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Roman Farida Saffidine- "La robe de Barkahoum"

Date de création: 07-12-2020 17:47
Dernière mise à jour: 07-12-2020 17:47
Lu: 919 fois


SANTE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN FARIDA SAFFIDINE- « LA ROBE BLANCHE DE BARKAHOUM »

La robe blanche de Barkahoum. Roman de Farida Saffidine. Casbah Editions, Alger 2029, 197 pages, 700 dinars

Barkahoum ! Il était évident qu’avec un tel prénom, elle allait « ramer » dur pour se sortir de l’ impasse sociétale qu’on lui avait « fabriqué » dès sa naissance…..tout particulièrement par une grand-mère paternelle  assez conservatrice…et, à la limite méchante comme  pas possible, toujours à l’endroit de tout ce qui était fille, préférant de loin les garçons, même les plus « imbéciles ». Surtout Zamen et Chams. «  Des idiots, des simplets, des cerveaux à deux neurones, rien dans le ciboulot. Ils ne réfléchissent pas, ne se posent jamais de questions » . 

Barkahoum est la dernière d’une famille de …dix enfants, sept filles et trois garçons…..qui , non désirée, mal-aimée (sauf par son père….un peu trop taiseux) va passer tout son temps à sa battre pour se faire une place dans  la vie. « Aicha –radjel » ? Une féministe avant l’heure ? Non ! tout simplement une femme qui veut « exister » …..à la maison, dans la rue, au travail…..

Elle sera médecin. Elle travaillera , durant son service civil, à l’hôpital, elle s’installera à son compte (à Bordj Bou Arréridj), elle vivra seule, elle achètera une voiture après avoir passé son permis de conduire, elle voyagera à l’étranger….elle fait face au machisme ambiant même chez sa clientèle de malades et, surtout, n’arrive pas à trouver son « prince charmant ». Pourtant, elle était attirante…..Il est vrai que les « postulants » étaient beaucoup plus intéressés par le logement ou par les rentrées d’argent….tout en exigeant le port du foulard dit « islamique » , la limitation des déplacements, des sorties contrôlées,   etc…..etc….

Heureusement pour elle, elle arrive à traverser la décennie rouge sans trop de dégâts : il est vrai qu’elle avait un frère dans l’armée et l’autre au « maquis » terroriste (les « deux imbéciles »).

Cinquante cinq ans d’âge , et encore vierge (si, si, ça existe !) , et faisant toujours ses prières quotidiennes sans pour autant porter le hidjab et le foulard , elle rejoint une de ses sœurs , médecin installée à Paris , et elle s’y installe…non pour exercer mais surtout pour « souffler » dans une autre atmosphère …..moins pesante ? Heureux (et curieux)  hasard, elle y rentrera celui qu’elle attendait tant. Happy end !

 L’Auteure : Née en 1953 à Bordj Bou Arréridj. Etudes secondaires à Sétif puis supérieures à Constantine (langue et littérature anglaises). Enseignante (Université Ferhat Abbas de Sétif). Retraite en 2006. Déjà un premier roman, , « Voix de femmes.Voies de fait » (2018) et un recueil de poèmes.

Extraits : « Si, au départ, les gens furent éblouis par les bâtiments flambants neufs, les équipements sophistiqués et un accueil plus décent dans le secteur privé (Note :de la Santé), bien vite ils déchantèrent car on avait oublié de dépoussiérer les mentalités pour qu’elles aillent de pair avec la nouveauté des lieux et des appareils » (p 31), « A ma naissance, on m’avait affublée d’un costume qui me gênait aux entournures. Je ne connaissais qu’interdits depuis mon premier jour » (p34), « Un cabinet médical est un microcosme d’une société et s’y dévoilent toutes les tares, tous les drames de ses membres « (p126)

Avis :Un gentil bon roman. Un récit de vie chargé de colère (féminine) mais aussi plein de volonté et d’espoir. A lire par toutes les femmes ….révoltées ou non. Ah, j’allais oublier : le procès en règle du secteur de la Santé en général et médical en particulier.

Citations : « Certaines décisions ayant contribué à l’état désastreux actuel de la médecine étaient plus politiquement et  idéologiquement orientées que scientifiquement et médicalement justifiées » (p 52), « Nous aurions voulu que tous les hommes portent leur virilité comme un présent pour adoucir le sort des femmes, pas comme une arme pour les asservir, pas comme un exutoire pour panser les multiples blessures que leur infligeait la société,  pas comme une armure pour protéger leur ignorance et leur extrême vulnérabilité (p82) , « Nous aussi, les femmes, sommes nées avec un attribut sauf que le nôtre ne pendouille pas entre nos jambes. Il faut bien, à l’humanité, cet attribut féminin pour la perpétuer » (p 96), « Le monde change, les mentalités ne suivent pas , hélas. La bêtise est la chose la plus dure à éradiquer après la méchanceté » (p109), « La société dans laquelle je vis diabolise la femme en même temps qu’elle l’érotise à l’excès, la transformant en objet sexuel consommable en tout temps et en tout lieu, mais si possible en secret » (p148) , « Peut-on guérir la misère, le malheur avec les médicaments ?Que peut-on prescrire contre l’ignorance, , contre les abus, contre le manque d’éducation et les préjugés ? » (p 159)