Alger a critiqué
une résolution du Parlement européen sur la situation des libertés et des
droits en Algérie. « L’Algérie sera toujours là pour dénoncer
vigoureusement avec force de pareilles résolutions, et ce, malgré les bonnes
relations qu’elle entretient avec les pays de l’Union européenne », a
déclaré SabriBoukadoum, ce
lundi 7 décembre.
La résolution du Parlement
européen, la deuxième en une année, a jeté un froid dans les relations entre
Alger et Bruxelles