ENVIRONNEMENT- ENQUETES ET REPORTAGES- DECHETS
PLASTIQUES- ETUDE UICN 2020
©NASSIMA OULEBSIR/El
watan, jeudi 29 OCTOBRE 2020
Près de 230 000 tonnes de déchets
plastiques finissent chaque année dans la Méditerranée. Un chiffre qui pourrait
doubler d’ici 2040 sans mesures «ambitieuses», a averti mardi l’Union
internationale pour la conservation de la nature (UICN) dans un communiqué . C’est l’Egypte qui détient le triste record
avec 74 000 tonnes déversées par an, suivi de l’Italie avec 34 000 tonnes/an.
Vient en troisième
position, la Turquie avec 24 000 tonnes/an. Ils sont considérés selon le
rapport qui vient aussi d’être rendu public sur leur site, les pays qui
rejettent le plus de plastique dans la Méditerranée. Dans le rapport et sur les
schémas de classement des pays, l’Algérie figure en 4e place avec une barre qui
dépasse les 10 000 tonnes par an. Mais le communiqué de l’UICN ne classe
par l’Algérie parmi les points chauds.
Selon Minna Epps, directrice du Programme marin et polaire de l’UICN, organisation
connue pour sa liste rouge de référence sur les espèces menacées, les points
chauds en déchets plastiques ont tendance à apparaître près de l’embouchure des
principales rivières, comme le Nil et à proximité des grandes villes.
Le rapport détaille, en
effet, les différences et aussi les degrés de danger des microplastiques
et macroplastiques comme déchets. Et Minna Epps évoque dans sa préface du rapport la «grande
incertitude dans cette estimation, car la plupart des recherches entreprises
jusqu’à présent ont porté principalement sur le plastique accumulé à la surface
de la mer, qui constitue moins de 0,1% du total du stock.»
Selon le rapport, on
constate que l’Algérie est juste suivie de l’Albanie, la Tunisie et l’Ouganda.
En bas de ce tableau noir, vient, comme mieux classés, la Serbie, Malt et la
Slovénie. En quantité par habitant, le Monténégro (huit kg/an par personne), la
Bosnie-Herzégovine et la Macédoine du Nord (toutes deux avec trois kg/an par
personne) sont en tête.
Pour l’Algérie, on est à
0,5 kg par habitant par an. Dans ce classement, elle est à la 16e. Au total,
«environ 229 000 tonnes de déchets plastiques sont déversées chaque année dans
la mer Méditerranée -l’équivalent de plus de 500 conteneurs d’expédition par
jour», a indiqué l’UICN dans son communiqué, en pointant la mauvaise gestion
des déchets comme responsable de 94% du plastique se retrouvant dans la mer.
Un chiffre à retenir
aussi : les villes côtières ne sont responsables des déchets macroplastiques que de 35%. Le reste est généré des zones
d’ailleurs (pas spécialement des zones côtières) car les déchets sont
transportés par ruissellement vers la mer, considéré comme un facteur clés de
la densité des fuites. «Sans intervention significative, cette pollution ne va
cesser de s’aggraver jusqu’à doubler et atteindre 500 000 tonnes d’ici à 2040»,
estime l’organisation, jugeant qu’il faut des mesures ambitieuses au-delà des
engagements actuels des pays. «La pollution plastique est source de
dommages à long terme aux écosystèmes terrestres et marins et à la bio
diversité», notamment pour «les animaux marins qui peuvent se retrouver coincés
ou avaler des déchets plastiques et finir par mourir d’épuisement et de faim»,
a rappelé Minna Epps, directrice du Programme marin
et polaire de l’UICN. Dans le rapport, Minna Epps
insiste sur le fait que le travail était concentré sur le bassin méditerranéen
pour plusieurs raisons.
Le choix
La région représente
d’abord, un modèle parfait pour faire avancer «notre compréhension et réflexion
sur le plastique : surtout qu’il s’agit d’une mer semi-fermée».
Ensuite, dit-elle, la mer
méditerranéenne est entourée de pays aux réalités socio-économiques contrastées
et constitue donc un bon modèle pour étudier et ensuite façonner une grande
variété de actions liées à la fois aux déchets plastiques et aux microplastiques. Selon ce rapport, une meilleure gestion
des déchets dans les 100 villes les plus polluantes pourrait réduire le rejet
de plastique dans la Méditerranée de 50 000 tonnes par an.
L’interdiction notamment de
certains produits tels que les sacs en plastique permettrait d’éviter le rejet
de 50 000 autres tonnes de déchets. «Les gouvernements, le secteur privé, les
instituts de recherche, (..) les industries et (les)
consommateurs doivent travailler ensemble pour repenser les processus et les
chaînes d’approvisionnement, investir dans l’innovation et adopter des modes de
consommation durables et des pratiques améliorées de gestion des déchets pour
stopper le flux de contamination plastique», a insisté Antonio Troya, directeur du Centre de coopération pour la
Méditerranée de l’UICN. Minna Epps appelle aussi à
faire «face efficacement à la croissance accélérée des déchets en plastiques,
une approche systémique pour résoudre le problème est nécessaire», surtout,
ajoute-t-elle, que l’objectif principal de ce rapport est de combler les
lacunes dans les connaissances et contribuer au déclenchement de la prévention
et des actions correctives dans les pays limitrophes du bassin méditerranéen.
Le rapport évoque aussi la crise migratoire, où des réfugiées par mer peuvent
être une des causes de cette pollution, comme par exemple des embarcations
abandonnées.
A préciser aussi que le
rapport a inclus le bassin méditerranéen, y compris les pays et bassins
versants.
A lire : La dernière étude en date à
propos de la pollution des côtes algériennes est celle menée par l’Agence
nationale des déchets (AND). Elle est toujours en cours, même si un rapport
préliminaire a été déjà exploité. (lire dossier publié sur El Watan le 3 septembre 2020 ( https://www.elwatan.com/pages-hebdo/magazine/land-devoile-son-etude-sur-les-dechets-marins-le-plastique-est-le-dechet-le-plus-present-et-le-plus-menacant-03-09-2020
) : Le plastique est le déchet le plus présent et le plus menaçant). En
résumé, ce rapport de surveillance et d’évaluation de la pollution du milieu
marin par les déchets solides, dont la première campagne a été menée en octobre
2019 sur 6 plages du littoral, soit deux plages pour chacune de ces wilayas : Aïn Témouchent, Tipasa et Jijel,
a démontré encore une fois que le plastique demeure le déchet le plus présent
et le plus menaçant pour la mer. Les déchets en plastique viennent en tête de
liste de l’ensemble des déchets retrouvés au niveau de ces 6 plages pilotes
représentant les trois régions du pays : l’Est, l’Ouest et le Centre, et ce,
pour la seule campagne de nettoyage.