FINANCES-
MONNAIE- POUVOIR d’ACHAT/MONNAIE NATIONALE 2020
fORTE CHUTE DU
POUVOIR D’ACHAT DE LA MONNAIE NATIONALE EN CINQ ANS
Le dinar a perdu plus d’un tiers de
sa valeur
©Liberté/
Ali Tiotouche, Mercredi 4 novembre 2020
Pour la Banque d’Algérie, la baisse du
taux de change du dinar ne doit pas constituer l’unique levier
d’ajustement macroéconomique.
Depuis la mi-2014, alors que les cours du brut amorçaient une
décrue spectaculaire sur le marché mondial, le taux de change du dinar
retrouvait pleinement son statut d’amortisseur des chocs externes sur fond
d’une baisse nette des fondamentaux de l’économie.
L’absence d’inflation aidant, la monnaie nationale enchaînait
d’importants mouvements baissiers, passant d’une moyenne de 78 DA/dollar en
juin 2014, après s’être appréciée de 2,31% au premier semestre de la même
année, à une moyenne de 100,46 DA/dollar sur l’année 2015. Sur le seul 1er
semestre de 2015, le cours moyen du dinar a connu une dépréciation de 22%
contre le billet vert par rapport au même semestre de 2014.
Le cours de change moyen du dinar contre le dollar est passé
ensuite à 109,47 DA/dollar en 2016, à 110,96 DZD/$ en 2017, à 116,62 DZD/$ en
2018 et à 119,36 DZD/$ en 2019. La monnaie nationale a ainsi connu une nette
décrue face au dollar, dévissant de près de 40% en cinq ans. Face à l’euro, le
dinar n’a pas non plus résisté, souffrant des interventions à répétition de la
Banque centrale sur le marché des changes aux fins d’absorber l’effet de la
chute des prix du pétrole sur les positions financières.
Le cours de change moyen du dinar contre l’euro est ainsi
passé de 107,4874 DZD/euro durant le 1er semestre de 2014 à 111,44 DZD/€ en
2015, 121,18 DZD/€ en 2016, 125,32 DZD/€ en 2017, 137,69 DZD/€ en 2018 et
133,71 DZD/€ en 2019. Le dinar a ainsi perdu plus de 21% de sa valeur par
rapport à l’euro de 2014 à 2019. La monnaie unique semblait calquer son
évolution sur celle du dollar, profitant d’une conjoncture peu favorable pour
les finances du pays, nécessitant un usage excessif du levier monétaire pour
amortir le poids de la crise.
La rechute des prix du pétrole dès janvier 2020 a alimenté le
mouvement baissier de la valeur du dinar. La dépréciation n’a été aussi
soutenue que de 2014 à 2019 ; le dollar s’échangeant désormais contre 134 DA
(dernières cotations hebdomadaires de la Banque d’Algérie), contre une moyenne
de 119 DA en 2019, alors que la valeur de l’euro est fixée à 158 DA (contre une
moyenne de 133 DA en 2019).
Cette nouvelle dévaluation du dinar, puisqu’il en est
question, amorcée depuis le début de l’année en cours, accrédite l’idée selon
laquelle la valeur réelle du dinar reste probablement au-dessus de son prix
d’équilibre et cette surévaluation serait préjudiciable pour l’économie du
pays, confronté désormais au double choc du coronavirus et de la rechute des
prix du pétrole.
Absence de réformes
Les cours du brut devraient rester bas, soit autour de 40 dollars le baril
jusqu’à fin 2021, ce qui signifie que le taux de change du dinar restera dans
la boîte à outils du gouvernement pour faire face à la crise. Dans son projet
de budget pour 2021, le gouvernement prévoyait d’ailleurs que la valeur de la
monnaie nationale continuera d’enchaîner d’importants mouvements baissiers, à
raison de 142,20 DA pour un dollar en moyenne l’an prochain, 149,31 DA/dollar
en 2022 et 156,78 DA/dollar en 2023.
Cela veut dire très clairement qu’en l’absence de réformes et
d’ajustements de fond, la politique de change restera omniprésente dans les
éléments de réponse à la crise. Il est vrai que les institutions de Bretton Woods suggèrent sans
retenue le recours à une “dépréciation progressive du taux de change”, ce qui
“pourrait apporter une nouvelle bouffée d’oxygène”, à en croire les experts de
la Banque mondiale. La Banque d’Algérie met tout de même en garde contre les
limites de la réponse monétaire, celle-ci restant insuffisante et à court
terme.
“Il faut rappeler que le dinar a connu des ajustements
importants ces dernières années, en contexte de choc externe. Il est utile de
souligner également que l’ajustement du taux de change ne doit pas constituer
le principal, voire l’unique levier d’ajustement macroéconomique. Pour être
efficace, il doit accompagner la mise en œuvre effective d’autres mesures et
politiques d’ajustement macroéconomique, notamment budgétaire, aux fins de
rétablir durablement les équilibres macroéconomiques et de réformes structurelles,
et d’asseoir une diversification effective de l’économie et in fine une hausse
de l’offre domestique de biens et services”, lit-on, en effet, dans la dernière
note de conjoncture de la Banque centrale.
Face à cette énième mise en garde de la
Banque d’Algérie qui, faut-il le souligner, n’a cessé d’inviter le gouvernement
à élaborer sans tarder un nouveau plan de sortie de crise, force est de
constater que l’actuel Exécutif ne fait que reprendre à son compte les recettes
de ses prédécesseurs. Leurs conséquences sur les entreprises et les
ménages peuvent se révéler désastreuses.